Maintes fois reporté, le Brexit sera effectif le 1er janvier 2021. Les Britanniques vont rompre leurs liens avec l'Union Européenne et sortir de son marché intérieur. De nouvelles modalités d'échanges vont être instaurées. Les entreprises bretonnes se sont préparées mais le contexte reste incertain
Soulagement pour l'entreprise bretonne Sojasun/Triballat de Chateaubourg (Ille-et-Vilaine) : alors que la France vient d'interdire temporairement toute traversée à destination du Royaume-Uni pour cause de mutation du virus de la Covid-19, elle a pu in extremis trouver un chauffeur anglais pour livrer sa cargaison de produits frais et passer entre les mailles du filet. Pour autant, ses lignes de production réservées à ce marché à l'export sont désormais à l'arrêt, dans l'attente de l'évolution de la situation. Un dernier rebondissement en date dans un contexte qui s'annonce délicat pour l'année 2021 et l'application de la sortie du pays de l'Union Européenne.
En cas de no deal : les taxes vont bondir !
A la tête de cette société spécialisée dans les desserts végétaux à base de soja mais aussi dans les fromages (marques Petit Billy, Petit Breton, Merzer), Olivier Clanchin a positionné ses marques Outre-Manche dans des gammes bio en nom propre ou en marques distributeurs pour la grande surface. Aujourd'hui, ce marché représente la moitié de ses ventes à l'exportation. Pour anticiper le Brexit, il a embauché un salarié expert car il faut anticiper les changements administratifs, les contrôles douaniers et les taxes qui vont s'appliquer sur la production de ses usines.
Si le no deal est vraiment instauré, nos produits végétaux au soja pourraient subir une hausse de taxe de 8 % . Sur nos fromages, cela pourrait monter à 40 %! Il y aura une répercussion sur les prix qui pourrait freiner le consommateur. On sera peut-être contraint de revoir nos gammes et nos circuits de distribution.
Le patron ne cache pas une certaine anxiété face aux changements qui s'amorcent car le flou persiste. Même si le gouvernement britannique a mis en place des structures pour accompagner les chefs d'entreprises de chaque coté du Channel, tout ne semble pas prêt pour le Jour J, notamment pour la logistique et la circulation des transporteurs.
Le gouvernement britannique n'a pas fini de construire les nouveaux parkings d'attente au niveau des ports pour permettre les contrôles à l'arrivée. La question est de savoir aussi s'il y aura assez de personnel pour effectuer les contrôles douaniers et d'identité de chaque chauffeur, sans bloquer trop longtemps les camions et permettre un flux rapide des livraisons.
La solution : une succursale et une plateforme logistique en nom propre !
À Cesson-Sévigné (Ille-et-Vilaine) près de Rennes, une autre petite société bretonne s'est fait une niche dans le secteur médical à destination cette fois-ci des hôpitaux britanniques.
Askorn, spécialisé dans les prothèses et instruments chirugicaux assure 20 % de son chiffre d'affaires à l'export via ces échanges commerciaux. Pour garder ses parts de marché, son patron Denis Pichon a tout fait pour alléger les démarches et les contraintes pour sa clientèle en cas de no-deal, grâce à la création d'une nouvelle entité.
On a choisi de créer une succursale en Grande-Bretagne pour faciliter la vie de nos clients : cela leur permet de passer leurs commandes à une société anglaise avec moins de paperasserie et de régler directement en livre Sterling.
Pas de hausse de taxes en vue en revanche pour les produits d'Askorn : le matériel médical étant par convention exclu, pour des raisons de santé publique.
Quant à la logistique, là aussi, l'entreprise a innové avec la création de sa propre base de stockage et d'expédition sur le territoire britannique. "Autrefois, il fallait de nombreuses rotations pour fournir nos clients avec des petits volumes à chaque fois. Désormais, nous ne faisons que 4 à 5 transits par an, sans recours à des transitaires, c'est plus sûr et plus pratique !" explique le dirigeant.
Trois données sur le commerce entre la Bretagne et le Royaume-Uni (Source Bretagne Commerce International)
Le Royaume-Uni est le quatrième pays vers lequel la Bretagne exporte le plus (7,7%).
La Bretagne y exporte majoritairement des produits agricoles et agroalimentaires et des pièces pour l'industrie.
Environ 500 entreprises bretonnes ont un flux régulier d'affaires import/export avec le Royaume-Uni.