4 000 kilomètres en quelques jours avec la peur au ventre. Jordane Lemarié a quitté Saint-Malo la semaine dernière pour aller chercher sa belle-famille, Natalya, Alexi et leurs 5 enfants. Tous sont arrivés, sains et saufs.
"On a appris que les bombardements avaient commencé le 24 février à 4 h 10 du matin par ma belle-mère qui travaille dans un hôpital à Zhitomir à 130 kilomètres de Kiev. A 4 h 11, j’avais décidé que je partais" explique Jordane Lemarié, comme si c’était la chose la plus naturelle du monde.
"Dix minutes plus tard, on a su qu’il y avait eu des tirs partout dans le pays, c’était vraiment la guerre qui commençait."
Jordane a publié un message sur les réseaux sociaux pour annoncer son départ et ne pas faire le voyage aller à vide. Les dons ont tout de suite afflué. "Nous avons fait un convoi de trois voitures, remplies de couvertures, de nourritures, de matériel médical et nous sommes partis."
Des hôpitaux ont été bombardés, des écoles ont été bombardées, je ne pouvais pas rester les bras croisés à regarder la télé. Il fallait que je sécurise ma tribu ukrainienne. On ne peut pas laisser des enfants grandir sous les bombes.
Jordane Lemarié
Sous les bombardements
Car à Zhitomir, Natalya, Alexi et leurs cinq enfants sont sous les bombes. "C’était dangereux de rester là bas, on avait peur," reconnait Alexi. "Quand les explosions commencent, il faut mettre les enfants, les femmes et les personnes âgées à l’abri".
Ils ont pris quelques vêtements, leurs papiers et ont quitté leur pays. "C’est dur, on a quitté la famille, les amis, mais ici, les enfants sont en sécurité et puis les gens sont si gentils avec nous. Pendant tout le trajet, en Pologne, en Belgique, en France, on nous a donné à manger, on a été hébergés. Après les moments durs que l’on a vécu, c’est vraiment magnifique ! "
Lesia vit à Saint-Malo avec son mari Jordane depuis quelques mois. Depuis qu'ils sont enfin arrivés, elle ne quitte pas la famille de sa sœur des yeux. "Les premiers jours, je ne pouvais plus dormir, je pleurais", confie-t-elle.
Je ne sais pas si les gens peuvent comprendre, ce n’est pas comme quand on s’angoisse pour quelque chose, là, c’est la guerre, ça fait très peur !
Lesia Lemarié
Son père et sa mère sont restés à Zhitomir, "ils ne pouvaient pas imaginer quitter leur maison " comprend Lesia. "Mon père est très patriote, il s’inquiète pour l’Ukraine, ma mère s’inquiète pour tout le monde."
Lesia aussi est inquiète. Elle les appelle plusieurs fois par jour. "Quand j’apprends qu’il y a eu des explosions, j’ai besoin de les entendre."
La petite famille a maintenant trouvé refuge à Saint-Malo. "Pour moi, c’était impensable qu’ils restent là-bas, répète encore Jordane. C’est difficile de se mettre à leur place, ils ont tout quitté, leur pays, leurs habitudes, leur culture, leur langue. Mais ce qu'on espère, c'est que leur langue et leur culture vont perdurer parce qu’ils ont la vie sauve !"