Histoire : pourquoi fête-t-on encore Saint-Vernier, patron des vignerons dans la vallée de la Loue ?

35 ans après le retour de la Saint-Vernier, des habitants d’Ornans dans le Doubs célébreront ce dernier lors d'un défilé en costumes traditionnels prévu le dimanche 22 janvier.

Maintenir une mémoire, une tradition, c’est ce qui motive Alain Verdenet, bâtonnier d’Ornans de cette vieille confrérie, la confrérie de Saint-Vernier. « Créée en 1583 sur Ornans, rappelle le diocèse de Besançon, cette confrérie avait pour but de venir en aide aux veuves et aux orphelins de ceux qui travaillaient la vigne ». Ce n’était pas qu’une « affaire de religion, précise Alain Verdenet. Il y avait aussi une coopérative comme les CUMA d’aujourd’hui. » Une confrérie du même nom existe également à Arbois.

Au lendemain de la Seconde guerre mondiale, la vigne disparaît des coteaux de la vallée de la Loue. La confrérie Saint-Vernier a cessé son activité en 1962. Elle renaît de ses cendres en 1978.

C’est alors la grande époque de cette confrérie qui reprend les codes de celle des Bourguignons, la Saint-Vincent tournante. C’est d’ailleurs le jour de la Saint-Vincent que la confrérie de la vallée de la Loue choisit de fêter la Saint-Vernier, patron des vignerons.

Six bourgs de la vallée participent toujours à cette fête traditionnelle : Cléron, Ornans, Scey-en-Varais, Montgesoy, Lods et Mouthier-Haute-Pierre. Chaque année, la fête est célébrée dans une des communes de la vallée.

Cette année, c’est le tour d’Ornans. Le défilé partira ce dimanche 22 janvier vers 10h15 de la fontaine du Seult puis se dirigera vers l’église pour assister à la messe dominicale.

Combien de personnes ont encore envie de se déguiser, de chanter des vieux chants populaires, de vivre une tradition qu’ils ont vue quand ils étaient enfants ?

Les membres de la Confrérie ont souvent plus de 80 ans, « L’idée, envisage Alain Verdenet, serait de se lier à la dynamique association Pays d'Ornans Patrimoine. L'association doit publier un texte racontant la longue histoire de cette tradition. 

On ne peut plus compter les membres de la confrérie, il n’y a plus de cotisations !

Alain Verdenet

Pour lui, cette fête, c’est toute son enfance. « Je suis très attaché à l’histoire de la vigne de la vallée de la Loue. Mon grand-père était vigneron » se souvient-il. Alain Verdenet précise que son grand-père, Louis Quéry, était le dernier producteur de vin de la vallée. 

Un film pour se souvenir

En 1983, le réalisateur Georges Nivoix tournait un film d’une dizaine de minutes sur cette fête. La salle du banquet est comble, une chorale reprend des chants écrits et mis en musique par deux habitants de la vallée, Yves Messmer et Louis Petitjean. Gustave Courbet aurait même écrit des couplets transmis par le grand-père d’une des membres de la confrérie aujourd’hui décédée.

« C’est le bon vin qui nous met tous en chœur » chantait alors joyeusement la chorale habillée comme au XIXe siècle.

A cette époque-là, il n’y a plus de vignes dans la vallée. Elle sera replantée quelques années plus tard à Vuillafans par l’association Ruranim, puis en 2015 et 2019 à Ornans par la mairie. Une vigne qui renaît là où Gustave Courbet l’avait peinte.

A Ornans, la première vendange a eu lieu en 2020, il reste quelques bouteilles de cette première récolte. Elles seront sans doute dégustées ce dimanche 22 janvier. Au printemps, François Aubert, le vigneron de Vuillafans et d’Ornans, a prévu de vendre sur le marché d’Ornans son millésime 2022. 300 bouteilles au saveur d’un passé qui voudrait bien ne plus être suranné.