Jean Baptiste Epron est un homme de l'ombre. Passionné par la mer et le dessin, il a réussi à allier les deux en devenant l'un des directeurs artistiques les plus reconnus dans le monde de la course au large. Rencontre dans le Finistère, où il vit une partie de son temps.
Ils ne sont pas plus d'une dizaine à exercer ce métier en France. Jean-Baptiste Epron est styliste pour bateau. De la mini transat au maxi trimaran, ce Parisien installé à Gouesnac'h crée la décoration des coques et des voiles. Il a imaginé cinq des 60 pieds du Vendée Globe.
Installé à son bureau, Jean-Baptiste crayonne, use d'abord de son pinceau. "Chaque projet démarre par des recherches pour ne pas reproduire la même chose. Je me créé ma propre banque d'images, avec des formes que je vais exploiter ensuite sur l'ordinateur", explique-t-il.
"Je commence toujours avec la matière : de l'encre, de la peinture, du papier. Je vais créer des accidents naturels qui vont créer quelque chose qui se déploiera sur trois mètres de haut."
Au-delà des logos, raconter des histoires sur les voiles
"Quand on voit le logo, on doit bien sûr voir la marque mais surtout retrouver l'essence même de ces écuries qui est d'envoyer des bateaux faire des tours du monde, des transats à toute vitesse."
Jean-Baptiste essaie de retranscrire la vitesse, le mouvement, l'action, mais aussi un quotidien, celui d'un skipper qui vit constamment à bord pendant qu'il se déplace.
Le travail de Jean-Baptiste représente un challenge. "Même si on n'arrive pas à lire le logo, on doit pouvoir faire ressortir une association, faire penser à la marque et au navigateur. Ce qui fonctionne c'est le contraste entre les couleurs, des formes simples."Moi mon travail c'est de donner, une identité, un style en utilisant les formes naturels des bateaux, mettre en valeur ceux qui les financent et les harmoniser avec le milieu dans lequel ils vont évoluer (au port, en mer). Ma surface d'expression change selon les conditions extérieures. Leur perception doit être la même, dans toutes ces conditions.
Pendant longtemps, les sponsors ont réclamé de très gros logos. Jean-Baptiste Epron constate une évolution dans son métier, avec l'envie de s'approprier le bateau, telle une toile.
"Il y a des bateaux qui représentent des défis, comme le Gitana où on a travaillé avec un street-artist, Cleon Peterson. Son oeuvre décore le bateau. Il fallait ne pas dénaturer l'oeuvre de départ, qu'elle garde le même langage dans toutes les configurations du bateau."
Sur le Gitana, quatre guerriers se dressent ainsi qu'une sirène. Ici, on oublie presque la marque, mais pas vraiment puisque l'oeuvre y fait penser. Le message sportif passe avant le message commercial note Jean-Baptiste.
Respecter l'environnement marin
Jean-Baptiste Epron a lui même déjà navigué, sans se lasser du spectacle offert par la mer, ses lumières. Il réfléchit beaucoup à ce travail de communication et ses conséquences sur la nature.
"On a de grosses responsabilités dans ce genre de boulot, on met des panneaux publicitaires en pleine nature. On peut trouver ça complètement anachronique. Pour continuer à le faire, il faut des gardes-fous, que les marques le comprennent aussi. La conception des bateaux doit emprunter des matières moins polluantes et les marins ainsi que les fabricants en ont conscience."
"Dans mon boulot, il faut arriver à une certaine sobriété visuelle, pour que toute cette économie existe mais sans être vulgaire, pour garder les jolis paysages."