"Une désorganisation totale", on vous explique pourquoi les internes en médecine générale sont en grève

Les internes en médecine générale sont en grève du mercredi 29 au vendredi 31 janvier inclus, pour protester contre la réforme leur imposant une année supplémentaire de formation. Ils demandent son report. Un futur médecin franc-comtois nous explique.

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Les internes en médecine générale ont l'intention de donner de la voix à Paris, ce 29 janvier. Ils s'opposent à la réforme de la quatrième année d'internat aussi appelée "année Docteur junior", actée fin 2022, à l'occasion de la loi de finance de la Sécurité sociale 2023Jusqu'à présent formés en neuf ans (dont trois ans d'internat), les jeunes généralistes doivent désormais effectuer une année supplémentaire, essentiellement réalisée en stage ambulatoire, c'est-à-dire au sein d'un cabinet libéral ou d'une maison de santé pluriprofessionnelle. Les futurs médecins généralistes dénoncent un manque cruel d'organisation concernant la mise en application de cette mesure et souhaitent son report.

"La 4e année d’internat avait pour but d’encadrer les internes dans des cabinets en ville pour y apprendre la gestion du cabinet et de la patientèle, pour être plus enclins à s’installer dans un territoire ", a rappelé à l’AFP Bastien Bailleul, président de l’Isnar-IMG. Mais "devant l’insuffisance de préparation, nous n’aurons pas assez de maîtres de stage pour nous accueillir", déplore-t-il. Les premiers internes concernés par la réforme ont débuté leur internat en novembre 2023 et sont amenés à effectuer une quatrième année entre novembre 2026 et novembre 2027.

4 000 futurs médecins généralistes à accueillir

Ce constat est partagé par un étudiant concerné, originaire de Franche-Comté. Ce dernier a préféré témoigner anonymement par peur des représailles au sein de sa faculté. Il rappelle que ce texte a été voté par le recours à l'article 49.3 et que les décrets d'application n'ont pas encore été communiqués. Antoine* pointe du doigt plusieurs obstacles à la mise en application de cette loi. "Ce qui nous embête c'est que ça fait deux ans qu'on attend que les décrets soient communiqués pour nous éclairer sur cette quatrième année, mais rien n'a été fait depuis. Nos maîtres de stage sont un peu perdus aussi. Le recrutement des maîtres de stage universitaires a pris beaucoup de retard", nous explique-t-il.

Photo d'illustration d'un cabinet de médecin généraliste. © SEBASTIEN TOUBON / MAXPPP

Il alerte sur le manque de cabinets en capacité d'accueillir environ 4 000 futurs médecins généralistes en France. "Il n'y a pas assez de maîtres de stage universitaires. On le savait avant la réforme, on avait demandé du temps. On est dans une désorganisation totale. On demande à participer à l'harmonisation de cette réforme afin qu'on soit sûr qu'il y ait assez de maîtres de stage pour tout le monde", insiste-t-il. Pour les futurs généralistes, il s'agit de trouver un cabinet pour effectuer un an de stage avec des prérequis particulièrement restrictifs, selon les concernés. Par exemple : la nécessité d'avoir des locaux adaptés pour accueillir de manière autonome le futur généraliste dans un bureau séparé, à proximité du médecin sénior.

C'est difficile de trouver des structures en région. Et à Paris, c'est presque impossible. Cela représente un investissement financier pour les médecins.

Antoine*, futur médecin généraliste

Le futur généraliste en milieu rural cite des chiffres récemment publiés par l'intersyndicale. Moins de 50 % des médecins généralistes français seraient en capacité d'accueillir des "docteurs juniors". Autre affront pour les généralistes : la nomination à la tête du comité de suivi pour la mise en place de la réforme d'un oncologue cardiologue. "Cela renforce encore plus notre incompréhension", abonde-t-il.

Il dénonce aussi l'impossibilité de choisir le secteur géographique d'exercice. Ce dernier, qui possède déjà un projet d'installation au sein d'une communauté de communes de la région, devrait être obligé de réaliser sa dernière année d'étude dans un autre territoire. "Je ne pourrai donc pas commencer à créer un lien avec ma patientèle alors que c'est soi-disant le but de la dernière année", se désole-t-il.

Des futurs généralistes dirigés vers les hôpitaux publics ?

Ce que craignent également les étudiants, c'est de devoir effectuer une année de plus au sein d'un hôpital public, faute de places disponibles en cabinets libéraux sur le territoire français. " Ils nous disent de ne pas nous inquiéter, que si ce n'est pas possible en cabinet on ira en l'hôpital. Mais on a déjà fait 10 ans d'études pour être généraliste, ce n’est pas pour pallier le manque de médecins dans les hôpitaux", dénonce Antoine*, craignant un détournement de la fonction du médecin généraliste.

Dans un secteur déjà fragilisé, alors que les effectifs d'internes en médecine générale ont baissé de 16 % et que les pénuries de généralistes se multiplient sur le territoire, les professionnels craignent que cette mesure accentue le désintérêt des étudiants pour la filière généraliste.

Cela nous oblige à continuer un an de plus, et pour tout le monde, les médecins séniors avant la retraite et les étudiants... Alors qu'on manque de médecins et qu'on est en pénurie.

Antoine*, futur médecin généraliste

Ce mercredi, une délégation d'étudiants doit être reçue aux environs de 16h en commission parlementaire, devant l'Assemblée nationale. Des bus au départ des grandes facultés de médecine ont prévu de rejoindre Paris pour gonfler les rangs de la manifestation. " Il y a des bus affrétés depuis toutes les facultés de France : Lille, Marseille, Lyon, Dijon... Au sein des hôpitaux, il y a aussi des covoiturages organisés depuis Besançon, Auxerre, Belfort", conclut Antoine* qui espère que le gouvernement entendra les revendications étudiantes et reverra sa copie.

*Le prénom a été modifié pour garantir l'anonymat.

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