Festivals annulés, événements repoussés, l'offre culturelle est à l'arrêt du fait de la crise sanitaire... Pour les intermittents du spectacle, l'été sera frugal... l'un d'entre-eux, Guillaume Fournier, considère qu'il faut sans doute transformer cette année noire en année blanche... explications !
C'est une figure de plusieurs festivals bretons, Art Rock et La Route du Rock notamment. En sa qualité de directeur technique, Guillaume Fournier, 41 ans, mesure la gravité de la crise sanitaire sans précédent qui pousse le monde de la culture à rendre les armes. Pour les intermittents du spectacle, le coup est plus que rude... Il plaide pour que l'année noire se transforme en année blanche pour préserver un statut qui sera sans doute mis à mal sans mesures d'accompagnement.
Quel est le constat aujourd'hui ?
"Je ne suis pas très optimiste... pour beaucoup d'intermittents, 90 % des 507 heures imposées (NDLR : nombre d'heures annuelles exigées pour prétendre au statut d'intermittent et s'ouvrir des droits spécifiques à l'assurance chômage) sont réalisées entre les mois de mars et de septembre. Autant dire que beaucoup sont sous la menace de perdre leur statut. Par ailleurs, il y a les annulations des grands rendez-vous et parfois des reports. J'ai bien peur que la profusion de rendez-vous repoussés en septembre et après ne rencontrent pas le public espéré. Et puis on peut s'attendre à une défiance de ce public... si le virus reste tapi dans l'ombre comme une menace potentielle, qui osera s'entasser dans une fosse de 1500 à 2000 personnes sans une réelle appréhension ?"
Quelles solutions d'urgence pour les intermittents ?
"La crise nous impacte tous, c'est évident... Les dégâts vont être considérables chez les prestataires qui travaillent au plus près des organisateurs d'événements. Mais concernant les intermittents, il est urgent de rassurer, d'assouplir un système qui risque de les condamner en l'état. La solution serait peut-être de transformer cette année noire en année blanche... considérer qu'elle n'a pas existé et reprendre l'année 2019 comme année de référence pour permettre à tout le monde de reprendre son souffle... inutile d'ajouter encore plus de monde à la catastrophe sociale qui se profile devant nous".
Et l'après... quelles perspectives ?
"On va devoir se réinventer... on le sent bien aujourd'hui les plus importants festivals comme les plus petits sont en danger. On peut s'attendre à un soutien moindre des collectivités pour accompagner les initiatives culturelles... il y aura d'autres urgences à traiter c'est évident. Mais je pense que la crise étant mondiale, rares sont ceux qui pourront tirer leur épingle du jeu... Il faudra reconstruire avec prudence sur plusieurs années en étant conscient que tout est très fragile. Les artistes payent déjà chèrement la note. C'est déjà difficile de se produire pour nombre d'entre eux... l'avenir pour beaucoup est aujourd'hui plus qu'incertain".