Jennifer s'est engagée avec les Gilets jaunes il y a un an. Montée des injustices, sentiment de faire partie d'une classe toujours en sursis, elle ne se voit pas d'avenir et a le sentiment de ne pas être entendue.
"J'ai fait connaissance avec des gens divers et variés, multi-générationnels, de classes sociales différentes. J'ai trouvé ce mouvement beau et magique par sa diversité et la bonne raison de se mobiliser", voilà comment Jennifer voit le mouvement des Gilets jaunes, auquel elle participe depuis les débuts, il y a un an.
Âgée de 37 ans, elle ne se considère pas comme une privilégiée, pas comme une grande précaire, toujours dans un entre-deux. Une mère ouvrière, un père chef d'entreprise, la politique agite sa famille. "Depuis toute petite, j'entends que ça va péter parce qu'il y a trop d'injustice partout en France", raconte-t-elle. L'injustice, elle a l'impression de désormais la vivre. Après plusieurs années dans les assurances, toujours en CDD, elle constate : "Au fur et à mesure je me suis rendue compte de l'évolution de la société et de cette emprise des banques et des assurances sur les gens, sur l'évolution de la technologie qui va nous faire perdre nos métiers." Jennifer cherche du travail, a repris une formation dans son secteur mais se heurte à la réalité. "Là on m'a clairement dit que je ne serais plus jamais embauchée malgré mes diplômes, mon expérience parce que mon métier est voué à être remplacé par un ordinateur."
"J'ai déménagé, j'ai quitté ma région natale pour trouver du travail, trois fois en trois ans. Je pense que les efforts je les fais largement" souligne Jennifer.
L'avenir ? Difficile d'y croire. "J'ai deux enfants. On ne peut pas prendre de crédit avec mon conjoint même s'il occupe un bon poste. On fait partie des gens qui n'ont aucun avantages sociaux mais qui sont taxés de partout. C'est ce qui fait qu'on est au bord de la route." Selon elle, la société ne s'adapte pas aux nouvelles situations dans l'emploi, des CDD à répétition.Je n'ai pas simplement traversé le passage piéton, j'ai traversé la France, c'est plutôt pas mal comme effort et au final je n'ai rien
"Je n'ai plus confiance. On ne se bat plus pour les travailleurs ou les services publics alors que les actionnaires touchent des sommes incroyables", regrette-t-elle.
"Depuis un an, là-haut, ils ne prennent pas en considération ce qu'il se passe." "Nous on a tellement fait d'efforts qu'on ne voit plus de solutions." Elle conclut : "J'ai mieux réussi que mes parents au même âge mais je n'aboutis à rien. Je ne peux pas m'assurer un avenir."