« J’ai perdu 12 à 15 kilos, je réapprends à vivre » : la longue rééducation des malades du Covid-19

A Héricourt, en Haute-Saône, le centre de rééducation Bretegnier prend en charge en hôpital de jour des malades qui ont séjourné plusieurs semaines en réanimation. Un long travail commence pour les remettre en forme, du corps à l’esprit.

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Sur un tapis au sol, Jean-Marie Gindre 67 ans, est l’un des patients en rééducation. Ce retraité très actif revient d’un long voyage au pays du Covid-19. Hospitalisé à l’Hôpital du Nord Franche-Comté près de Belfort, il s’est réveillé après 11 jours passés dans le coma à l’hôpital de Saint-Laurent du Var près de Nice.

Pour ce malade évacué par avion sanitaire au moment où l’épidémie mettait en tension les hôpitaux de Bourgogne-Franche-Comté, la vie n’est pas encore redevenue comme avant. Comme les nombreux malades ayant séjourné en réanimation, Jean-Marie Gindre a perdu beaucoup de poids. Il va lui falloir refaire du muscle, selon l’expression.

 

 


Réapprendre à se tenir debout, à marcher


Au sol, Yannick Boissac, professeur d'activités physiques adaptées veille au grain. En douceur, et avec encouragement. « Il faut par petits exercices simples au départ les remuscler, et qu’ils puissent au départ se maintenir debout, pour retrouver ensuite une autonomie dans la vie quotidienne » explique le soignant. « Pour certains, se maintenir juste debout au départ était très compliqué. Ils tenaient quelques secondes et au fil des jours, ils ont progressé. Ce n’est pas facile pour eux, ils ont du mérite. C’est un peu comme des sportifs de haut niveau qui se sont blessés pendant longtemps et qui font une rééducation. Ils ont tellement perdu, c’est un combat de tous les jours » ajoute Yannick Boissac.
 



Des séquelles musculaires, respiratoires et neurologiques



Comme Jean-Marie Gindre, les survivants du Covid-19 réapprennent la vie. Ces petits gestes du quotidien. Conduire, lire, avoir l’esprit attentif… autant de fonctions que la maladie a fragilisé. Faire des exercices, travailler la motivation, accompagner ces malades, c’est le travail de Marion Bitsch, ergothérapeute. « Les activités du quotidien, on ne s’en rend pas toujours compte, demandent des fonctions cognitives qui fonctionnent. Ces fonctions ont pu être lésées durant la réanimation post-covid », précise la jeune femme. Avec son patient ce matin là, elle travaille sur un plan de ville, comment s’y repérer. Faire travailler l’attention, la mémoire… autant de petits exercices qu’elle va faire avec les patients pour qu’ils ne soient pas désarçonnés, quand il leur faudra reprendre le quotidien.


Au centre de médecine physique et de réadapatation Bretegnier, une aile du bâtiment est consacrée aux malades du Covid. Certains sont encore hospitalisés ici. D’autres viennent en hôpital de jour, orientés par l’hôpital où ils étaient, ou par leur médecin généraliste. La capacité est de 20 places. Les patients pris en charge actuellement ont entre 46 et 77 ans.

 



"Il leur manque une partie de leur vie"


Ergothérapeute, orthophoniste, professeur de sport…La rééducation comporte aussi un suivi psychologique. Car ces malades, s’ils semblent en forme relative, ont souffert. Dans leur corps, leur tête. « Ce sont des personnes qui sont entrées debout à l’hôpital, qui pour certaines se sont réveillées à 800 kilomètres de chez elles, parfois même dans d’autres pays, à Lausanne, au Luxembourg. Il leur manque une partie de leur vie, quelques jours, quelques semaines en fonction du temps passé en réanimation. C’est compliqué. Ces patients nous disent faire beaucoup de cauchemars, avoir du mal à se remettre dans le quotidien. On travaille avec nos psychologues. Il y a le corps, et l’esprit, c’est une prise en charge globale dont ces malades ont besoin » explique le Dr Sonia Sparapan-Camelot, médecin-chef de l’établissement.

 



"Je vais vivre maintenant autrement" explique ce survivant du Covid-19


Jean-Marie Gindre a pu retrouver son domicile. Il vient au centre Bretegnier en hôpital de jour. « C’est très bien, on prend d’un côté une vie de famille et de l’autre, on travaille avec des professionnels pour retrouver ce qu’on a perdu ».

Guéri du coronavirus Covid-19, ce retraité très actif, a décidé de vivre autrement. Lui qui ne sait pas dire non, comme il dit, va se consacrer un peu plus à sa famille. 11 jours de coma l’ont marqué. Il se souviendra longtemps de ce jour où il s’est réveillé dans un lit de réanimation à Saint-Laurent du Var. « On m’a dit à mon réveil que j’étais près de Nice, je me demandais ce qui m’arrivait. Je n’y croyais pas au début. J’étais entré à l’hôpital de Trévenans près de Belfort, il n’y avait aucune raison que je sois là » dit-il.

De ce transfert dans le sud de la France, Jean-Marie Gindre restera marqué à jamais. Il compte bien retourner à Saint-Laurent du Var, pour le plaisir, en touriste cette fois! Les soignants en réanimation ont été aux petits soins pour lui, formidables, dit-il. Lui qui n’avait aucun vêtement quand il a du repartir en avion sanitaire vers la Franche-Comté s’est vu offrir, un pantalon et une veste d’interne. L’ensemble du personnel a écrit un petit mot sur sa tenue. Un geste qui l’émeut encore aujourd’hui.

Pour lui, comme pour les autres patients pris en charge au centre de rééducation, le combat contre la maladie est gagné. Reste à en effacer  autant que possible les séquelles physiques. Difficile de dire combien de temps va durer la rééducation de chaque malade, le temps qu’il faudra, explique le centre qui va accompagner ces prochaines semaines et mois, les survivants du Covid-19.


 




 
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