Ces Bretons ont choisi la contraception masculine pour redistribuer la charge mentale de la question au sein de leur couple. 66 ans après l'invention de la pilule pour femmes, où en est-on, côté hommes ?
Depuis un an et demi, Anton Ménard, 32 ans, utilise un contraceptif thermique. Il porte un anneau en silicone, tous les jours, pendant 15 heures. "Chaque matin, je le place autour du pénis et je fais remonter les testicules dans le corps, là où il fait trop chaud pour la reproduction de spermatozoïdes", raconte cet habitant de Saint-Brieuc.
Selon l'association GARCON (Groupe d’Action et de Recherche pour la Contraception), il serait l'un des 5 000 à 10 000 hommes ayant recours à la contraception thermique en France.
L'anneau contraceptif à porter au quotidien : "après 2 ou 3 jours, c'était bon"
C'est en échangeant avec ses amies féministes qu'Anton a été convaincu et qu'il a cherché des solutions pour assumer la contraception dans son couple. "Je trouve qu'elles supportent déjà beaucoup de choses en général", constate-t-il en parlant des femmes.
"Ma copine ne prend pas la pilule car elle ne veut pas avoir plus d'hormones dans son corps. Et cette méthode thermique est sans hormone. C'est vrai qu'au début, c'est un peu étrange de porter cet objet auquel on n'est pas habitué, mais après deux ou trois jours c'était bon, je le mets tous les jours sans réfléchir, je l'enlève le soir avant de dormir, c'est devenu une vraie habitude."
Mais depuis fin décembre 2021, Andro-switch, la petite entreprise française qui produit cet anneau souple et bio-compatible a interdiction de le vendre. L'agence nationale de la sécurité du médicament (ANSM) exige des essais coûteux avant la mise sur le marché pour obtenir un marquage "CE".
Le slip chauffant
Cette méthode thermique est aussi possible grâce à des slips chauffants imaginés par un médecin toulousain. Certains les fabriquent eux-mêmes, mais ils sont peu.
Moins de 1000 hommes utilisent cette méthode en France. Et elle n'est pas reconnu par l'Organisation mondiale de la santé (OMS), ni par le ministère de la Santé.
En Nouvelle-Zélande, la moitié des hommes de plus de 40 ans ont eu recours à la vasectomie
Car depuis toujours, la contraception est l'affaire des femmes. Il s'agissait même d'un symbole de la libération sexuelle, lorsqu'elle fut autorisée par les députés français... en 1967. Depuis, entre pilule, implant et stérilet... beaucoup de méthodes sont proposées aux femmes mais pas toutes sans effet sur leur santé.
Et pour les hommes ? Rien. A part la vasectomie, autorisée en France depuis 2001. Cette opération consiste à bloquer les canaux transportant les spermatozoïdes.
Et pour Benjamin Franckaert, médecin généraliste à Sizun (Finistère), ce n'est pas si évident d'y recourir en France : "je dois leur prescrire un rendez-vous avec un urologue. Une fois le spécialiste consulté, il faut attendre 4 mois avant de faire la vasectomie. Les spécialistes disent que trop de gens changent d'avis après l'opération alors qu'il y a un risque de stérilité et qu'il n'est pas toujours facile de revenir en arrière. C'est une question sociétale. C'est très banal dans d'autres pays."
Moins d'1% des hommes pratiquent la vasectomie en France, contre 15 à 20% au Royaume uni et aux Pays-Bas, où cette opération est faisable par un médecin généraliste. En Nouvelle-Zélande, près de la moitié des hommes de plus de 40 ans ont fait une vasectomie.
Mais que fait la recherche ?
Maxime Touzé, militant de l'Union démocratique bretonne, souhaite ouvrir le débat sur la contraception masculine : "il n'y a pas de recherche financée. Les labos et les entreprises ne sont pas intéressés, ni l'Etat qui ne promeut pas du tout la contraception masculine"...Pas de marché pharmaceutique car pas de demande ?
Pour l'urologue Antoine Faix, qui a témoigné auprès de Franceinfo, "en termes de recherche, nous avons cinquante ans de retard, la société est plus avancée que le monde scientifique sur le sujet de la contraception masculine. La recherche est de plus en plus difficile quand les enjeux ne relèvent pas de la santé publique. D'autre part, les standards de sécurité sont bien supérieurs à ceux des années 1970."
Vers un gel contraceptif ?
A ce stade, les recherches concernant la pilule masculine ne rencontrent toujours pas de succès. L'une des pistes les plus avancées concerne le Vasalgel : un gel sans hormone, injecté dans les canaux déférents, qui pourrait apporter à l'avenir une solution, potentiellement réversible, aux hommes désireux d'éviter la vasectomie. Parsemus, la fondation américaine à l'origine du projet poursuit encore ses recherches.
C'est important de répartir plus équitablement la charge mentale liée à cette question
Pour le militant, le combat ne fait que commencer : "C'est comme si les hommes n'étaient pas concernés alors qu'on connait aujourd'hui des méthodes. C'est important de répartir plus équitablement la charge mentale liée à cette question".
Ce sujet participe à la lutte pour l'égalité femmes-hommes, les discussions s'ouvrent au sein des couples et entre amis, mais aussi dans le débat public.
! Attention ! Seuls les préservatifs protègent contre le VIH et les infections sexuellement transmissibles.