Paris Match et une journaliste de l'hebdomadaire ont été reconnus coupables ce vendredi 30 août 2024 par le tribunal judiciaire de Rennes saisi en référé, d'atteinte à la présomption d'innocence de l'ex-chef du service de neurochirurgie du CHU de Rennes.
L'hebdomadaire Paris Match et la journaliste d'investigation Anne Jouan étaient poursuivis après la publication de deux articles : "Requiem au CHU de Rennes" et "CHU de Rennes, l'onde de choc" parus au début de l'année 2024.
"Brimades, humiliations,management délétère..."
Dans ces articles, neuf soignants du CHU dénonçaient à visage découvert les "brimades, humiliations (...) violences verbales et le harcèlement moral et sexuel" dont ils prétendent avoir été victimes au sein du service de neurochirurgie depuis près de vingt ans.
Les articles mettaient notamment en cause le "management délétère" supposé du professeur Xavier Morandi, chef du service de neurochirurgie entre novembre 2011 et janvier 2023.
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Dans son jugement, dont l'AFP a obtenu une copie, la juge des référés explique que "même si l'auteure a recours au conditionnel, et qu'il est mentionné que Monsieur Morandi demeure 'présumé innocent', ces éléments ne permettent pas de rétablir l'équilibre entre présomption d'innocence et journalisme judiciaire".
Paris Match et Anne Jouan ont été condamnés "aux entiers dépens" (frais de procédure) et à verser la somme de 1.500 euros à M. Morandi "au titre des frais irrépétibles" (frais d'avocats).
"Décision incohérente"
"Paris Match s'étonne de cette décision incohérente", a réagi auprès de l'AFP l'avocat de l'hebdomadaire Christophe Bigot qui a indiqué faire "immédiatement appel" de la décision. "Cette décision va faire taire tous les fonctionnaires dénonçant les dysfonctionnements hospitaliers et l'omerta continuera à régner", a dénoncé la journaliste Anne Jouan.
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Parallèlement, le professeur Marco Corniola, successeur du Professeur Morandi avant de démissionner en janvier et lui aussi mis en cause dans l'un des articles, a été débouté de sa demande d'atteinte à sa présomption d'innocence.
En octobre 2023, l'Intersyndicale Nationale des Internes (ISNI) a porté plainte contre les deux professeurs pour des faits de harcèlement. Une enquête préliminaire est toujours en cours.