Le film "Danser sur les frontières" nous plonge au cœur de la création d'Akzak, un projet de danse audacieux à dimension internationale, porté par le tandem de chorégraphes : Héla Fattoumi et Eric Lamoureux.
Héla Fattoumi et Éric Lamoureux créent et dansent depuis 30 ans. Ensemble ils dirigent le Centre Chorégraphique National de Bourgogne-Franche-Comté (Viadanse) à Belfort après avoir dirigé celui de Caen pendant 10 ans.
L’Afrique est une terre d’inspiration pour les deux chorégraphes depuis leur association artistique.
Leur spectacle Akzak s’inscrit dans une dynamique fondamentalement humaniste, faite de partages et d’échanges entre les deux continents.
On avait envie de repartir vers ce continent à travers les humanités qui en émanent et cette dimension du rythme tout simple nous a très vite réjouit.
Akzak, une cohésion nourrie des singularités de chacun
Ils s’appellent Merem, Fatou, Simo, Synda ou encore Angela, et ont entre vingt et trente ans. Ils sont douze : six filles et six garçons. Trois danseurs ont été sélectionnés au Burkina Faso, trois viennent du Maroc, trois de Tunisie, et enfin trois de France.
Au démarrage de la résidence au Centre Chorégraphique National de Bourgogne-Franche-Comté à Belfort, leur niveau, leurs cultures et leurs compétences sont très variés.
Certains danseurs participent pour la première fois à une création, d’autres misent tous leurs espoirs pour se faire une carrière dans la danse, et tous semblent être porteurs de la flamme qui intéresse les chorégraphes.
Ces danseurs ne se connaissent pas et doivent faire corps autour d’un rythme commun. L’œuvre ne peut fonctionner que si le lien se tisse entre ces douze danseurs choisis par les chorégraphes.
Tu mises sur des humanités qui vont se connecter d’une façon ou d’une autre, qui vont s’aimer, s’agacer… là, il y a beaucoup d’amour.
Dans cette création, la cohésion est le fil rouge, illustrée par un témoin. Ce bâton de couleur est celui qui relie, forme une chaîne à l’image de ces jeunes danseurs qui réinventent un langage, une fraternité et une humanité.
Un travail sur le rythme et la pulsation
Ce rythme qui anime Hélà Fattoumi et Eric Lamoureux est au cœur d'Akzak.
Ce terme emprunté à la théorie musicale ottomane est inspiré du mot turc "aksak". Il désigne des rythmes syncopés, irréguliers.
La frappe de main est l’élément déclencheur de la danse. Chaque danseur a créé sa propre mesure que les chorégraphes ont assemblée pour faire un rythme commun.
Akzak est une pièce qui met en dialogue la danse et la musique. Le rythme est au cœur de cette nouvelle création : celui des corps dansants et chantants, le rythme de la lumière, le rythme de la musique. Sur scène, le percussionniste Xavier Desandre donne les impulsions au groupe de danseurs.
L’appel de la danse, une difficulté dans certains pays
La plupart des danseurs du spectacle Akzak sont issus de pays où la libre expression par le corps peine à trouver sa place.
Fatou, originaire du Burkina-Faso, a 28 ans. Par la danse, par ses gestes, elle peut enfin s’exprimer. C’est pour elle une manière de lutter pour toutes les femmes qui n’ont pas la possibilité de s’exprimer dans son pays : "je plains beaucoup les femmes qui sont dans l’ombre, qui souffrent mais ne peuvent pas s’exprimer. Il faut se battre pour que la femme ait une place dans la société."
Pour Mohamed, originaire de Tunis, la danse n’était pas un projet de vie. Dans son pays, "un homme qui décide de faire de la danse son métier c’est très compliqué !" Il a sacrifié beaucoup de choses pour arriver à s'affirmer en tant que danseur.
J'ai beaucoup dansé en cachette, je montais sur les toits
Au Burkina Faso, être danseur n’est pas non plus considéré comme un métier. Adama confie : "chez nous, on considère les artistes comme des ratés qui n’ont rien fait à l’école."
Plus on s’immerge dans la vie de ces danseurs plus on prend conscience du chemin qu'ils ont parcouru pour en arriver jusque-là.
Le film "Danser sur les frontières" d’Elise Darblay et Antoine Depeyre nous emmène dans les coulisses de la création ce spectacle, de la rencontre des danseurs dans leur pays d’origine aux répétitions au Centre Chorégraphique de Belfort. Une immersion sans fard, avec ses joies, ses moments de doutes et d’élan brisé par le confinement.
Mais résister, rebondir semble être la forme d’exister d’Akzak ! Et les différents acteurs de cette aventure l’ont bien intégré. Certains d’entre eux sont même devenus danseurs permanents au Centre Chorégraphique National de Belfort.
Danser sur les frontières, un film d’Elise Darblay et Antoine Depeyre
Coproduction: Easy Tiger / Viadanse avec la participation de France Télévisions et TV5 Monde
► Diffusion lundi 21 juin à 23h50 et mardi 22 juin à 9h15
A retrouver en replay sur notre page des documentaires "La France en vrai"