France 3 bouleverse ses programmes dimanche 15 novembre pour faire le point sur l'épidémie et la prise en charge des patients Covid-19, en direct de deux hôpitaux de Bourgogne-Franche-Comté.
En pleine deuxième vague de Covid-19, comment la Bourgogne-Franche-Comté fait-elle face à l’épidémie ? France 3 vous a proposé une émission spéciale ce dimanche 15 novembre, de 11h à midi.
Comment les malades sont-ils pris en charge ?
Quelle est la situation dans nos hôpitaux ?
Quelles sont les conséquences de l’épidémie, sur le travail des soignants, sur les Ehpad, sur la médecine de ville ?
Elsa Bezin et Jérémy Chevreuil étaient en direct des hôpitaux de Besançon et de Mâcon, avec leurs invités :
- Pierre Pribile, directeur général de l'Agence régionale de santé de Bourgogne-Franche-Comté
- Chantal Carroger, directrice générale du CHRU de Besançon
- Samuel Limat, président de la commission médicale d'établissement du CHRU de Besançon
- Jean-Claude Teoli, directeur du groupement hospitalier Sud Saône-et-Loire, et plusieurs soignants de l'hôpital de Mâcon
- Bastien Rambaud, médecin à la Polyclinique du Val de Saône à Mâcon
- Eric Alauzet, député LREM du Doubs
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Voici en quelques citations ce que l'on peut retenir de cette émission spéciale :
Une deuxième vague plus forte que la première
Pierre Pribile, directeur général de l'Agence régionale de santé (ARS) de Bourgogne-Franche-Comté : "Un chiffre peut-être pour illustrer la violence de cette deuxième vague : à l'heure où nous nous parlons, alors que nous n'avons sans doute pas atteint le pic des hospitalisations dans la région, nous avons 350 personnes hospitalisées de plus qu'au pic de la première vague. Plus de 1700 personnes aujourd'hui dans les hôpitaux de la région atteints d'une forme grave de Covid."Chantal Carroger, directrice générale du centre hospitalier régional universitaire (CHRU) de Besançon : "Hier soir, nous avions 764 patients hospitalisés au CHU de Besançon, dont 112 patients Covid. Et sur ces 112 patients atteints du Covid, 62 en réanimation soins intensifs […] Nous avons armé près 70 lits de réanimation soins intensifs, on va encore pouvoir monter. À l'origine, nous avons 40 lits de réanimation."
Roland de Varax, médecin réanimateur, président de la commission médicale d'établissement de l'hôpital de Mâcon : "Le centre hospitalier de Mâcon est saturé de patients Covid. Nous avons 14 lits de réanimation. Sur ces 14 lits, il y a 14 patients Covid auxquels on est obligés de rajouter quelques lits supplémentaires pour des patients non-Covid. On vient de faire deux transferts cette nuit, ayant reçu quatre patients supplémentaires hier […] Le triage des patients, on n'y tient pas du tout et je pense qu'on va l'éviter."
Pierre Pribile, directeur général de l'ARS de Bourgogne-Franche-Comté : "À l'heure où nous parlons, ce ne sont plus le Jura et la Saône-et-Loire qui sont les départements les plus impactés en nombre de nouvelles contaminations, mais c'est maintenant le Doubs. Avec un effet très net au niveau du Haut-Doubs et les liens avec la Suisse."
On aurait pu espérer que la faible densité de notre région soit un avantage. Vous voyez bien que ce n'est pas le cas. Nous sommes la région la moins dense de France métropolitaine et pourtant la deuxième région la plus impactée. Rien ne protège contre ce virus si ce n'est les gestes barrières. À la campagne comme en ville, ça doit être la règle.
Samuel Limat, président de la commission d'établissement du CHRU de Besançon : "Cette maladie a des constantes. On estime que 3 à 5% des patients qui contractent le Covid nécessiteront une hospitalisation. Parmi ces malades, 15 à 20% nécessiteront des soins critiques, donc une réanimation. Même si la mortalité a évolué depuis le tout début de la maladie, on est malheureusement sur des taux de mortalité de 20 à 25%. Donc le Covid tue encore, il faut le répéter."
Un pic d'hospitalisations attendu dans les prochains jours
Pierre Pribile, directeur général de l'ARS de Bourgogne-Franche-Comté : "Le pic est un pic à plusieurs étages. Le premier pic, c'est celui des contaminations. Celui-ci a l'air d'avoir été franchi dans les premiers jours du mois de novembre. Ensuite, il y aura le pic des hospitalisations. Aujourd'hui, nous n'y sommes sans doute pas encore. D'après les projections de l'Institut Pasteur, ça devrait arriver dans les jours qui viennent, à condition que tous nos concitoyens respectent le confinement. Hélas, le pic des décès est encore plus loin. Il est loin d'être atteint encore dans notre région."Chantal Carroger, directrice générale du CHRU de Besançon : "Le pic est prévu pour le 20 novembre. Nous devrions avoir suffisamment de lits pour prendre en charge les patients de réanimation soins intensifs. Nous avons quand même une inquiétude sur la médecine. Pour autant, nous devrions faire face cette fois-ci encore."
Pierre Pribile, directeur général de l'ARS de Bourgogne-Franche-Comté : "Un hôpital tout seul serait très inquiet. Mais c'est justement parce que les hôpitaux ne sont pas seuls qu'on arrive à franchir ce pic épidémique. Il y a une grande solidarité entre les hôpitaux de la région. Chaque fois qu'un hôpital arrive proche d'une limite de saturation, on propose des transferts que ce soit pour de la réanimation ou pour des services de médecine. Depuis le début de cette deuxième vague, on a transféré plus de 160 patients."
Une coopération public-privé inédite
Bastien Rambaud, président de la commission médicale d'établissement de la polyclinique du Val de Saône à Mâcon : "En déprogrammant une grande partie des interventions, on a pu libérer du personnel médical. Cela nous a permis de pouvoir ouvrir un service dédié aux patients Covid, qu'on prend en charge en soins de suite lorsqu'ils sortent de l'hôpital en attendant une éventuelle convalescence. On a également pu mettre à disposition nos anesthésistes, qui viennent participer aux tours de garde en réanimation. Ainsi que du personnel qui peut intégrer les roulements en réanimation ou en service de médecine si nécessaire."Jean-Claude Teoli, directeur du centre hospitalier de Mâcon : "Lors de la première vague, on avait pu faire face à un afflux de plus de 100 patients. Aujourd'hui, si on somme les patients présents plus les patients transférés, on est à plus de 150 à 160 patients à prendre en charge simultanément. On n'aurait pas pu tenir […] À ce niveau là de partenariat, c'est inédit."
Éric Alauzet, député LREM du Doubs : "On est dans une crise centenaire. On ne peut pas organiser le système de soins pour une crise qui arrive une fois tous les cent ans. Donc on est bien obligés de travailler ensemble, le privé et le public. C'est en train de se faire […] La médecine de ville se mobilise également."
Le témoignage fort d'un patient hospitalisé en réanimation lors de la première vague
Christian Moncourier, 63 ans, retraité : "Ça a été très difficile pour moi et pour la famille. Ça m'est tombé dessus je ne sais pas comment. J'ai manqué de respiration, on a appelé le 15 et j'ai été embarqué. Ça a été rapide. Deux jours après, j'étais en réanimation. Pendant au moins trois semaines.J'ai été endormi très rapidement. J'ai malheureusement perdu deux jours de mémoire. […] Figurez-vous qu'un soir ils ont appelé mon mari pour venir me voir. Parce qu'ils ne pensaient pas que j'allais passer la nuit. Puis il m'a parlé, je l'ai entendu. C'est ça qui m'a accroché.
J'ai eu des séquelles. J'ai eu des problèmes musculaires, des problèmes articulaires, de l'essoufflement encore, des problèmes cardiaques également. Cette année, je vois beaucoup de médecins. Mais c'est surtout l'envie de s'en sortir qui est la plus importante. Parce que la vie est là. Grâce aux équipes médicales, je peux témoigner. Ça a été vraiment un combat."
Porter le masque ce n'est pas facile. Certains disent que c'est liberticide. Avoir des tubes dans la bouche, se réveiller trois semaines plus tard, avoir perdu vingt kilos, ne plus pouvoir marcher, ne plus pouvoir rien faire, ça c'est liberticide.
Samuel Limat, président de la commission d'établissement du CHRU de Besançon : "Cela va faire maintenant neuf mois que l'on vit au rythme de cette pandémie. On est obligés de déprogrammer, de modifier la prise en charge de la plupart de nos patients. On n'a jamais eu autant de malades en réanimation. Donc c'est un peu difficile à entendre que l'on soit face à quelque chose d'autre qu'une réelle pandémie."