Confinement et violence : quand un groupe de rock dénonce les féminicides

Les Fallen Lillies, groupe de rock de Montbéliard, sortent le titre Feminicid-19. Un clip réalisé pendant le confinement, pour dénoncer les violences faites aux femmes.

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Sur leur page Facebook, les quatre rockeuses donnent le ton : « Les clichés, les attitudes qu'on attribue à la femme parfaite, nous on s'en fout, et on le dit! » Quand Hélène chante, tout en prenant sa guitare, Marine s’occupe de bastonner à la batterie, Laura joue aussi de la gratte, et Ludivine bombarde avec sa basse. En bref, les Fallen Lillies. Des « femmes parfaites, bonnes à marier, mais déchues », explique Hélène. Un groupe de hard rock de Montbéliard, déjà repéré au Hellfest.

Dimanche 3 mai 2020, au soir, les Fallen Lillies sortent « Feminicid-19 ». Une chanson en français pour interpeller le plus grand nombre sur la hausse des violences faites aux femmes pendant le confinement. « Tout s'est fait en dix jours : de l'écriture des paroles jusqu'à l'enregistrement », détaille Hélène, la chanteuse et guitariste du groupe. Si trois d’entre elles sont restées en Franche-Comté et une à Paris, le résultat n’en est pas moins bluffant. Comme si les quatre femmes avaient chanté ensemble, la vidéo montre leurs visages dans la pénombre.
 


 

Un "dommage collatéral" de ceux qui font la loi

 

« L’ennemi n’est pas celui qu’on croit.
Derrière leurs masques, ils cachent leur emprise,
mais à l’aide de flasques, les coups se précisent. 
Des milliers de victimes crèvent dans l’effroi,
Un "dommage collatéral" de ceux qui font la loi. »


Les paroles dénoncent les violences masculines, et aussi les maigres actions de l'Etat. Un système défaillant pour Hélène : « En France, quand une femme ose prendre la parole et se présenter au commissariat, elle n’est pas entendue dans 95% des cas. » Pour appuyer son propos, la chanteuse et guitariste se livre à une comparaison : « La France ne s’est réveillée que l’année dernière, en mettant en place un numéro de téléphone ... Alors qu’en Grande-Bretagne, des initiatives comme le "Black dot" (ndlr : dessiner un point noir, sur la paume de la main, pour montrer que l’on est victime de violences) existait déjà. »
 


Contre cette passivité étatique, les Fallen Lillies élèvent leur voix. Hélène résume la situation : « Les violences conjugales existent depuis toujours, et l’Etat se repose sur des associations et des organismes. » Une campagne de dons a d'ailleurs été lancée par l'association Solidarité Femmes pour venir en aide aux personnes victimes de violence ; le déconfinement pourrait voir l'explosion de demandes d'hébergement d'urgence.
 

Feminicid-19 pendant le Covid-19


Les violences contre les femmes se sont très fortement accrues depuis le 17 mars, date du début du confinement. La plateforme Solidarité Femmes recense deux à trois fois plus d’appels au 3919, la ligne dédiée aux femmes qui subissent des violences, à leur entourage et aux professionnels et professionnelles concernés. Beaucoup de femmes appellent pour la première fois, parfois pour des situations d’urgence. La moitié des appels viennent de l’entourage qui s’inquiète ou dénonce les violences faites à leurs proches.

Au 7 mai 2020, selon l’association « Féminicides par compagnons ou ex » (qui décompte le nombre de femmes mortes sous les coups de leur conjoint), il y aurait eu 33 féminicides, depuis le début de l’année. Parmi ces 33 femmes, 15 d’entre elles sont décédées pendant le confinement.

 


Feminicid-19 pendant le Covid-19, c'est également un appel à la vigilance, de la part des proches comme des voisin.e.s quand les portes sont closes – leur présence, leurs appels pourront sauver des vies. Les Fallen Lillies le clament haut et fort dans leur clip : « La peur au ventre, les poings liés, quand la parole seule peut les arrêter. »

Et cette parole, ce sont aussi les témoignages que les quatre femmes recueillent dans leur messages privés et les commentaires. Le groupe essaie à sa manière de dénoncer, et donner espoir, et cela fonctionne. Hélène raconte : « Des femmes se sont senties concernées par notre chanson : c'est la plus belle des récompenses. »
 

 

Être une femme dans le milieu du hard rock


Si le féminisme est un trait constant du groupe depuis sa création en 2014, les musiciennes ne se limitent pas à ce thème. Du collège, jusqu’à il y a six ans, en passant par le lycée et le garage des parents, les Fallen Lillies se sont construites progressivement, « de petits groupes en petits groupes ». Parce qu'il n’est pas évident de se faire une place dans le milieu du heavy metal, même s’il y a de plus en plus de femmes. Hélène détaille : « Quand on quitte la scène, on nous dit "c’était pas mal finalement". Si on avait été des mecs, on n’aurait jamais eu ce genre de remarques. » La chanteuse et guitariste reste positive : « Il y a toujours le sentiment de devoir faire nos preuves ... Mais en même temps, c’est boostant. »  

Cet été, les quatre femmes devaient assurer une quinzaine de dates – un moyen de financer l’enregistrement de leur premier album. Mais en raison de la crise sanitaire liée au coronavirus, les concerts ont été reportés ou annulés. Sans perdre le sourire, Hélène conclut : « ça devait être une grosse année 2020, tant pis, ce sera une grosse année 2021 ! ».
 


 


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