Dans une décision rendue ce mardi 18 juillet 2023, le tribunal administratif de Rennes a fixé un délai de quatre mois supplémentaires à l'État pour renforcer la lutte contre les algues vertes en Bretagne. C'est la première fois que l'État se voit imposer un délai contraint dans ce combat contre ce fléau qui empoisonne les plages bretonnes depuis des décennies.
Au moment où le film "Les Algues vertes" sort sur les écrans de cinéma et alors que des mesures d’hydrogène sulfuré [gaz dangereux dégagé par les algues vertes en putréfaction, NDLR] sur une plage à Hillion dépassent à nouveau les seuils et que des plages se voient envahies par un tapis d'algues vertes, le tribunal administratif de Rennes annonce, ce mardi 18 juillet 2023 dans un communiqué intitulé "L'État peut encore mieux faire", un délai contraint de quatre mois pour accentuer les mesures de lutte contre les algues vertes.
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"Le tribunal a enjoint au représentant de l’État d’agir par l’édiction de prescriptions particulières applicables sans délai aux exploitations agricoles, propres à garantir le respect de plafonds d’apport d’azote adaptés aux capacités d’absorption des cultures conformes aux préconisations scientifiques et permettant une réduction effective du phénomène d’eutrophisation à l’origine du développement des algues vertes" peut-on lire dans un communiqué du tribunal administratif.
"Mesures insuffisantes"
La justice décide d'attribuer quatre mois supplémentaires à l'État pour compléter le PAR 6 ou 6e programme régional de lutte contre la pollution aux algues vertes.
Le tribunal estime insuffisantes, bien qu’allant dans le bon sens, les mesures prises et demande dans sa décision "l’adoption de mesures d’application immédiate, contrôlées dans leur exécution, de limitation de la fertilisation azotée et de gestion adaptée des terres agricoles".
Satisfaction d'Eau et Rivières de Bretagne
Pour l'association Eau et Rivières de Bretagne, qui avait saisi le tribunal, "c'est un signal important envoyé ce jour par le tribunal administratif". L'État va devoir "passer à la vitesse supérieure" se réjouit l'association.
Les actions de lutte contre les marées vertes portées par les pouvoirs publics depuis plus de 10 ans, et basées sur le volontariat des exploitations agricoles, bien qu'elles mobilisent d'importants fonds publics, ont montré leurs limites. Elles sont nécessaires, mais pas suffisantes.
Eau et Rivières de Bretagnecommuniqué du 18 juillet 2023
L'association relève que "les effectifs des services de l’État disponibles" pour faire appliquer la réglementation et les contrôles nécessaires "marquent une baisse régulière depuis des années".
"Notre association a estimé que les dernières propositions des pouvoirs publics n’apportent pas la garantie d’une trajectoire nous permettant d’envisager une sortie des marées vertes, à un horizon raisonnable" affirme Francis Nativel, le nouveau président de l'association environnementale.
Présentes naturellement dans la mer, les algues vertes deviennent un problème quand elles prolifèrent sous l'effet des flux d'azote provenant très majoritairement de l'agriculture et déversés dans la mer par les rivières qui s'y jettent.
Lorsqu'elles s’échouent sur les plages et se décomposent, un gaz, l’hydrogène sulfuré, se forme. Il peut se révéler dangereux.
"L'Etat prend acte du jugement"
Dans un communiqué, la préfecture de Région dit "prendre acte de ce jugement" et ajoute que "l'État va apporter les réponses nécessaires, tout en poursuivant son action de lutte contre les algues vertes, à travers les différents dispositifs existants".
Elle rappelle qu'en plus du volet réglementaire "récemment renforcé" dans les huit 'baies lagues vertes' bretonnes, "des leviers financiers ont été activés au travers du plan régional de lutte contre les algues vertes, dont les financeurs (État, Région, agence de l’eau Loire Bretagne, Départements des Côtes d’Armor et du Finistère, collectivités locales concernées, chambre d’agriculture, agence régionale de santé) ont doublé leur contribution pour la période 2022-2027 avec un montant de 130 millions d’euros".
La préfecture régionale annonce que "les services de l'État examinent les conditions d'un éventuel appel" de ce jugement du tribunal admnistratif.