Ce jeudi, l'accusée dans le procès du meurtre de Sophie Lionnet a affirmé que la jeune fille au pair était une menteuse. Le corps de Sophie Lionnet, qui a longtemps vécu dans l'Yonne, a été retrouvé carbonisé en 2017 dans le jardin du couple qui l'employait à Londres.
Sabrina Kouider, accusée d'avoir tué sa fille au pair Sophie Lionnet, a affirmé jeudi que la jeune Française était une "menteuse" invétérée, au cours de son procès à Londres, avant d'être elle-même qualifiée de "manipulatrice".
Cette mère de famille de 35 ans a été longuement interrogée par Me Orlando Pownall, l'avocat de Ouissem Medouni, co-accusé et compagnon de Mme Kouider. Ces deux Français s'accusent mutuellement du meurtre de la jeune fille qui travaillait chez eux, dans le sud-ouest de la capitale britannique.
► Tous nos articles sur le procès Lionnet
"Elle mentait tout le temps", lance Sabrina Kouider, répondant à l'avocat qui l'interroge sur des insultes ("putain", "salope") dont elle aurait abreuvé la victime de 21 ans, qui a vécu de nombreuses années dans l'Yonne, et souvent décrite comme une personne discrète, voire timide.
"Elle était tout le temps là avec son grand sourire, à essayer de vous convaincre", poursuit l'accusée, dans une salle d'audience de la cour criminelle de l'Old Bailey où le procès s'est ouvert le 19 mars.
Évoquant leur vie à Londres, Sabrina Kouider, les yeux cernés et qui portait une veste et un haut noir, affirme que Sophie Lionnet inventait des prétextes ("j'ai oublié de faire les courses, j'ai perdu l'argent") pour dissimuler de soi-disant manquements dans son travail. Elle s'attribue en revanche un rôle de cheffe de famille exemplaire.
"Elle avait tout avec moi. Je faisais à manger (...), le ménage, elle s'amusait, elle avait tout", clame l'accusée, dont les propos contrastent avec ses déclarations de la semaine dernière, lorsqu'elle avait reconnu avoir frappé "très fort" la victime avec un câble électrique.
Devant la cour, elle se décrit comme une "mère normale" et "généreuse". Aux questions de l'avocat, elle répond systématiquement sur un ton indigné, mouchoir à la main, n'hésitant pas à l'interrompre, à lui reprocher de "passer du coq à l'âne".
Face à elle, debout près de ses dossiers, Me Pownall riposte en évoquant ses "larmes de crocodile" et sa propension à "divaguer", à réécrire les faits. Par exemple, concernant une offre de rôle dans un film aux États-Unis que la victime avait dit avoir reçue de l'accusée.
Alors que Sophie Lionnet voulait partir, "vous l'avez persuadée de rester en faisant des promesses. Ne lui avez-vous pas dit que vous connaissiez un producteur ?", demande l'avocat.
"Elle n'avait rien d'une actrice", répond-elle, niant avoir formulé une telle proposition. "Elle était même complètement l'opposé" d'une actrice.
"Et vous n'avez pas dit que vous aviez décidé de l'employer comme mannequin ?", poursuit Me Pownall. "Non", assure l'accusée. "Si j'avais dû engager quelqu'un, j'aurais choisi la bonne personne".
"Votre vérité n'est pas la vérité"
En fin de journée, la discussion se tend encore un peu plus. "Vous êtes quelqu'un ayant fait preuve de violence envers beaucoup de gens", assène l'avocat."Votre vérité n'est pas la vérité, vous êtes une manipulatrice", dit-il, après qu'elle eut une nouvelle fois accusé son compagnon d'avoir "tué" Sophie Lionnet.
Face au ton posé de l'avocat, Sabrina Kouider, qui réplique du tac au tac, s'énerve, hausse le ton, manque presque de se disputer avec lui.
"Je ne suis pas une manipulatrice. Je crois que c'est Monsieur Medouni qui m'a manipulée", dit-elle, avant d'affirmer, comme elle l'a fait à maintes reprises tout au long de la journée : "Je n'ai pas tué Sophie".
Sabrina Kouider s'était installée à Londres en 2004, travaillant comme nounou, employée à la poste, puis dans un groupe de communication avant de vendre des crêpes, puis de tenter sa chance dans la mode. Elle est aujourd'hui dans un centre pénitentiaire destiné aux personnes souffrant de troubles mentaux.
Le cadavre calciné de Sophie Lionnet avait été retrouvé le 20 septembre 2017 dans le jardin du logement que l'accusée et son compagnon de 40 ans partageaient dans le sud-ouest londonien.
Selon l'accusation, la jeune fille avait vécu un calvaire pendant les vingt mois ayant précédé sa mort, passés au service du couple, endurant intimidations, cris et violences. Le procès se poursuit vendredi.