Stade Brestois,des champs de patates aux sommets du foot… Gérard et Denis Le Saint, des frères qui vont droit au but

Mercredi 6 novembre, les joueurs du Stade Brestois fouleront la pelouse du Sparta Prague à l’occasion de la quatrième journée de la Ligue des champions. Une épopée extraordinaire pour les Finistériens et notamment pour Denis Le Saint, géant de la vente de fruits et légumes et président du club.

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C'était en 1997, le Stade Brestois était tombé en 4e division et "je n'avais pas de survêtements pour mes joueurs", se souvient Pascal Robert, alors entraîneur du club. "On m'a dit "Pascal, va donc voir à Bourg-Blanc (au nord de Brest, ndlr), y a deux gars qui aiment bien le foot"".

"Et Gérard et Denis m'avaient payé les survêts", sourit l'ancien coach, âgé de 61 ans, aujourd'hui directeur général du club et invaincu en ce début de saison en Ligue des champions.

Un quart de siècle plus tard, le groupe Le Saint est devenu un géant de la distribution de fruits et légumes, avec 900 millions d'euros de chiffre d'affaires pour 2.800 salariés. Et son siège social ultra-moderne de 15.000 m2, à l'entrée de l'agglomération brestoise, contraste avec le hangar, le champ de patates et la camionnette Citroën grâce auxquels l'entreprise a été fondée par les parents de Gérard et Denis Le Saint dans les années 50. 

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Duo complémentaire

La clé de ce succès? "Un mode de fonctionnement original avec une très large délégation de pouvoir", analyse Gilles Falc'hun, 77 ans, président de la holding Sill Entreprises, et ami d'enfance. "Ils laissent faire et ils demandent des comptes. C'est motivant pour les cadres qui ont le pouvoir d'agir".

"Ils ont chacun leur domaine et sont complémentaires", complète leur sœur Catherine Junca, 55 ans, qui dirige une filiale du groupe, dans lequel travaillent aussi sa fille et les enfants de Gérard et Denis.

Car travail et famille sont étroitement liés chez ces petits-enfants de paysans bretons. "C'est ce qui nous a bercés toute notre enfance", décrit Mme Junca. "La cuisine, c'était le lieu de retour des chauffeurs, que ma mère appelait "mes hommes"".

"Ils arrivaient tous, les uns après les autres, pour ramener leurs caisses", se souvient l'aîné Gérard, 63 ans, au ton volontiers gouailleur. "Et évidemment, ma mère leur payait un coup. Et des fois, nous, on attendait à bouffer, et c'était long".

Pas échaudés, les deux frères ne quittent l'entreprise familiale que pour de courtes études ("ça nous suffit pour savoir compter", dit Gérard), avant de revenir y travailler.

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"Rien lâché"

Dans les années 90, l'arrivée des centrales d'achat de la grande distribution fait vaciller l'entreprise en la privant de plusieurs clients. "On était jeunes, on voulait se battre et on n'a rien lâché", raconte Denis, 60 ans. "On est partis chercher des clients plus loin".

Le groupe se diversifie alors dans la restauration et les produits de la mer et rachète ses concurrents, en Bretagne puis dans le Grand Ouest. Après cent dossiers de reprise, le groupe compte aujourd'hui plus de 50 filiales.

En 2012, leur développement s'étend dans le sport, quand les deux frères sont sollicités pour reprendre l'équipe brestoise de handball féminin, en difficulté financière. Finaliste de la Ligue des champions en 2021, leader du championnat de France cette année, le BBH dispose aujourd'hui d'un des plus gros budgets de France en sport féminin. 

"S'ils n'étaient pas là, il n'y aurait pas de sport de haut niveau à Brest", assure Éric Ledan, 50 ans, directeur commercial du BBH, qui salue la "bonhomie" et "l'humilité" de ses patrons.

"Des chouettes types", abonde Gilbert Thomas, 66 ans, surveillant pénitentiaire en retraite, qui a transpiré avec eux dans l'équipe de foot de Bourg-Blanc. "C'est une passion. Ils ont toujours vécu à travers le foot", dit-il.

En 2016 justement, Denis prend la tête du Stade Brestois et le club retrouve la Ligue 1 trois ans plus tard. Les frères se lancent alors dans un projet de nouveau stade en périphérie de la ville... qui suscite la contestation.

"Une aberration écologique" dispendieuse des deniers publics, tacle le chef de file des écologistes brestois, Glen Dissaux. Mais "il faut reconnaître qu'ils ont placé des gens compétents au Stade Brestois", nuance ce supporter de foot.

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