C’est devenu une tradition dans le Haut-Doubs. Le nageur de l’extrême Christophe Corne va renouveler ce dimanche 10 novembre 2024 sa traversée du lac Saint-Point, dans une eau qui avoisinera les 10 degrés. 850m de distance, pour 12 à 15 minutes de nage sans combinaison, un exploit renouvelé chaque année pour la lutte contre la leucémie.
“Ce sont les conditions idéales. Ça ne peut guère être mieux !” : La traversée à la nage du lac de Saint-Point, dans le Haut-Doubs, sera pour lui une promenade de santé. Christophe Corne relève le défi chaque année depuis plus de 20 ans, et en ce début novembre, la météo est encore relativement douce.
“Grand soleil l’après-midi, pas de vent. On sent beaucoup moins le froid quand il n'y a pas d’air”, assure le maître-nageur, habitué à nager en eau froide. Au niveau du réchauffement, c’est plus rapide, le corps va se réchauffer beaucoup plus vite.” La température extérieure sera environ la même que l’eau, 10 degrés environ.
De quoi faire fuir la plupart des baigneurs, mais Christophe Corne, qui est originaire du hameau de Chaudron, au bord du lac, a connu bien pire. “J'ai déjà nagé à 1,5 degré, juste avant que ça gèle.”
En dessous de 10 degrés il y a un gros changement. Là c’est du plaisir, c’est pas l’été, mais il n'y a pas de grosses sensations de froid, à part l’immersion de la tête. Ça dure deux ou trois minutes, après le corps s’adapte.
Christophe Corne
De Saint-Point à Gibraltar et San Francisco
Une condition physique étonnante, qui est avant tout le résultat d’un entraînement permanent. “Je nage en mer ou en lac toute l’année”, explique Christophe Corne, qui est connu pour avoir traversé le détroit de Gibraltar, ou rallié la prison d’Alcatraz, dans la baie de San Francisco en Californie.
Dans le Doubs, il arpente bien sûr le lac Saint Point, mais apprécie également les immersions à la source bleue, dans le village voisin de Montperreux, dont l’eau varie de 4 à 12 degrés selon la saison.
C’est un évènement fort, Christophe, c'est un vrai bonhomme. C'est un nageur de l’extrême. Il fait preuve d’abnégation. Mais il ne fait pas ça n’importe comment, il se baigne toute l’année dedans.
André Jannet, organisateur de l’événement
Pour autant, la nage en eau froide, reconnue stimulante pour le corps, reste une activité dangereuse, elle comporte une part d’imprévisibilité. Si le nageur comtois ne sera équipé dimanche que d’un bonnet et d’un flotteur de secours, la traversée, d'une longueur de 850 mètres pour environ 12 à 15 minutes de nage, s'effectuera avec un bateau à proximité, sur lequel un maître-nageur sera présent. À l’arrivée, à proximité de la base nautique de Malbuisson, une autre nageuse sera, elle, en immersion statique dans l'eau du lac.
Nausicaa, morte des suites d’une leucémie
L’événement est organisé au profit de l’association jurassienne Nausicaa combat sa leucémie, qui depuis 2002 se mobilise pour la recherche contre le cancer. “C'est en multipliant les petites journées comme ça qu’on arrive à faire quelque chose, c’est gratifiant”, témoigne Christophe Corne.
Plus qu’un exploit sportif, c’est une fête populaire qui réchauffe chaque automne les rives du lac Saint-Point, situé à 850 mètres d’altitude. Fanfare, vente de bijoux d’une créatrice de Malbuisson, soupe aux pois, morbiflette à emporter, “Pour cette époque de l’année, c’est une belle fête”, se réjouit André Jannet, président de Nausicaa et organisateur de l’événement, dont les bénéfices reviendront à l’association.
Chaque année, la traversée du lac est un événement important pour Nausicaa. “L’association porte le nom de ma fille”, explique André Jannet. En 2003, la fillette âgée de cinq ans décède des suites d’une leucémie lymphoblastique aiguë. Depuis, André Jannet et les presque 2000 membres de l’association remuent ciel et terre pour réunir des dons à reverser pour la recherche de traitements. En 20 ans, près d’un million d’euros a été récolté, un geste immense qu’André Jannet souhaiterait encore plus important : ”Ça manque cruellement, les chercheurs ont besoin de beaucoup d’argent.”
Un espoir pour vaincre la leucémie
Mais l’édition 2024 devrait avoir une saveur particulière puisque deux chercheurs de l’INSERM (Institut national de la santé et de la recherche médicale) de Besançon, Christophe Ferrand et Marina Deschamps, seront présents pour évoquer une avancée majeure dans leurs travaux sur un projet de biomédicament qui devra permettre de lutter contre la leucémie aiguë myéloïde, maladie de la moelle osseuse qui touche chaque année 5 000 personnes en France.
Un essai clinique de phase 1 vient donc d'être autorisé par l'agence européenne du médicament pour ce traitement, qui pourrait remplacer les douloureuses chimiothérapies et les greffes de moelle, deux solutions qui ne parviennent pas, dans la majorité des cas, d'atteindre la guérison.
“Ça fait dix ans qu’ils bossent dessus”, soutient André Jannet, qui espère une “révolution” dans le sens des guérisons. “On va sélectionner les globules blancs non atteints, on va les mettre en culture, on va vous repasser cette poche, et les globules blancs sains vont attaquer ceux qui sont malades”, résume le président de l’association Nausicaa, qui est aussi président du comité d’organisation et de défense de l’hôpital de Saint-Claude dans le Jura.
Le rendez-vous est donné ce dimanche 10 novembre à 10h30 à Malbuisson, pour une arrivée prévue partir de 11h. “On espère que les gens vont venir nombreux”, lance Christophe Corne, qui, à 60 ans, ne se lasse pas de nager par solidarité.