Mort de Clément Méric: reconstitution à Paris, sur les lieux du drame

Deux ans après, les protagonistes de la rixe entre skinheads et antifascistes qui avait causé la mort du jeune militant breton Clément Méric se sont retrouvés mardi dès l'aube le temps d'une reconstitution dans le centre de Paris, sur les lieux du drame.

Les juges d'instruction ont ordonné cette reconstitution, en présence d'enquêteurs de la Brigade criminelle, pour mieux cerner le déroulement de cette bagarre mortelle, décrite comme violente et très brève, et qui avait causé un vif émoi.

Les personnes convoquées sont arrivées dans ce quartier commerçant entre les grands magasins et la gare Saint-Lazare avant le lever du jour et l'ouverture des boutiques, vers 5h, accompagnées de leurs avocats. Des barrières, gardées par des CRS, avaient été installées de chaque côte de la rue pour tenir à distance les curieux. 

Réactions politiques après le drame

La mort de Clément Méric, 18 ans, devenu un symbole pour les antifascistes, avait causé un vif émoi. Alors ministre de l'Intérieur, Manuel Valls avait évoqué un "assassinat" et le Premier ministre Jean-Marc Ayrault avait promis de "tailler en pièces" les groupuscules d'extrême droite. Dans la foulée, le gouvernement avait dissout Troisième Voie, dont étaient issus les skinheads, et son service d'ordre, les Jeunesses nationalistes révolutionnaires (JNR), dirigés par Serge Ayoub, un vétéran de la mouvance.

Mais les juges avaient écarté une intention de tuer, en mettant en examen deux skinheads, Esteban Morillo et Samuel Dufour, pour violences volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner, et deux autres pour violences.

Poing américain ?

Esteban Morillo, présent mardi matin à la reconstitution, a reconnu dès le départ avoir porté un premier coup de poing, à main nue, au visage de Clément Méric, parce qu'il se sentait menacé. Une fois la bagarre engagée, son second coup de poing a fait chuter l'étudiant de Sciences-Po, alors en rémission d'une leucémie. Samuel Dufour conteste lui les coups sur Clément Méric. L'un des "antifas" a même confirmé cette version aux juges. Morillo et Dufour ont été remis en liberté après plus d'un an de détention provisoire. Tous les protagonistes étaient convoqués à la reconstitution, dont les quatre mis en examen et trois militants antifascistes, dont l'un est témoin assisté depuis avril.

La rencontre de deux groupes extrémistes

L'enquête avait rapidement permis de retracer le scénario du drame. Le 5 juin 2013, dans l'après-midi, Clément Méric et Esteban Morillo ne sont pas encore là quand les deux groupes se croisent par hasard dans une vente privée de vêtements prisés par les deux mouvances. Selon plusieurs témoins, les invectives partent des militants d'extrême gauche, qui disent avoir vu les skins ranger des poings américains. De leur côté, les skins appellent des renforts, dont Esteban Morillo. L'un des vigiles de la vente demande aux antifascistes de partir, mais ces derniers, rejoints par Clément Méric, restent dans la rue. Le vigile demande alors aux skinheads de sortir par la droite, pour éviter de rencontrer leurs ennemis. Mais ils choisissent de partir à gauche. Sont-ils allés directement à la rencontre de l'autre groupe, ont-ils été alpagués? Chaque camp s'accuse d'avoir provoqué la bagarre.

Autre interrogation, Morillo et Dufour sont soupçonnés d'avoir utilisé un poing américain, une arme prohibée, ce qu'ils contestent, malgré des témoignages. Des SMS de Samuel Dufour au soir des faits, révélés par une expertise, allaient dans ce sens. "J'ai frappé avec ton poing américain", disait l'un d'eux. "On les a défoncés", disait un autre. Mais selon une récente expertise médicale, les blessures des antifascistes n'évoquent
pas l'utilisation d'une telle arme.

Qui était Clément Méric ?

Le jeune homme âgé de 18 ans était arrivé en septembre à Paris. Fils de deux professeurs de droit de la faculté de Brest, il avait obtenu un bac S avec mention très bien après avoir passé sa scolarité au lycée de L'Harteloire à Brest. Le jeune homme y était déjà connu pour son engagement à gauche. Jean-Jacques Hillion, proviseur du lycée brestois, décrit un "élève qui a marqué un petit peu son passage dans l'établissement, par ses résultats et l'engagement qu'il avait avec ses camarades. C'est quelqu'un qui était impliqué dans l'établissement, un élève respectueux du règlement avec lequel nous n'avions eu aucun problème."J'ai le souvenir d'un gamin que j'ai eu plusieurs fois dans mon bureau", se souvient encore le proviseur qui évoque un lycéen "capable de mobiliser ses camarades". Clément militait aussi à Brest à la Confédération nationale du Travail (CNT), mouvement anarcho-syndicaliste.


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