L'ARS Bretagne a fait le choix de renouveler la suspension des accouchements à la maternité de Guingamp pour 6 mois supplémentaires. Des citoyens et des élus ne décolèrent pas de cette situation qui entraîne un risque pour les futures mamans et qui fragilise un territoire déjà défavorisé.
La maternité de Guingamp ne permettra pas aux futures mamans d'accoucher à l’hôpital, jusqu’au 30 avril 2024. Ce renouvellement de la suspension des accouchements a été annoncé par un communiqué officiel de l’agence régionale de Santé de Bretagne datant du 23 octobre 2023.
Pas assez de médecins
La raison invoquée par l’ARS Bretagne pour reconduire cette suspension, qui était active jusqu’au 31 octobre, est liée au manque de personnels.
“Il nous manque au moins deux gynécologues-obstréticiens et quatre sages-femmes pour avoir l’effectif suffisant pour permettre aux accouchements d’avoir lieu à l’hôpital, confirme Claudine Guilou, vice-présidente à l’agglomération de Guingamp-Paimpol. Quand la directrice de l’ARS Bretagne m’a annoncé le prolongement de la fermeture, j’ai accusé le coup… C’est vraiment une grande déception”.
Une déception d'autant plus grande, que trois sages-femmes étaient prêtes à venir travailler à l'hôpital de Guingamp si la maternité ouvrait. "Ces sages-femmes vont aller ailleurs..." déplore Claudine Guillou.
Un risque évident pour les futures mamans
Pour l’élue à Guingamp-Paimpol Agglomération en charge de la santé, l’angoisse est forte en pensant aux femmes qui vont devoir prendre la route vers la maternité de Saint-Brieuc. “Certaines communes sont à 45 minutes de route, d’autres à 1 heure, le risque est évident.”
Cette suspension renouvelée est très mal vécue par l’élue. Un territoire sans hôpital de plein exercice perd en attractivité. “Nous avons besoin de familles, d’attirer des futurs parents sur le territoire de Guingamp pour le développement de l’agglomération, certifie Claudine Guillou. La suspension de la maternité peut être rédhibitoire pour certaines familles dans le choix de s’installer. Le territoire de Guingamp est déjà fléché comme étant en situation défavorable. Cette restriction supplémentaire continue de fragiliser la situation” regrette l’élue de l’agglomération.
Lors de l’annonce du renouvellement de la suspension, la directrice de l’ARS Bretagne a indiqué une légère hausse du nombre d’interne pour l’hôpital. Si l’élue à l’agglomération tente de positiver, pour d’autres la colère est froide.
Une suspension qui cache la fermeture ?
“L’ARS n’assume pas. Renouveler une suspension, c’est juste une formule polie pour ne pas dire fermeture définitive de la maternité" s’étrangle Yann-Fañch Durand. Pour le coprésident du comité de défense de l’hôpital de Guingamp, “l’ARS s’est offert un test grandeur nature d’un hôpital sans possibilité d’accouchement depuis le mois d’avril dernier et les familles servent de cobaye”.
“Il y a un glissement des tâches qui est dangereux” renchérit ce Guingampais. “Les services de secours prennent le relais pour des prises en charge qui auraient dû se passer à la maternité. Des femmes accouchent sur des parkings, dans des garages. Les pompiers sont sollicités et ne sont plus disponibles pour d’autres urgences”.
Pour les membres du comité de défense de l’hôpital et pour leurs soutiens, le sentiment d’être des “citoyens de seconde zone” est lourd. “Pour l’ARS, un bon hôpital, c’est un hôpital qui fait du chiffre, tempête Yann-Fañch Durand. On coupe les ailes aux petits hôpitaux. Depuis la loi Rist, les médecins intérimaires ne veulent plus venir dans les hôpitaux de campagne et cela devient dramatique.”
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Sans maternité à Guingamp, les futures mamans du territoire guingampais devraient se rendre soit à Saint-Brieuc ou à Lannion pour accoucher. Soit effectuer un déplacement d'une demi-heure en moyenne.
Cette décision rentre dans la logique du projet médico-soignant partagé du groupement hospitalier d'Amor, à savoir la refonte des soins dans les hôpitaux de Saint-Brieuc, Guingamp, Lannion, Paimpol, Quintin, Lamballe et Tréguier.
La maternité devrait se transformer en centre périnatal de proximité "tout en préservant la qualité et la sécurité des soins" selon le document.
L'ARS, dans son communiqué, précise que les autres activités continuent de fonctionner normalement comme les échographies, suivis de grossesse et préparations à la naissance.