Ce mardi 23 janvier, une centaine de personnes s’est rassemblée devant la mairie de Plouisy (Côtes d’Armor) où se tenait une réunion publique. Le mécontentement monte dans cette commune de 2000 habitants qui est la seule dans l’ouest de la France à être volontaire pour expérimenter « la tenue unique » à l’école. Ce mercredi, le maire a abandonné l'idée d'une expérimentation dans la commune.
"Non aux uniformes ! Non aux uniformes". Devant les fenêtres de la mairie de Plouisy, les élèves de la petite école publique de Plouisy agitent avec malice leurs pancartes. Derrière eux, une centaine de personnes ; enseignants, élus, mouvements syndicaux et politiques de gauche, et bien sûr leurs parents en colère.
Premier motif de la grogne, la méthode du maire Rémy Guillou, référent sur le territoire du parti d’Emmanuel Macron. Il a accepté, sans concertation, que la commune participe à l’expérimentation de la tenue unique lancée par le gouvernement il y a quelques semaines. C’est le seul établissement scolaire dans l’ouest de la France parmi les 100 écoles retenues. Les parents d’élèves ont découvert cette décision dans la presse.
"Jamais la question n’a été soumise aux principaux intéressés : les enfants", s’agace Maxime Calvez, porte-parole du collectif des parents d’élèves. "L’équipe enseignante a dit non, mais, dans son dos, il y a eu un accord à cette expérimentation qui a été donné. C’est assez grave dans un état démocratique et d’autant plus à l’échelle locale !".
« On a l’impression que c’est l’armée »
Pourquoi ici ? C’est la question que se posent les parents d’élèves. Alice, maman d’une petite fille de CM1, souligne qu’il n’y a pas de faits de harcèlement liés aux vêtements dans cette école. Pour elle, porter l’uniforme c’est une atteinte à la liberté individuelle : "Ma fille dit qu’elle a envie d’être libre de porter un pantalon, une jupe, un short... si elle en a envie. A cet âge, les enfants se cherchent, affirment des choix...et là, ils seront tous pareils, on a l’impression que c’est l’armée !"
Cette expérimentation va à contrecourant des valeurs de l’école de la République : "Egalité, Liberté, Fraternité". Ce n’est pas écrit "Uniformité" sur les frontons des écoles.
Maxime Calvez, porte-parole du collectif des parents d'élèves de Plouisy
Pour les parents, comme pour les élus et les syndicats de gauche rassemblés devant la mairie, porter un uniforme ne résoudra pas les inégalités sociales. La députée LFI Muriel Lepvraud ironise sur l’objectif de cette expérimentation. "Les inégalités, il ne faut pas les masquer mais les montrer. On voit bien qu’avec Emmanuel Macron les inégalités se creusent, les pauvres s’appauvrissent et les riches s’enrichissent. Il est hors de question de masquer tout ça, sinon nous allons tous devoir porter un uniforme".
Décision dans quelques semaines
Les élus de l’opposition, comme les parents d’élèves, rappellent le coût de cette expérimentation. 32 000 euros dont la moitié à la charge de la commune. Selon eux, c’est un non-sens alors que l’école de Plouisy a besoin d’argent. Les enseignants ne sont pas toujours remplacés, il manque des Atsem (agent territorial spécialisé des écoles maternelles), et il y a des travaux de rénovation à effectuer.
"Le débat sur l’uniforme, c’est un leurre", poursuit la députée LFI de la circonscription, "expérimentons plutôt l’augmentation du salaire des enseignants". "Il faut éteindre l’incendie tout de suite" renchérit Bérenger Le Négaret, représentant des parents d'élèves de l'école, alors que le chef de l’Etat a annoncé la généralisation de ce dispositif en 2026 si l’expérimentation est concluante.
Le maire de Plouisy reste persuadé que cette expérimentation est intéressante mais devant le mécontentement général et la tournure politique que prend la situation, il a décidé ce jeudi de se retirer de l'expérimentation.
Il avait déjà annoncé convoquer un conseil d’école extraordinaire dans quelques semaines, indiquant qu'il se plierait à la décision de ses administrés.