À Lamoura dans le Haut-Jura, le village de vacances qui a compté jusqu’à 900 lits a fermé ses portes depuis 4 ans. La plus grosse structure touristique du département du Jura est à l’abandon comme en témoignent ces photos prises ces derniers jours.
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“Ça fait mal de le voir comme cela”. Ces derniers jours, Eric* (prénom modifié) a voulu voir ce qu’était devenu le village de vacances. Bien que le lieu soit une propriété privée, et qu’y pénétrer y est interdit et dangereux, il a pu rentrer quelques minutes sur le site. “Il y a des portes qui ont été forcées, quelques carreaux cassés. Je suis entré par curiosité” confie-t-il à France 3 Franche-Comté.
Au VVL, le temps s’est arrêté. Le hall d’accueil autrefois chaleureux est toujours là, des affaires et meubles ont été mis sens dessus dessous. La piscine est un triste fantôme. Le gymnase froid, silencieux comme un mort. L’auditorium a perdu son prestige d'autrefois. Eric* n’est pas allé plus loin par sécurité. Chambres, lits, matelas sont sans doute dans les étages, d'autres vestiges abandonnés par le bruit de la vie.
“C’est un peu triste de voir le VVL comme cela. J’ai des souvenirs d’y être allé à la piscine quand j’étais enfant. C’était un lieu de vie, d’activité pour les familles, on allait y boire un verre” se souvient-il. Le voir ainsi fait mal.
Ce n'est plus entretenu. C’est un endroit fantôme, alors qu’à proximité il y a des chalets qui se vendent à des prix astronomiques !
Eric*
900 lits pour un village de vacances créé en 1967
Le village de vacances de Lamoura a laissé des souvenirs à des générations de familles. Hiver comme été, c’était le lieu des vacances pour les habitants de 12 communes en France qui s'étaient regroupées pour construire le site. Angers, Rennes, Chalon-sur-Saône, Troyes, Chauny, Longjumeau, Lorient, Marly-le-Roi, Saint-Dizier, Sartrouville, Suresnes et le SI Ris-Orangis-Mennecy-Bondoufle avaient fait le choix alors dans le tourisme social. Des vacances subventionnées à petits prix. Une formule qui a fini par devenir un gouffre financier pour le SIVVL (syndicat intercommunal du village de vacances de Lamoura) quand le bâtiment s’est fait vieillissant.
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Le village de vacances reste aussi dans les mémoires pour plus d’un fondeur qui y a rêvé de la glisse parfaite un soir d'hiver. Il servait de lieu d’hébergements pour des centaines de coureurs de la course de ski de fond de la Transjurassienne.
10 ans d’une lente agonie immobilière
Fin juillet 2014, le VVL de Lamoura met la clé sous la porte, les derniers vacanciers venus des 12 communes de France s’en vont, surpris par la fermeture (voir la vidéo ci-dessous). S'ensuivront des années de rebondissements et d’incertitude pour le lieu qui est alors mis en vente.
De 2012 à 2014, l’entreprise Geco gère le village de vacances, mais finit par être placée en liquidation judiciaire.
En 2015, le VVL est vendu aux enchères. La Région Franche-Comté qui s’était positionnée pour 1,5 million d’euros est doublée par une société parisienne Ereig spécialisée dans l'immobilier professionnel. Elle fait l’acquisition du site pour 2,5 millions d’euros et annonce vouloir faire des travaux pour monter en gamme une partie des hébergements. Elle ne règlera pas totalement l’achat de ce village devenu alors VVStar. Les procès s’enchaînent.
La société Real Hope, filiale d’Ereig, finit à son tour par être placée en liquidation judiciaire en septembre 2020. Un liquidateur judiciaire basé au tribunal de commerce de Pontoise s’empare de ce complexe dossier du VVL. Vendre ? Trouver un repreneur ? Voilà quatre ans que le village de vacances est fermé, tristement endormi.
“On n'a aucune nouvelle depuis des années”
Dans le Haut-Jura, alors que commencent les vacances d’été, le site du village de vacances de Lamoura s’est fondu dans le paysage. Les habitants du secteur franco-suisse se sont lentement habitués à avoir ce fantôme sous leurs yeux. Un agriculteur vient tondre les extérieurs, nous explique Francis Leseur, maire de la commune de Lamoura. “De mon côté, cela fait bien deux ans et demi que je n’ai plus de nouvelles du liquidateur judiciaire" qui selon lui, est l’actuel propriétaire des lieux. "Ce village de vacances manque pour les grands événements sur le massif", ajoute l’élu. Il regrette amèrement le manque de mobilisation des collectivités au moment où le VVL aurait pu être sauvé.
Du côté de la communauté de communes de la Station des Rousses, on est également dans l’expectative. “Il y a eu des études de faites pour déterminer comment on pourrait se positionner si le bien revenait sur le marché et était à vendre” indique Nolwenn Marchand président de la communauté de communes. Le temps passe, le changement climatique et ce dernier hiver peu enneigé ne jouent pas en faveur d’un retour à la vie du VVL de Lamoura, fleuron social, fleuron déchu. Un ancien navire amiral du tourisme dans le Haut-Jura dont personne ne semble guère aujourd’hui se soucier.
Contacté le 10 juillet par France 3 Franche-Comté, le tribunal de commerce de Pontoise n’a pas pour l’instant répondu à nos questions, de même que le SIVVL qui était à l’origine de la création du village de vacances.