"Il y a des situations dramatiques", sans salaire ni contrat, des enseignants des lycées agricoles privés sont malmenés par l'État

Des enseignants qui donnent des cours sans contrat de travail. D'autres qui n'ont pas touché de salaire en quatre mois. Les retards administratifs du ministère de l'Agriculture mettent les enseignants contractuels des lycées agricoles privés dans une situation pour le moins préoccupante.

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"1962 : Création de la PAC, mais je vous avais bien dit que la création de l’Europe date de 1957 avec 6 pays au départ." Pierrick Quéro est enseignant contractuel en économie au lycée agricole privé Les Vergers à Dol-de-Bretagne. Ce jour-là, il donne un cours à ses élèves de BTS. Mais un cours pour lequel il ne touche aucun salaire. "L’État ne me rémunère pas. Je travaille en totale illégalité puisque je n’ai pas de contrat de travail."

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Pierrick n’est pas un cas isolé… Les 800 enseignants des 25 lycées agricoles privés bretons dépendent du ministère de l’Agriculture. Ils sont donc rémunérés par l’État. Un ministère, à la peine administrativement et qui malmène les nouveaux enseignants contractuels. Pierrick Quéro, lui, n’a pas touché de salaire depuis six mois et demi.

"Il y a des situations dramatiques"

"Ce n’est pas normal qu’un enseignant qui commence dans l’enseignement agricole privé ne touche pas de salaires pendant quatre mois ou plus, s’emporte Boris Genty, délégué FEP-CFDT Bretagne. Ce n’est pas normal que des collègues en arrêt maladie ne puissent pas toucher la prévoyance ou leur salaire en raison de cette maladie qui nécessite des documents, des arrêtés qui n’arrivent pas. Nous avons des situations dramatiques."

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Pas de contrat, pas de salaire... Des professeurs bretons en lycées agricoles travaillent illégalement depuis des mois. ©E. Pinault et V. Chopin. Montage : N. Jacob

Un ras-le-bol que comprend Philippe Pinot, le directeur au lycée agricole privé Les Vergers. "L’enseignant en question n’est pas rassuré. Il démarre une mission sans savoir quand il touchera son premier salaire et sans connaître son montant."

Le lycée s’autorise à faire des avances sur salaire à ces enseignants contractuels. "Ce n’est pas obligatoire, car on n’est pas l’employeur, mais ça va de soi. On va avancer un mois, deux mois, trois mois, voire quatre mois."

"On a l’impression que les ministères sont vides"

Au final, le lycée va devoir avancer des sommes importantes pouvant aller jusqu’à 7 à 8.000 euros pour des retards de salaires de quatre à cinq mois. "Le ministère va finir par faire les choses, mais ça prend beaucoup de temps." Indulgent, il trouve des excuses au ministère : "Il n’est pas suffisamment doté en agents. On a l’impression que les ministères sont vides et eux aussi ont des problèmes de recrutement."

On constate un délitement depuis une trentaine d’années. Il y a des retards et des charges de travail qui s’allongent. On reporte, on reporte, on reporte. Au bout de la chaîne, ce sont les établissements avec ses salariés du privé.

Philippe Pinot

Directeur du lycée agricole privé Les Vergers

Si le lycée des Vergers n’est pas dans une situation financière critique, d’autres établissements "sont en difficulté majeure" glisse Philippe Pinot. Ces avances sur trésorerie impactent les budgets et certains projets pédagogiques sont différés en attendant les remboursements du ministère.

Des cas similaires existent aussi dans le public. Les couacs concernent les salaires et plus largement des questions liées aux ressources humaines.

Hasard du calendrier (ou pression médiatique récente ?), le professeur d’économie a reçu son contrat d’embauche dans sa bannette, justement ce 14 mars 2024.

De son côté, la Draaf Bretagne, service déconcentré du ministère de l'Agriculture, rappelle qu'elle est chargée de "vérifier la recevabilité et la complétude des dossiers" transmis par les lycées. "Ils sont ensuite envoyés au service RH du ministère qui, en qualité d'employeur, rédige le contrat et paye le contractuel."

La Draaf précise que dans le cas de l'enseignant en économie, "le dossier a été reçu non complet en septembre 2023. Les pièces complémentaires ont été fournies par l'établissement en plusieurs fois, ajoute-t-elle. Le dossier a été jugé complet le 10 janvier 2024. Ce retard de 4 mois est entièrement imputable au délai de fournitures des pièces manquantes et au traitement du dossier par l'établissement."

(Avec Éric Pinault)

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