"Nous demandons à bénéficier des soins du docteur quelque soit son statut vaccinal. Nous demandons son maintien en activité et celui des autres médecins dans la même situation". Dans les Côtes d’Armor, la contestation s’organise après la suspension d’un médecin à cause de son refus de vaccin.
"Je m’extrais totalement du débat provax ou antivax, prévient d’emblée David Boixière, le maire de Pleudihen-sur-Rance. Un médecin qui ne souhaite pas se faire vacciner, c’est son choix, sa décision. Moi, ma posture de maire, c’est de m’inquiéter de ce qui va se passer demain. Et on a un vrai problème de santé publique et de désertification médicale."
Dans la commune des Côtes d’Armor de près de 3 000 habitants, une maison de santé a vu le jour. Elle a compté jusqu’à cinq médecins. La semaine dernière, il ne lui en restait plus que trois et les voilà désormais réduits à deux !
Car Françoise Van Dien ne souhaite pas se faire vacciner.
J’ai 40 ans d’exercice de la médecine, justifie-t-elle, j’en ai vu des épidémies. La situation actuelle ne justifie pas de semer la terreur dans la population. Un problème aussi complexe que la crise de la Covid-19 ne peut pas être réglé par le seul moyen du vaccin."
Le 15 octobre, comme 644 professionnels de santé libéraux en Bretagne, elle a été obligée de suspendre son activité.
"C’est très violent d’être empêchée d’exercer témoigne-t-elle. Ce n’est pas un métier comme les autres, on est là pour les autres. Là, j’avance à vue, je ne sais pas quand je pourrai recommencer à soigner."
Les élus mobilisés
Les maires des quatre communes concernées, Pleudihen-sur-Rance, Saint-Hélen, La Vicomté et Lanvallay, concernés par son départ forcé ont écrit conjointement à l’Agence Régionale de Santé. "Nous avons aujourd’hui 1 500 patients qui n’ont plus de médecin attitré, et nous nous retrouvons dans un bassin de population de 15 000 habitants avec trois généralistes, ce n’est pas possible" martèle David Boixière. "Comment gérer la santé des 1 583 patients du Dr Van Dien, la centaine de consultations qu’elle assume hebdomadairement dont la dizaine de visites pour des personnes hospitalisées à domicile ou dépendantes."
"Ici, nous avons un Ehpad, des personnes âgées qui vivent chez elles, il faut répondre à tous leurs soucis de santé qui peuvent survenir au quotidien, parfois même à des détresses" s’inquiète l’élu.
La question des déserts médicaux
"Ce que je ne comprends pas, c’est que le respect de la loi et la sanction qui du coup doit être déclenchée sont devenus plus importants que le problème de santé globale" s’étonne Bruno Ricard, maire de Lanvallay.
L’agence régionale de santé n’a pas anticipé, ni cherché de solutions. Elle aurait pu recruter des remplaçants pour les zones où des médecins étaient suspendus, mais non ! Les élus de terrain sont laissés seuls et livrés à eux-mêmes.
"On va se reporter sur des urgences hospitalières qui sont déjà en tension " s’alarme David Boixière." Mon devoir de maire c’est d’alerter les autorités compétentes."
"Dans cette histoire, l’ARS a une posture d’autoritarisme sans remise en question, aucun pouvoir contradictoire. On est à la limite de l’abus de pouvoir" s’énerve le médecin. Il faut quand même se rappeler que l’ARS a prouvé son inefficacité au début de la crise. On n’avait rien. Moi, j’ai continué à travailler tous les jours. Une entreprise de l’agroalimentaire m’a prêté des blouses, des patientes m’avaient cousu des masques."
Le soutien des patients
Blandine, une des patientes du docteur Van Dien a lancé une pétition en ligne. En quelques jours, elle a rassemblé près de 3 500 signatures.
"Nous déplorons le caractère excessif de l'obligation vaccinale envers des personnes que l'on a applaudies en 2020 et qui se retrouvent froidement rejetées aujourd'hui." "Depuis 15 ans, le docteur Van Dien soigne toute notre petite famille témoigne Blandine, on a toute confiance en elle."
C’est horrible de la rejeter maintenant alors qu’elle a été là pendant toute la pandémie.
Toutes deux sont inquiètes, car elles ont cherché un autre praticien. "J’ai passé plein de coups de téléphone raconte Blandine, ils ne prennent pas de nouveaux patients, on fait comment ?"
"Dans les Côtes d’Armor, poursuit-elle, on parle de 75 soignants suspendus, si ils ont chacun un millier de clients, cela fait 75 000 personnes sans soin !" "Nous demandons le maintien en activité du Dr Van Dien et de tous les autres médecins dans la même situation."
"Cette pétition, ça me porte répond Françoise Van Dien, les signatures de mes patients au bas de la lettre, ça m’aide à me lever le matin. Car ce sont eux qui sont pris en otage, ce sont eux qui vont faire les frais de cette situation. Mais je me sens droite dans mes bottes, je ne lâcherai pas. "
Samedi 23 octobre, une manifestation de soutien "à l’ensemble des soignants suspendus et de solidarité envers l’ensemble des soignants quelque soit leur choix" aura lieu à Dinan à 14h30.
Françoise Van Dien y sera. "Au moins, termine-t elle, on aura été au bout de ce qu’on peut faire."