Près d'un mois après la décision de classement sans suite du parquet de Brest, Anticor a déposé plainte à Paris pour relancer l'enquête qui visait le chef de file des députés LREM Richard Ferrand. Une autre plainte, cette fois de l'association FRICC, est en préparation.
Cette plainte avec constitution de partie civile a été déposée mercredi auprès du doyen des juges d'instruction du pôle financier de Paris . Elle vise à obtenir la désignation - quasi-automatique - d'un magistrat pour enquêter sur l'affaire du bien immobilier acquis par la compagne de Richard Ferrand et loué ensuite aux Mutuelles de Bretagne, dont il était alors le directeur général.
Également révélée par France Inter, la plainte porte sur des faits présumés de "prise illégale d'intérêts", et recel et complicité de ce délit, a précisé l'avocat Jérôme Karsenti.
Le parquet de Brest avait annoncé le 13 octobre le classement de l'enquête, au regard notamment de la prescription de cette éventuelle infraction.
"Nous attendons l'ouverture d'une instruction, pour qu'il y ait un procès, car nous ne sommes pas d'accord avec l'analyse du procureur de la République de Brest", a déclaré à l'AFP Jean-Christophe Picard, président de l'association Anticor.
Après le classement sans suite, Anticor s'est donc tourné vers le pôle financier de Paris en raison de sa compétence nationale sur les affaires "d'une grande complexité".
Dans un des volets de l'affaire : un possible délit de prise illégale d'intérêts, le procureur de Brest, Jean-Philippe Récappé, reconnaissait que le parquet "aurait pu envisager l'ouverture d'une information judiciaire". Mais après vérification, "l'infraction éventuelle" était "prescrite" depuis le 19 juin 2015, aux termes des règles de prescription (3 ans) alors en vigueur.
Richard Ferrand, ex-PS et soutien de la première heure d'Emmanuel Macron, à qui cette affaire avait coûté sa place de ministre, s'est toujours défendu de tout conflit d'intérêts. Devenu ensuite chef du groupe La République en marche à l'Assemblée nationale, il s'était félicité de la décision du parquet de Brest, estimant avoir été "lavé de tout soupçon".
Une deuxième plainte en préparation
L’association FRICC (Front Républicain d'Intervention Contre la Corruption) envisage elle aussi de déposer plainte avec constitution de partie civile auprès du doyen des juges d'instruction du pôle financier de Paris, sur le même fondement qu’elle l’avait fait auprès du parquet de Brest, c'est-à-dire pour délit d'entrave aux fonctions de commissaire aux comptes.On veut aller au bout de l'affaire pour inculper ou disculper Ferrand. Jean-Luc Touly
Pour son président Jean-Luc Touly que nous avons contacté ce jour, le montage immobilier au bénéfice de la compagne de Richard Ferrand aurait dû impérativement être présenté au commissaire aux comptes des Mutuelles de Bretagne. Lequel aurait alors établi un rapport spécial pour les membres du Conseil d’Administration et rendu un avis sur le conflit d’intérêt.
Les membres du CA auraient alors dû suivre son avis. Le non-respect de cet article du Code de la Mutualité est un délit passible de 75000 euros d’amende et 5 ans de prison.
Pour l’heure, l’association FRICC qui n’a que deux ans d’existence et n’est pas encore reconnue d’utilité publique. Elle constitue donc son dossier méticuleusement en réunissant toutes les pièces nécessaires auprès d’une quinzaine de mutualistes qui souhaitent interagir.