Édouard Balladur a été mis en examen par la Cour de justice de la République (CJR) dans le volet ministériel de l'affaire Karachi, soupçonné d'avoir financé une partie de sa campagne présidentielle de 1995 grâce à des rétrocommissions sur des contrats d'armement.
Entendu lundi par la commission d'instruction de la CJR, l'ex-Premier ministre, 88 ans, a été mis en examen pour "complicité d'abus de biens sociaux et recel", a précisé à l'AFP, une source proche de l'enquête, confirmant une information du Canard enchaîné.
Dans un communiqué transmis à l'AFP, Édouard Balladur a annoncé avoir "demandé à ses avocats de contester cette décision devant la Cour de cassation". "La décision de la commission d'instruction ne tire aucune conséquence de la validation du compte de campagne par le Conseil constitutionnel en octobre 1995, non plus que de l'ancienneté des faits, vieux de vingt-trois ans", estime l'ancien rival de Jacques Chirac.
15 morts dans un attentat en 2002
Le 8 mai 2002, une voiture piégée précipitée contre un bus transportant 23 salariés de la Direction des chantiers navals (DCN) avait explosé à Karachi, tuant 15 personnes dont 11 employés français (dont deux Brestois) et en blessant douze autres. Tous travaillaient à la construction d'un des trois sous-marins Agosta vendus en 1994 au Pakistan par la France, sous le gouvernement d'Édouard Balladur.Enquête pointe le gouvernement de l'époque
L'enquête, qui privilégiait au départ la piste d'Al-Qaïda avant de s'en éloigner en 2009, a conduit à révéler l'affaire d'un financement occulte présumé dont aurait bénéficié l'ex-Premier ministre, alors candidat à la présidentielle de 1995.La CJR, seule instance habilitée à juger des délits commis par des membres du gouvernement dans l'exercice de leur fonction, avait été saisie en juin 2014 pour enquêter sur le rôle joué par Édouard Balladur et son ministre de la Défense à l'époque, François Léotard. Alors que leur défense avait tenté de faire jouer la prescription, la CJR leur avait donné tort en septembre, estimant que le délai de prescription n'avait pas démarré en 1995 mais en 2006, date à laquelle le procureur avait eu connaissance du rapport "Nautilus".