Covid-19. "Nous arrivons à saturation, on va devoir laisser des patients sur le carreau", regrette un infirmier à Rennes

Alors que le reconfinement était inévitable pour les soignants, nous avons pu échanger avec un infirmier du CHU de Rennes. Pessimiste, il nous livre ses fortes inquiétudes et sa vision du monde hospitalier. 

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Evan (prénom d'emprunt, NDLR) est en colère. Infirmier depuis neuf ans au CHU de Pontchaillou, il est lassé… mais pas de son travail, au contraire. Il est lassé de voir que les soignants tirent la sonnette d’alarme depuis longtemps et que “rien n’a changé”, malgré la première vague et ses 30.000 décès au printemps

Par peur "de représailles", Evan a préféré rester anonyme. 

Les services de réanimation surchargés, la solution du confinement était pour lui inévitable. 

“Malheureusement, nous n’avons plus le choix. Nous arrivons à saturation. Là, c’est horrible, on laisse des patients sur le carreau. On aurait pu pousser certains patients en réanimation, on aurait pu tenter, mais on ne peut pas... Les réanimations sont pleines”, s’alarme Evan.

Selon Ouest-France, ce 26 octobre, les services de réanimation seraient remplis à 93,8% au CHU de Rennes dont 28% par des patients Covid. 
 

Le soir, quand on rentre chez soi, c’est difficile, on ne fait pas ce boulot pour ça.


Membre du collectif Inter Urgences, Evan craint cette deuxième vague. “Avant ce reconfinement, les gens se sont retrouvés, ils en ont profité… Mais je n’en veux pas aux Français d’avoir envie de vivre”. 


"Le personnel est fatigué du mois de mars"


La différence avec le mois de mars : toute la France est touchée. “Toutes les régions sont touchées, tous les départements sont touchés (…) toutes les métropoles sont touchées”, a alerté Jérôme Salomon, directeur général de la santé ce 28 octobre. 

Si la Bretagne est restée épargnée par le virus lors de la première vague, ce n’est plus le cas aujourd’hui. Evan est inquiet : “A Rennes en mars dernier, on avait récupéré des malades hospitalisés à Paris. Désormais, on ne peut plus se permettre de faire ça. On n’a pas de solution, on ne peut plus transférer de collègues, ni de malades”. 

Aujourd’hui, c’est plus compliqué qu’au plus fort de l’épidémie en mars. Nous sommes plein à craquer et le personnel est fatigué du mois de mars”, déplore Evan, qui a, lui aussi, été contaminé par le virus. 

Dans certains hôpitaux, quand on tombe malade, si on peut travailler, on doit venir travailler”. Ce n’est pas encore le cas à Rennes. 


Pas assez de lits, ni de personnels soignants 


En effet, le personnel manque dans les hôpitaux. “On se retrouve avec deux fois plus de malades, avec moins de collègues, et pas assez d’infrastructures”, dénonce Evan. 

Aux Urgences de Pontchaillou, on peut mettre deux malades dans une chambre individuelle. Ça nous retourne le ventre de faire ça. Des personnes âgées, qui ont cotisé toute leur vie, on ne peut pas les soigner.


Pour Evan, le confinement aurait pu être évité si le monde hospitalier “ne payait pas les 15 années d’austérité qui ont fermé les lits, supprimé des postes”. 


Les mesures du Ségur de la santé : "ce n'est pas assez


Les accords du “Ségur de la Santé”, signés en juillet dernier par le gouvernement, promettent notamment une augmentation de salaire de 183 euros net par mois pour tous les soignants. 

Ce n’est pas assez par rapport à nos journées extrêmement difficiles. Le Ségur n’a rien apporté, il n’y a pas eu de créations de lits, pas de créations de postes. Le vivier de soignants est là, ils ne veulent juste plus venir car ils ne sont pas assez payés. Si on les payait davantage, ils viendraient”, regrette Evan. 

Le 15 octobre dernier, les soignants sont descendus dans la rue pour réclamer des embauches massives et une revalorisation “significative” des salaires, malgré les promesses du gouvernement.

Evan en est conscient. Les prochaines semaines vont être éprouvantes, les journées longues. La fatigue va s’accumuler. Mais il est prêt et concentré pour appréhender cette deuxième vague qui devrait être “plus dure et meurtrière que la première”, selon Emmanuel Macron. 
 
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