Le manque d'eau affecte les piscicultures, tant au niveau de l'élevage que de la pêche de loisirs. En Bourgogne, les exploitants s'inquiètent pour la pérennité de leur activité.
"Ici, on est sur un étang de production qui fait environ quatre hectares. On voit bien que cette année, il manque à peu près 80 centimètres d’eau." Cyril Denderes arpente les rives de l'un de ses étangs, les pieds dans la vase. Il élève des poissons depuis 23 ans sur son exploitation de Mancey, en Saône-et-Loire. "Le manque d’eau va créer de la mortalité sur l’étang. D'expérience, on sait qu’une année de sécheresse comme celle-là peut causer 40 à 50% de production en moins."
Les poissons ont besoin d'eau fraîche et oxygénée
La sécheresse historique de cet été 2022 fait souffrir le secteur piscicole. "Cette année, on se retrouve avec un bassin de pisciculture sans arrivée d’eau, ce qui nous a obligé à stopper notre activité sur ce site", relate Cyril Denderes. "Ce n’est pas la première fois, on a une petite récurrence depuis 2015, avec une année qui a été correcte en 2021. Autrement, certaines années, en 2004-2005, on pouvait faire du canoë sur ce tronçon…"
Outre l'activité d'élevage, le manque d'eau affecte aussi l'activité commerciale de pêche d'étang, que les pisciculteurs ouvrent aux amateurs. "Comme la rivière Natouze n’alimente plus nos bassins, ces derniers manquent d’oxygène et les truites ne peuvent pas s’adapter sur le plan d’eau", détaille Stéphanie, la compagne et associée de Cyril Denderes.
"Les truites ne supportent pas des températures supérieures à 19 degrés, donc si je les mets dans l’eau, elles vont mourir."
Résultat : son bassin de pêche est vide. "Normalement, ici, il y a beaucoup de pêcheurs en journée. C’est convivial. Mais tous les clients ont annulé. J’ai toujours des réservations en septembre, mais on espère avoir de l’eau pour les confirmer… On attend la pluie pour pouvoir rouvrir la pêche à la truite. Tout dépend de la météo."
Le problème, c'est que plus la pluie arrive tard, plus la fenêtre de pêche sera réduite. "Vers le 10 décembre, le gel va commencer à s’installer et on devra arrêter de pêcher pour attendre le dégel au mois de janvier", explique Cyril Denderes.
Vers une évolution des pratiques d'élevage
Aujourd'hui, le couple de pisciculteurs est inquiet. "Un tel manque d’eau, ça ne nous était pas arrivé depuis des années et ça aura une incidence sur la santé de l’entreprise. Ça nous peine et ça nous oblige à une remise en question. Tous les ans, nous avons un déficit d’eau. On est obligé de fermer notre activité commerciale de pêche à la truite en juin, juillet, août, tous les ans ces derniers temps."
"Il va falloir trouver des solutions, à l’avenir, pour pallier ce manque de production."
Cyril Denderes
Pour l'instant, toutes les piscicultures ne sont pas menacées. À une centaine de kilomètres de Mancey, la pisciculture de Velars-sur-Ouche en Côte-d'Or ne connaît pas les mêmes problèmes : elle est alimentée par une source dont l'eau est en permanence à 12 degrés, une température idéale pour les truites. Mais son responsable, Sébastien Demaizières, sait que c'est toute la profession qui devra s'adapter. "Il faudra changer d’espèces, produire moins avec des espèces plus tolérantes au déficit d’eau, et donc à la chaleur et au manque d’oxygène."