Le tribunal administratif de Rennes s'est penché, ce mercredi 11 septembre 2024, sur la situation de deux habitants des Côtes-d'Armor en attente depuis plusieurs mois d'un logement social alors que leur situation a été reconnue "prioritaire" par les services de la préfecture.
La situation de dix bénéficiaires de logements sociaux aurait normalement dû être examinée ce mercredi : tous ont en commun d'avoir été reconnus "prioritaires" par la commission de médiation du département. En vertu de la loi sur le DALO (Droit au Logement Opposable), ils doivent en théorie être "logés d'urgence" par le préfet.
Faute de s'être vu attribuer des logements sociaux, les intéressés avaient donc saisi le tribunal administratif de Rennes pour forcer la préfecture à mettre à "exécution" ces décisions prises entre décembre 2023 et avril 2024 par la commission et ainsi bénéficier de logements répondant à "leurs besoins et (...) capacités".
"Lorsqu'une personne a été reconnue comme (...) devant être (...) relogée d'urgence (...), la carence fautive de l'État à exécuter cette décision dans le délai imparti engage sa responsabilité", avait ainsi rappelé le tribunal administratif de Paris dans une décision concernant une famille "prioritaire" en attente depuis "quatorze ans".
Menacée d'expulsion
Finalement, seuls deux dossiers ont été évoqués ce mercredi devant le tribunal administratif de Rennes : d'autres, comme celui d'un habitant de La Roche-Jaudy, ont été renvoyés pour laisser le temps aux protagonistes de "répondre" aux écritures adverses. Leurs recours seront donc examinés dans les semaines à venir.
Une habitante de Saint-Quay-Perros avait toutefois fait le déplacement à Rennes ce mercredi. "En ce moment, j'ai du mal", a-t-elle expliqué au juge : "à la recherche d'un emploi", la jeune femme a accumulé les loyers impayés après être tombée "gravement malade" en 2023 et avoir subi "une longue période de dépression". Sa situation a d'ailleurs été reconnue prioritaire le 23 février 2024 car elle était "menacée d'expulsion".
La requérante avait donc "pris une avocate" pour pouvoir rester dans son logement. Son propriétaire est lui aussi intervenu pour qu'elle puisse rester "jusqu'au 5 avril 2024" : par "miracle", un héritage familial lui a permis de "payer tous les loyers impayés". Elle est donc désormais "à jour" de paiements, mais sa situation reste précaire.
Une mère et sa fille originaires de la région de Lamballe avaient elles aussi fait le déplacement à Rennes pour venir appuyer la demande de leur fils et frère "handicapé". Alors qu'elles avaient fait une demande en "août 2022", le préfet des Côtes-d'Armor avait classé le jeune homme le 5 avril 2024 parmi ses dossiers "prioritaires".
Une "problématique" qui se ressent "particulièrement" dans les Côtes-d'Armor
Mais sa sœur reste convaincue qu'il subit "une situation de discrimination par rapport à son handicap". "Un logement lui a été attribué, il était en première position mais il lui a finalement été refusé à cause de son état de santé", a-t-elle certifié. "Ce n'est pas ce qui ressort du dossier", a toutefois objecté le président du tribunal.
Le mari et père des requérantes souffre aussi d'un cancer, ont-elles fait valoir : alors qu'il est actuellement "en traitement de chimiothérapie", le couple parental a pris "un logement plus petit".
"On nous envoie des documents indiquant qu'il y a un problème de relogement en Bretagne, on nous dit de le réorienter vers une structure médicale, mais ils ne sont pas médecins", s'exaspère sa fille, qui prend en charge toutes les démarches administratives de la famille depuis Rennes. Alors qu'on lui avait annoncé "seize mois de délai" pour obtenir un logement social, "ça fait déjà deux ans" qu'elle attend.
Le président du tribunal administratif de Rennes lui a confirmé que la situation des Côtes-d'Armor était préoccupante. "C'est une problématique qu'on a particulièrement dans ce département", a-t-il expliqué.
Le magistrat, qui a mis ses décisions en délibéré, rendra pour sa part ses ordonnances sous un mois. En cas d'inaction, l'État pourrait être condamné à payer des sommes d'argent si une "faute de nature à engager sa responsabilité" était retenue.
SG/CB (PressPepper)