La ville de Lure, en Haute-Saône, fête ce 29 février l'anniversaire du sapeur Camember, un des premiers personnages de bande dessinée. Retour sur cette figure de la BD et de l'humour absurde.
Les planches sont plus que centenaires. Pourtant, elles n'ont pas pris une ride. Ce samedi 29 février, le sapeur Camember fête ses 43 ans. Ce qui équivaut à 130 bougies puisqu'il ne fête réellement son anniversaire qu'aux années bissextiles. Le personnage de BD imaginé par George Colomb, dit "Christophe", est donc célébré tous les quatre ans à Lure, en Haute-Saône, ville natale de l'auteur.
Avenue de la République, dans le centre-ville de Lure, une statue de deux mètres est érigée à l'effigie du sapeur Camember. Un personnage important de la culture haut-saônoise, mais également de la bande-dessinée.
"Bête", "méchant", "satirique", "ironique"... Les adjectifs ne manquent pas pour qualifier l'œuvre du bédéiste. "Les Facéties du sapeur Camember", qui débutent dès 1890 dans le périodique français "Le Petit Français illustré", racontent les aventures d'un soldat illettré et un peu - voire, plus que - naïf.
Le génie français
Pour illustrer un peu plus l'absurde de cette bande dessinée, il faut préciser que le personnage est très vite affecté au génie français. Une ironie en raison de la faiblesse d'esprit du personnage. Les aventures du simple soldat amusent petits et grands pendant près de six ans.
Certaines pitreries du sapeur Camember - dont la mère se nomme Polymnie Cancoillotte - marquent les esprits. Une fois, en mission, le sapeur se voit obliger de creuser un trou pour y jetter des ordures. S'en suit l'échange suivant avec son supérieur :
- Sergent ! interroge Camember, et la terre du trou ?
- Que vous êtes donc plus hermétiquement bouché qu’une bouteille de limonade, sapeur ! Creusez un autre trou !
- C’est vrai !
Bêtement, le soldat s'exécute. Le deuxième trou produit également de la terre. Le soldat ne sait pas où la mettre et songe à creuser un troisième trou avant de s'attirer les foudres du gradé.
Christophe, un savant aux multiples bêtises
Les dernières planches des "Facéties du sapeur Camember" sortent en 1896, alors que le périodique "Le Petit Français illustré" commence peu à peu à s'essouffler. Pendant six ans, elles ont distrait les plus jeunes et auront plus tard une influence dans la bande dessinée mais également dans le cinéma.
Si le personnage est complétement dénué d'intelligence, son auteur, lui, en est tout l'inverse. Doublement bachelier en lettre et en sciences, George Colomb intègre les bancs de l'Ecole normale supérieure en 1878. En même temps qu'un de ses amis, Jean Jaurès.
A côté de ses planches de BD, l'auteur est également un éminent botaniste et un docteur en sciences naturelles. Une double casquette qui lui a parfois posé problème. Le directeur du laboratoire de botanique de l'université de la Sorbonne avait ainsi demandé à George Colomb de ne plus se joindre aux excursions botaniques. Pour cause, ses plaisanteries continuelles détournaient les élèves de leurs études.
Près de cent trente ans plus tard, les drôleries du sapeur Camember et de "Christophe" continuent d'exister. Les "Facéties" ont été rééditées en 2016 et sont à apprécier sans modération en ce jour anniversaire du sapeur à Lure.
Comme chaque 29 février, la commune de Lure a célébré l'anniversaire du Sapeur Camember. Malgré la pluie, les rues sont bien remplies pour ces 43e festivités.
Parti de la mairie, le traditionnel défilé est arrivé devant la statue pour la suite du programme avec notamment l’intronisation à la confrérie du Sapeur Camember de l’ancien secrétaire d’État Jean-Noël Jeanneney.