À Brest (29), des salariés de la société Kéolis vont reconduire les grèves les 7, 11 et 14 janvier. Ils jugent inéquitable le fait que la direction ait revalorisé le salaire de seulement huit salariés. Ils demandent également la suppression d'un boîtier que la direction veut installer dans ses bus.
C'est un conflit social qui commence à durer. Cela fait trois samedis que certains salariés de la société de transports brestoise Kéolis sont en grève, mouvement initié par la CFDT, largement majoritaire dans cette entreprise. Ce samedi, ils ont même décidé de reconduire le débrayage les 7, 11 et 14 janvier.
Ces dates n'ont pas été choisies au hasard. Le samedi 7 marque la journée d'inauguration de la médiathèque aux Capucins, en présence de François Hollande. Le débrayage sera de 59 minutes, tout comme le mercredi 11, date du début des soldes d'hiver. Le samedi 14 marque quant à lui le premier jour des soldes. Ce jour-là, en revanche, les salariés cesseront toute activité.
Revalorisation des salaires
Principal point d'achoppement entre les salariés et la direction : la revalorisation des salaires. Il y a quelques semaines, lorsque le téléphérique est arrivé, les salaires des 18 régulateurs, chargés du pilotage à distance des bus et des trams, ont été revalorisés. "Ce n'est pas la culture de notre entreprise", fustige Luc Daniel, délégué CFDT à Bibus, pour qui "il aurait fallu une augmentation pour l'ensemble du personnel."Jean-Luc Bouhadana, directeur de Bibus-Kéolis, voit cette revalorisation d'un autre œil. Les salariés qui ont été augmentés avaient la charge du pilotage des bus et des tramways et se sont vu, avec l'arrivée du téléphérique, attribuer une responsabilité supplémentaire. "Ce qui aurait été inéquitable, ça aurait été de ne pas revaloriser leurs salaires alors qu'on leur donne du travail en plus", constate-t-il.
Pas de revalorisation pour tous
Revaloriser les salaires de l'ensemble du personnel ? Pas question. "Si je disais oui à la CFDT, cela coûterait à l'entreprise 750 000 euros par an de manière récurrente, ce qui est impossible", affirme M. Bouhadana. "D'autant que le travail des conducteurs de bus et de tram n'est pas affecté par la mise en place du téléphérique", poursuit-il.Le directeur affirme par ailleurs que chaque année, les salaires sont revalorisés dans le cadre des négociations annuelles obligatoires (NAO). Ce sera le cas le 24 février prochain. Mais cette hausse sera faible (de 0,6 % à 0,7 % selon le directeur), alors que la revalorisation salariale des régulateurs représente environ 3 %. "Je comprends bien, admet M. Bouhadana, mais il faut que l'entreprise soit capable de l'absorber".
Les salariés fustigent également la manière dont a été prise cette décision. "C'est le fait du prince", se plaint Luc Daniel, de la CFDT. "Quand il y a augmentation, il y a normalement discussion avec les partenaires sociaux", affirme-t-il en fustigeant les méthodes de cette nouvelle direction arrivée il y a un peu plus d'un an.
Outil de "surveillance"
Autre pomme de discorde : la direction souhaite installer un nouveau boîtier, "Komfort", dans les bus, ce qui n'est pas au goût des conducteurs. L'objectif de cet outil est d'analyser leur conduite. "Le confort des passagers est l'une de nos trois priorités", justifie Jean-Luc Bouhadana.Les données obtenues sont ensuite consultables par le conducteur lui-même... et par son manager. "C'est un boîtier de surveillance", s'alarme Luc Daniel de la CFDT qui dénonce une "surcharge mentale supplémentaire. On doit déjà regarder la route et le compteur", se plaint-il. M. Bouhadana s'est dit "ouvert aux négociations" à ce sujet.
Les boîtiers de ce type, les salariés connaissent déjà : un outil semblable est installé dans les bus depuis plusieurs années. Mais au-delà de l'appareil-même, le délégué syndical s'inquiète de l'"esprit Komfort" qui s'est installé au sein de l'entreprise depuis peu. Selon lui, depuis quelque temps, les données des boîtiers déjà en place sont utilisées contre les salariés. "Certains collègues ont reçu des avertissements car ils avaient trois minutes d'avance sur leur parcours", confie M. Daniel qui tient à préciser qu'"une alerte sur les risques psychosociaux a été émise par le médecin du travail en juillet dernier".
Dans les prochaines semaines s'ouvrira le marché de délégation de service public pour les transports en commun brestois. Pour cette attribution, plutôt "difficile", Luc Damien a bien conscience que l'image de l'entreprise doit être irréprochable. "Mais cela ne doit pas se faire sur le dos des salariés", précise-t-il.