L'auteur du célèbre roman "La guerre des boutons" disparait prématurément dans les tranchées pendant la Première guerre mondiale. La série Besançon la Romanesque revient sur le destin de Louis Pergaud, cet écrivain passé du Prix Goncourt au front.
Le 6 avril 1915, le jeune romancier à succès Louis Pergaud est porté disparu suite à un assaut contre les lignes allemandes. Quoique pacifiste convaincu, cet homme de devoir, auréolé du Prix Goncourt 1910, aura refusé tout passe-droit et c'est en sous-lieutenant respecté de ses hommes qu'il disparaît.
Cependant, sa dépouille est introuvable, et il faudra attendre le 4 août 1921 pour dissiper toute ambiguïté et reconnaître son statut de "mort pour la France". Une reconnaissance morale bien tardive, et d'autant plus tragique qu'il apparaît que ce furent des tirs français, qui, vraisemblablement, auront eu raison du jeune auteur, sans doute blessé dans les combats et à ce titre soigné derrière les lignes ennemies, dans un hôpital de campagne allemand.
Un destin brisé net, dont il aurait probablement su tirer un conte cruel si le destin avait ménagé un auteur qui paraissait à beaucoup comme l'un des plus prometteurs de sa génération. Immortalisé par le succès jamais démenti de la Guerre des boutons, Louis Pergaud donne aujourd'hui son nom à une vingtaine d'écoles, quatorze collèges, un lycée et une médiathèque municipale.
Par ailleurs, si on trouve plusieurs rues Pergaud en France, ainsi qu'une des dix-neuf rames du tramway bisontin, c'est peut-être un plus modeste monument qui évoque le plus amèrement son souvenir. C'est à Besançon, au cœur de la promenade Micaud, vaste parc à l'anglaise établi sur le lit du Doubs au milieu du XIXᵉ siècle, où le jeune Pergaud aimait à flâner, que se dresse une étrange statue de bronze.
Cette œuvre du grand Antoine Bourdelle intrigue depuis 1932 les promeneurs un peu distraits : un soldat en uniforme de poilu, la crosse de son fusil posée à terre, semble contempler son destin alors que la mort rampe à ses pieds et s'apprête à l'ensevelir.
Sans les titres de certains des romans de Pergaud, gravés sur le socle du monument, rien ne permet de reconnaître le jeune instituteur de Landresse. Peut-être faut-il y voir la volonté, de la part du sculpteur, de confondre pour l'éternité le destin de notre héros avec celui de ses millions de semblables, disparus dans l'anonymat le plus total ?
Nul doute que Pergaud, humaniste jusqu'au bout de sa plume, n'aurait pas dédaigné un tel compagnonnage alors que les horreurs de la guerre le jetaient prématurément dans le néant. Retour sur un destin décapité au cœur de Besançon la Romanesque.
Pour se plonger plus profondément dans son histoire, notre journaliste Florence Cicollela s'était rendue à la Maison de Pergaud à Belmont à l'occasion des 100 ans de la guerre 14/18.
En savoir plus
► Retrouvez un peu de l'esprit de la Guerre des Boutons au Musée Pergaud de Belmont dans le Doubs, son village natal.
► La statue de Louis Pergaud a failli disparaître durant la Seconde Guerre Mondiale.
Texte d’Alexandre Perret-Gentil (Dans la Boucle productions)
Retrouvez les 10 épisodes de la série Besançon la Romanesque en intégralité sur France.tv.