Fin des accouchements dans les petites maternités : "Si on les ferme, il va y avoir des accouchements dramatiques sur le bord des routes"

Le professeur Yves Ville et ses co-rédacteurs estiment, dans un rapport remis à l’Académie nationale de médecine, que les maternités qui réalisent moins de 1 000 accouchements par an devraient être regroupées avec de plus grandes structures. En Bretagne cela entraînerait la fin des naissances à Landerneau, Carhaix, Lannion, Guingamp, Redon et Ploërmel. Réactions.

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C’est un rapport qui va faire du bruit dans Landerneau, et au-delà. Notamment à Guingamp où la mobilisation pour le maintien de la maternité ne faiblit pas.

Mardi 28 février, le professeur Yves Ville et 14 autres spécialistes ont remis un rapport à l’Académie de médecine, dans lequel ils estiment nécessaire "une réduction accrue du nombre de maternités ".

« Au nom de la sécurité de la mère et de l’enfant »

Le Parisien rapporte les propos du chef du service obstétrique de l’hôpital Necker :"On doit regrouper 100 maternités en France au nom de la sécurité de la mère et de l’enfant. Si on ne le fait pas, on court à la catastrophe ". Le gynécologue ajoute que "leur maintien est illusoire. À terme elles finiront par fermer ".

Les rédacteurs du rapport font le constat que les petites maternités connaissent d’importantes pénuries de personnel et doivent faire appel à des intérimaires pour faire tourner leurs services. Selon Yves Ville "cette organisation sous forme de rustines ne permet pas d’assurer la sécurité et la qualité des soins ".

Ces problèmes de recrutement ne sont pas récents et expliqueraient déjà la baisse du nombre de maternités, passées de 1 369 en 1975, à 471 en 2021.

Le document préconise donc de regrouper les accouchements au sein de maternités de type 2 et 3, qu’il faudrait renforcer, en leur donnant davantage de moyens. Les petites maternités continueraient, cependant, à assurer le suivi des grossesses.

 

"Une atteinte à notre réputation"

Si l’Académie nationale de médecine n’a pas encore statué sur ce rapport, il n’en reste pas moins inquiétant. En France 111 maternités sont dans le viseur, dont 6 en Bretagne,  situées à Landerneau, Carhaix, Lannion, Guingamp, Redon et Ploërmel.

À Redon, les sages-femmes sont pour le moins surprises de voir tomber un tel rapport. "On n'a jamais été mises au courant d'une telle expertise. Il y a une atteinte à notre réputation. Cela peut faire fuir les patientes" réagit Juliette Fralin.

Sentiment partagé par Emilie Berthe qui exerce également à la maternité de Redon : "On a l’impression que ça va faire peur à la population ". La sage-femme rappelle que toutes les grandes maternités sont engorgées et que les conditions de travail y sont tout aussi compliquées.

Un accès aux soins plus difficiles

Florence Kerguiduff, représentante CGT à l’hôpital de Guingamp, s’inquiète quant à elle des conséquences de ces possibles fermetures : " Où vont aller les mamans dans ces conditions ? Il n’y aura pas assez de place pour tout le monde dans les grands hôpitaux […] Si on ferme les 111 maternités il va y avoir des accouchements dramatiques sur le bord des routes".

Accoucher avant d'arriver à la maternité, c'est exactement ce que craindrait Gabrielle si la maternité de Redon fermait. Car la jeune femme attend son troisième enfant : "il faudrait aller à Vannes ou Rennes et ça fait 45 min à 1 heure de route. Ça fait loin dans le cadre d’une naissance surtout pour une troisième naissance".  

Quant au pourquoi de ce rapport, Célestin, son mari, a sa propre explication : "C'est uniquement un argument économique. Mais est-ce que les hôpitaux sont des usines à rentabilité ou des lieux pour prendre soin des personnes ?" interroge ce papa, convaincu de l'importance de garder un bon maillage territorial.

Selon le rapport remis à l'Académie de médecine, ces regroupements de maternités n'auront qu'un impact limité sur l’accès aux soins. 89 % des naissances auraient lieu au maximum à trente minutes de la maternité la plus proche, et seulement 3% à plus de 45 minutes.

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