Différentes études montrent que la télésurveillance des malades atteints de cancers améliore leur qualité de vie et réduit leur hospitalisation en urgence. Les applications de suivi, comme celle créée par la start-up costarmoricaine Cureety, vont désormais être remboursée par la sécurité sociale. La Haute autorité de santé a donné son feu vert.
"Chaque semaine, je décris mes symptômes sur l'application et en fonction, les infirmiers me rappellent aussitôt ou pas" décrit Emmanuelle. Cette femme de 45 ans est soignée à Brest pour un cancer du sein métastatique.
Depuis le mois d'août, elle utilise l'application de la start-up Cureety, basée à Dinan dans les Côtes-d'Armor, un éditeur de dispositif médical de télésurveillance spécialisé en oncologie. "A chaque fois que je me présente pour ma chimiothérapie, les médecins savent exactement où j'en suis, on gagne en rapidité et en efficacité" explique Emmanuelle.
Une appli remboursée par la sécurité sociale
La plateforme fonctionne avec un système de questionnaires et un algorithme qui "permet une analyse très fine de l'état de santé du patient, indique Nicolas Bégin, directeur des opérations de Cureety. Les alertes varient en fonction du traitement. Par exemple, un début de fièvre pour un patient en début de chimiothérapie peut indiquer une baisse des défenses immunitaires" expose-t-il.
L'objectif de cette application de suivi des malades vise à détecter le plus tôt possible une éventuelle dégradation de leur état de santé, permettant ainsi à l'équipe médicale, connectée au logiciel, de décider de la meilleure prise en charge.
Cet été, la Haute autorité de santé (HAS) a rendu un avis favorable sur l'application, ouvrant la voie à un financement public. En octobre, la start-up Resilience, cofondée avec l'Institut Gustave-Roussy, centre de traitement du cancer à Villejuif, a également obtenu un avis positif de l'autorité de santé, censé lui assurer sous peu un remboursement pérenne de l'assurance-maladie.
Comme chez Cureety, un questionnaire et un système d'alerte permettent d'identifier les problématiques du patient. "On va pouvoir suspecter d'éventuelles rechutes d'un cancer, assure Paul-Louis Belletante, responsable stratégie chez Resilience. J'ai par exemple en tête un patient qui a signalé sur l'application une douleur dans le rachis. Son équipe soignante l'a aussitôt contacté et a pu détecter une métastase de manière précoce".
Amélioration de la qualité de vie
Différentes études ont prouvé un bénéfice global de la télésurveillance en oncologie, pointant une amélioration de la qualité de vie et une réduction de la venue aux urgences. Initiée par Gustave-Roussy, l'étude Capri a notamment mis en exergue une nette baisse des effets secondaires sévères liées aux traitements pour les patients équipés d'un tel système (27,6% contre 36,9%) et une réduction des hospitalisations (15,1% contre 22%).
Dans ce domaine, la France se distingue: c'est le seul pays à avoir décidé de rémunérer à la fois les industriels mais aussi les équipes médicales utilisant leurs applications. Pour le Dr Florian Scotté, chef du département d'organisation des parcours patients à Gustave-Roussy, il s'agit d'un "tournant". Selon lui, "cette technologie n'est pas seulement un outil digital, elle est gérée par des humains, du personnel. L'arrivée du remboursement va permettre une démocratisation du recours à la télésurveillance, relève-t-il. Car aujourd'hui certains centres ne peuvent pas se la payer".
Actuellement, Cureety est utilisée dans une soixantaine d'établissements par plus de 5.000 patients en onco-hématologie. Resilience revendique de son côté 4.000 patients télésuivis dans 50 hôpitaux en France et en Europe depuis 2021.
Selon la Haute autorité de santé, plus d'un million de personnes pourraient être concernées à terme chaque année en France.
