Prison, à Brest des détenus refusent de regagner leurs cellules

Ce 1er mai 2024, une douzaine de détenus sont retranchés dans la cour de promenade et refusent de réintégrer leurs cellules. Un feu a été allumé. Le personnel de l’ERIS de Rennes est attendu sur place. Des faits révélateurs d’une tension chaque jour plus grande dans la maison d’arrêt. Depuis des mois, les surveillants, relayés par les élus, alertent sur la surpopulation carcérale.

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Ce 1ᵉʳ mai, les détenus de la maison d’arrêt de Brest sont sortis dans la cour de promenade, comme à l’accoutumée. Mais vers 11h, un petit groupe a décidé de rester sur place et a refusé de réintégrer les cellules. Des détenus dont les fenêtres donnaient sur la cour leur ont envoyé des journaux pour qu’ils puissent allumer un feu. 

"Dans ces cas-là, on ne peut rien faire, témoigne Reynald Cochennec, délégué FO-Pénitentiaire. C’est impossible pour les surveillants d’accéder à la cour. C’est trop dangereux. Quand vous avez douze personnes qui ne veulent pas rentrer en cellule, il faut être au moins deux fois plus nombreux qu’eux. "

Les agents de l’ERIS ( équipe régionale d’intervention et de sécurité) sont intervenus." Eux, ils sont spécialement formés, c’est vraiment leur boulot", explique le délégué syndical. 

Le calme est revenu vers 16h30, les détenus concernés par ce début de mutinerie ont tous regagné leurs cellules. 

Lire : TÉMOIGNAGE. "On attend quoi ? Qu'il y ait des blessés graves ?", une médecin alerte sur la surpopulation à la prison de Brest

Des faits révélateurs d’une tension grandissante

Les détenus auraient affirmé qu’ils voulaient ainsi protester contre le manque d’accès aux douches.

"Cette histoire de la douche, c’est un prétexte, analyse Reynald Cochennec, les détenus ont accès aux douches du lundi au samedi. Il n’y a que les dimanches et les jours fériés où ce n’est pas possible. Le règlement pénitentiaire stipule trois douches hebdomadaires, à Brest, c’est six jours sur sept."

"Évidemment, continue-t-il, dans les nouveaux établissements, les douches sont dans les cellules. C’est beaucoup plus facile pour les détenus comme pour les surveillants ! Car, confirme-t-il, les douches, c’est comme dans les films, c’est là que tout se joue, les règlements de compte, les coups de pression, c’est là que ça se passe."

Surpopulation + drogue = cocktail explosif

"Le vrai problème, c’est la surpopulation", explique le délégué FO. La maison d’arrêt de Brest accueille plus de 400 détenus pour 224 places." Il y a entre 70 et 80 matelas au sol, décrit-il. Parfois trois détenus dans des cellules de 9m2. "

"On les entasse, on les entasse, on les entasse ! On essaye que la cocotte-minute ne saute pas, décrit Reynald Cochennec, mais on ne peut pas tout contrôler et la drogue est un vrai fléau. Il y a des gens qui descendent en promenade avec des poinçons ou avec des lames… "

Ce 30 avril, les surveillants ont intercepté un drone qui transportait quelque 120 grammes de cannabis et un gramme de cocaïne. 


"Le terrain de sport qui servait de lieu de réception des colis de stupéfiants est de plus en plus surveillé, on essaye de récupérer un maximum de colis, explique le surveillant. Quand il y a surpopulation + stupéfiants, c’est la loi du plus fort, la loi de la jungle ! "

Lire : "On craint la mutinerie ou des agressions de surveillants", un record de surpopulation dénoncé par les surveillants pénitentiaires à la prison de Brest

Une situation à la limite du danger


" La prison est au bord de l'implosion", lançait le sénateur du Finistère, Michel Canévet le 10 avril dernier. Il dressait alors un triste inventaire. "Il y a des lames, des paquets de shit qui passent par-dessus l'enceinte. En février, la médecin de la prison a été agressée." 

"La situation est très très grave et même à la limite du danger," s’inquiète-t-il au vu des derniers évènements. 

"La maison d’arrêt de Brest compte 100 détenus de plus qu’il y a un an. L’an prochain, ce sera encore 100 de plus ? C’est impossible. Il y a 224 places, on ne peut pas mettre 600 détenus ! C’est inhumain pour les détenus et pour le personnel pénitentiaire. "


En 2018, le gouvernement avait promis la création de 15 000 places de prison supplémentaires. "Mais elles tardent à sortir de terre et même si toutes avaient vu le jour, ce serait encore insuffisant, constate le sénateur, et puis, il faut recruter du personnel, le former. "

"À Brest, poursuit-il, il manque dix surveillants ! Sans compter la surpopulation carcérale. Il n’y a pas l’effectif pour la maison d’arrêt et en plus, elle accueille deux fois plus de détenus que ce qui est prévu… c’est totalement intenable ! "

Triste record 

Au 1ᵉʳ avril 2024, la France comptait 77 450 détenus. "Pour le sixième mois consécutif, la France explose tous les records", s'indigne l'Observatoire international des prisons. Cela contraindrait 3 307 détenus à dormir sur un matelas posé à même le sol de leur cellule.

Des chiffres qui interrogent quand on pense à Dostoïevski qui affirmait que "nous ne pouvions juger du degré de civilisation d’une nation qu’en visitant ses prisons." 

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