Face au manque d'effectifs, de nombreux vétérinaires abandonnent les tournées dans les fermes. Ceux qui restent ont bien du mal à répondre à la demande, notamment dans le département du Jura.
C'est un paradoxe : la Bourgogne-Franche-Comté est la région la plus rurale de France. C'est aussi l'une des régions de France où l'on trouve le plus d'élevages d'animaux. Dans le même temps, et c'est un problème : il n'y a pas assez de vétérinaires pour les soigner. La Bourgogne-Franche-Comté recense 1 020 vétérinaires. Elle se classe avant-dernière région de France en terme d'effectifs.
Les postes à pourvoir sont nombreux. Les candidatures, beaucoup moins. Faute d'effectifs suffisants, de nombreux cabinets de vétérinaires choisissent d'abandonner leurs tournées dans les fermes et dans les prés afin de se recentrer sur l'activité canine, au cabinet.
Résultat : moins de vétérinaires pour soigner les vaches et les chevaux dans le besoin. C'est plus de travail pour ceux qui poursuivent les tournées. Mais dur de tenir la cadence. "On se retrouve avec de nombreux animaux à soigner. C'est un surplus d'activité pour nous", raconte Vanessa Gauthray, vétérinaire à Toulouse-le-Château (Jura). "Nous cherchons depuis le mois d'août dernier un nouveau confrère mais nous ne parvenons pas à recruter".
Autre conséquence de cette pénurie de vétérinaires : il devient compliqué de répondre à toutes les demandes et les délais pour les interventions d'urgence s'allongent. "Pour des urgences comme une artère sectionnée, il nous fallait absolument quelqu'un, sans quoi la jument se serait vidée de son sang", explique Céline Dominguez, gérante d'un centre équestre qui s'est retrouvée en difficulté pour recevoir de l'aide.
Différence générationnelle
A Poligny (Jura), un poste est à pourvoir depuis un an au sein du cabinet de Dominique Magadur. Mais pas l'ombre d'un candidat. Le vétérinaire n'a pourtant pas lésiné sur les moyens. Il a posté des annonces sur de nombreux supports, des écoles de vétérinaire aux revues spécialisées. "Beaucoup de confrères cherchent des gens pour travailler et ne trouvent pas", souligne ce professionnel. Et le constat est le même au niveau national.
Une situation qui peut surprendre en Franche-Comté, étant donné le nombre d'éleveurs de bovins. Alors, comment expliquer cette difficulté à recruter ? Il pourrait s'agir d'une évolution des objectifs des nouvelles générations, qui veulent moins de contraintes et plus de flexibilité. "Ce sont peut-être les horaires qui peuvent poser problème", avance Vanessa Gauthray. "Les jeunes sont plus habitués à être en télétravail avec des horaires assez flexibles". Sans parler des déplacements, plus longs en zone rurale.
Dominique Magadur avance aussi une autre raison qui pourrait expliquer cette difficulté à trouver des candidats : une augmentation de l'activité canine due à la pandémie de Covid-19 et aux différentes périodes de confinement. "Les gens se sont un peu replié sur leurs habitations, ils ont repris des animaux et il y a eu des recrutements à ce moment-là", souligne le vétérinaire, qui évoque lui aussi une "évolution des objectifs" de vie. "Horaires, gardes, astreintes : tout cela freine", regrette Dominique Magadur. Résultat : les mi-temps et temps partiel se multiplient. Sauf que les "animaux n'ont pas de nuits ou de dimanche", rappelle le vétérinaire. "Et ils ont besoin de nous".