À 500 jours du début des Jeux paralympiques de Paris en 2024, Sandrine Martinet est revenue sur son parcours, son handicap. La Mâconnaise, championne en titre de para judo, annonce ses objectifs pour la plus prestigieuse des compétitions sportives.
Vous avez gagné une fois les Championnats du monde, trois fois les Championnats d'Europe, 4 médailles paralympique dont une en or à Rio en 2016. Vous êtes aussi porte-drapeau de la délégation française à Tokyo en 2020. Comment fait-on pour en arriver là, pour rester tout en haut pendant si longtemps ?
Evidemment, il y a beaucoup de travail mais il y a aussi beaucoup de passion. C'est parce qu'on est passionné par notre sport, qu'on adore ça. J'ai la chance de faire un sport où j'apprends tout le temps. Même aujourd'hui, à 40 ans, je continue d'apprendre. C'est hyper enrichissant. Entre la variété des techniques, l'adaptation par rapport à l'adversaire... Il faut que ça soit stimulant ! Passionnant ! Et après c'est aussi beaucoup de travail, d'abnégation, savoir se relever après les défaites et les blessures.
On se souvient de ces Jeux à Londres en 2012, vous avez souffert en demi-finale d'une fracture à la cheville qui vous a contraint à abandonner et pourtant, quatre ans plus tard, aux jeux à Rio vous décrochez la médaille d'or.
Oui vraiment, ces Jeux de Londres ça a été très compliqué. Bien évidemment cette demi-finale où je vais jusqu'au bout malgré la douleur; malgré la blessure. Mais je ne peux pas me présenter pour aller chercher le bronze. C'était impensable en étant la grande favorite de ne pas avoir de médaille donc ça a été une énorme claque pour moi et pour toute l'équipe.
Derrière, c'était une traversée du désert sur plusieurs mois avec des complications sur la blessure. Et puis mon deuxième enfant, ma petite fille, est arrivée et là j'ai commencé à retrouver le sourire... On s'est dit avec mon mari qu'on ne pouvait pas rester là-dessus. Il fallait aller chercher la médaille qui manquait à mon palmarès.
Pour la petite histoire, je me fracture la malléole de l'autre cheville quelques mois avant les Jeux de Rio en 2016. J'ai appris de la première blessure pour ne pas commettre les mêmes erreurs et avoir le bon timing pour revenir en pleine forme. Et voilà j'ai réussi à Rio à remporter l'or tant attendu, à retrouver ma petite famille dans les gradins et avoir cette marseillaise aux Jeux.
Revenons un tout petit peu en arrière, vous commencez le judo à l'âge de 9 ans. Vos premières compétitions internationales à 20 ans avec votre handicap. Comment vous conjuguez votre handicap avec le sport ?
Je suis achromate, je ne vois aucune couleur et j'ai une diminution de l'acuité visuelle. Oui, ce n'est pas anodin, je ne peux pas conduire, si vous me mettez en plein soleil sans lunettes je vois tout blanc. Ce n'est pas forcément simple mais après il y a plus important comme handicap. Voilà, j'ai grandi avec cela depuis que je suis toute petite donc je vis avec, je l'accepte et finalement grâce au sport j'en ai fait une force.
Je ne sais pas à quoi ressemblerait ma vie sans handicap. Mais aujourd'hui je suis maman, je suis kiné, sportive de haut niveau avec une belle carrière, et ça je le dois beaucoup au sport. J'ai commencé à l'âge de 9 ans le judo, mes frères faisaient du judo au lycée, et je me suis dit que ce serait plus simple que dans un sport collectif pour être acceptée. Quand j'ai commencé dans mon club, j'étais un enfant en kimono qui faisait du sport. Une fois qu'on a le kimono dans les mains, on fait du judo, point barre.
La prochaine étape, ce sont les Jeux paralympiques Paris 2024. C'est ici à domicile dans 500 jours, quels sont vos objectifs ?
Ce sera de ramener une cinquième médaille en six participations aux Jeux paralympiques. Bien évidemment, je vais essayer d'aller chercher l'or, je ne vais pas faire autre chose alors que j'ai fait ça toute ma vie. Je serais contente si j'arrive déjà sur le podium mais l'objectif est d'aller chercher un nouveau titre.
Je voudrais que ma fille soit là et qu'elle sache pourquoi sa mère fait tous ces sacrifices. Après pour notre mouvement, c'est hyper important les Jeux de Paris 2024, puisque c'est l'occasion de faire découvrir tous les sports paralympiques, de faire découvrir les athlètes paralympiques. Et donc voilà, si on arrive à faire évoluer notre société par rapport au handicap, et amener un maximum de personnes en situation de handicap à aller vers les clubs et aller s'éclater en faisant du sport et bien cela sera fantastique.
Entretien réalisé par Valentin Casanova.