"L’école de la République est un espace de dialogue", le président du Conseil régional du culte musulman de Bretagne

Après l’assassinat de Samuel Paty, professeur d'histoire-géographie à Conflans-Sainte-Honorine, ce vendredi 16 octobre, Mohamed Iqbal Zaïdouni, président du Conseil régional du culte musulman de Bretagne, prône de soutenir l'éducation et le dialogue, seuls remparts contre l'obscurantisme.

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Quand il est intervenu ce weekend dans le journal télévisé de France 3 Bretagne, les mots lui manquait presque devant tant de violence. Mohamed Iqbal Zaïdouni, le président Conseil régional du culte musulman de Bretagne, revient avec un peu de recul sur l'assassinat de Samuel Paty.


"Rien ne peut justifier d’avoir assassiné ce professeur"


Ses premiers mots vont à la mémoire du professeur assassiné. Mohamed Iqbal Zaïdouni est lui même professeur de mathématiques et le considère comme un collègue. Il condamne aussitôt cet acte: "Nous musulmans, ici, en France et beaucoup d’autres musulmans dans le monde, nous dénonçons ce qui s’est passé. Rien ne peut justifier d’avoir assassiné ce professeur et rien ne justifiera jamais un tel acte barbare".

"Je ne sais pas exactement comment s’est passé ce cours du professeur Samuel Paty. Mais la liberté d’expression s’impose dans l'éducation, c’est notre droit et notre poumon de respiration. Si à chaque fois qu’on n’est pas d’accord, on va tuer son prochain, je crains pour mes enfants, non pas à cause de ceux qui nous en veulent mais parce qu’on réduit la sphère du dialogue et qu’on perd l’esprit critique

Ce professeur assassiné, d’après de nombreuses déclarations, était une personne toujours animée des meilleures intentions pour former les jeunes. C’est ce qui nous anime tous, nous les professeurs. L’école de la République est un espace de dialogue et tout à la fois de respect mutuel. Je demande un sursaut de la République. Il faut protéger les enseignants parce que l’école de la République, c’est notre école à tous et toutes".


"Cet acte inhumain ne relève en rien de l’islam"


"Quand on connaît l’éthique du prophète de l’islam, on voit rapidement que cet acte inhumain ne relève en rien de l’islam. Aucune religion ne peut justifier un meurtre. Maintenant, nous sommes tous endeuillés et nous musulmans sommes doublement frustrés : la victime est morte, l’assassin est mort. Nous, concitoyens français, allons payer les pots cassés; en particuliers les citoyens musulmans parce qu’on va traîner ce fardeau toute notre vie parce qu'il a prétendu tuer au nom des musulmans. Mais je pose la question : parce qu'il a dit « allahou Akbar », ça y est, c’est musulman? Non! Cette personne ne relève pas de l’islam. Ce n’est pas comme ça qu’on règle les problèmes, pas comme ça qu’on peut avancer".


"J’ai entendu des propos blessants"


"Je fais aussi appel à toute la communauté nationale parce que la liste des épreuves par lesquelles nous sommes passés s’allonge depuis les attentats de Paris et d’autres commandités à Nice ou ailleurs. On est en train d’attaquer la France parce qu’elle est engagée pour ses valeurs et engagée pour lutter contre toute forme de radicalisme et de terrorisme.

Ces fléaux rongent notre esprit et rongent nos libertés. C’est un mal qui change de méthode, qui fait des mutations comme un virus. Là, il essaie de nous attaquer de l’intérieur. On essaye de semer le doute et la zizanie et de séparer la communauté musulmane de la communauté nationale. À chacun de nous qui sommes avertis d’être clairvoyant et d’être juste dans nos propos, parce que j’ai entendu des propos blessants".

 

"Ils n’ont aucune éducation spirituelle, culturelle, ni cultuelle"


"La communauté musulmane, ni les mosquées, n’y sont pour rien dans cette affaire. Imams, prédicateurs, parents musulmans, sont tous inquiets et attristés. Je n’ai pas rencontré une seule personne qui se réjouisse de ce qui s’est produit. Je ne voudrais pas faire un communiqué à chaque fois qu’un de ces fous tue au nom de Dieu alors que je suis sûr qu’aucun de ces malades n’est jamais passé par la case de la mosquée : ils ne sont pas pratiquants, ils ne sont pas croyants. Ils n’ont aucune éducation spirituelle, culturelle, ni cultuelle. Rien du tout, ce sont des voyous!"
 

"Aujourd’hui on a tort d’exporter nos conflits sur les réseaux sociaux"


"Il se peut que les parents ne soient pas toujours d’accord avec les méthodes de l’enseignant, mais il faut que la discussion reste dans les instances de l’école. En tant qu’enseignant je trouve normal de mettre régulièrement autour d’une table l’équipe pédagogique et les parents d’élèves parce qu’il faut les associer dans le processus d’éducation. On peut expliquer aux parents les objectifs pédagogiques pour mieux cerner les méthodes de l’enseignant. Mais le problème c’est quand un parent s’exprime de façon incomplète et maladroite sur les réseaux sociaux. Ces propos peuvent circuler, se transformer et tomber sous les yeux des maillons faibles qui ne comprennent même pas le contexte".
 

"Sans laxisme et sans excès, et surtout en respectant l’autre"


"Il y a certaines personnes qui font de la haine leur raison de vivre, d’autres qui sèment le doute sur le bien vivre ensemble. En tant que musulman, je crois que dieu nous a créés pour vivre dans le juste milieu, sans excès. Sans laxisme et sans excès, et surtout en respectant l’autre".
 

"Un islam qui respecte les valeurs de la République, la laïcité"


"Au sein de nos mosquées, nous travaillons contre le fanatisme, la radicalisation et les discours de haine. On a redoublé d’effort dans nos sermons pour former les jeunes au respect des valeurs de la République et promouvoir « l’islam des lumières » ; un islam qui respecte les valeurs de la République, la diversité des opinions, la laïcité.
On a ouvert nos portes au public et particulièrement aux écoles dans le cadre des programmes de l’Éducation Nationale, pour parler de l’histoire des religions monothéistes et découvrir les richesses de la civilisation islamique".

 

"Le dialogue contre l'obscurantisme"


"L’ignorance rend les personnes manipulables. C’est le terreau de la radicalisation. Tuer une personne pour accéder au paradis? Mais quel paradis? L’ignorance est le pire des maux. C’est pour cela que l’école de la République doit s’imposer en instaurant le dialogue et en instaurant le respect contre l'obscurantisme".
 
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