Des "nausées", des "vertiges" ou une vive douleur: des dizaines de jeunes racontent avoir été piqués en boîte de nuit ou dans des festivals, créant un climat de "psychose", même si les autorités ont encore du mal à déterminer les contours et l'ampleur du phénomène.
Depuis le début avril, une soixantaine de faits ont été enregistrés en France dans des établissements de nuit situés en zone police, selon une source. De son côté, la gendarmerie n'a pas souhaité communiquer de chiffres nationaux ,expliquant qu'à son niveau le phénomène n'était pas encore suffisamment étayé. Plusieurs régions sont concernées. On dénombre quinze enquêtes à Rennes, d'autres dans l'Hérault, l'Isère, en Haute-Garonne, en Dordogne ou Loire-Atlantique.
Difficile de prouver la présence de substances
A Nantes, 45 faits ont été portés à la connaissance des forces de l'ordre depuis la mi-février, selon le parquet. "Aucun dépistage n'a mis en évidence la présence de GHB ou autres substances toxiques", a indiqué le procureur Renaud Gaudeul à l'AFP, précisant qu'aucun suspect n'avait été interpellé. Il est parfois difficile de prouver la présence d'une substance: le GHB est indécelable dans le sang quelques heures seulement après son absorption. Ailleurs en France, des "choses diffèrent" dans le "mode opératoire" de ces agressions, précise une source policière, expliquant que certaines pouvaient par exemple s'accompagner d'agressions sexuelles alors que d'autres non. Les enquêteurs sont également en attente du résultat des analyses toxicologiques pour voir si la substance administrée est la même.
Quinze enquêtes à Rennes, 25 plaintes contre X à Lorient
A Rennes, Quinze enquêtes ont été ouvertes depuis décembre et confiées à la sûreté départementale de Rennes après des signalements de piqûres, touchant essentiellement des femmes, un phénomène qui reste "sans explication tangible", a indiqué mercredi 27 avril le parquet. Les faits se sont déroulés dans des établissements de nuit de Rennes (bar de nuit, discothèques ou salle de concert), s'agissant de 14 femmes et un homme", selon le procureur de la République de Rennes Philippe Astruc. D'après le procureur, elles ont établi "un seul malaise, une seule présence de personne suspecte au moment de la piqûre, aucune tentative de vol ou d'agression sexuelle à la suite". Ces piqûres sont "le plus souvent sur le haut du corps (dos ou bras)" tandis qu'"aucune analyse biologique n'a révélé de substance suspecte", ajoute M. Astruc, précisant toutefois qu'il n'y avait pas eu les résultats de toutes les analyses. "A ce jour aucune personne n'a donc été mise en cause s'agissant de ce phénomène qui demeure sans explication tangible", note le procureur.
Des victimes au festival "Insolent" de Lanester
L'inquiétude est vive alors que débute la saison des festivals. Le samedi 23 avril dernier, des participants au festival "Insolent" à Lanester près de Lorient (Morbihan) ont été victimes du phénomène et se sont fait examiner à l'hôpital. Une enquête est en cours. 25 plaintes contre X ont été déposées selon le parquet de Lorient, rapportent nos confrères de France Bleu Breizh Izel, après ces suspicions de piqûres. Une trentaine de cas au total ont été recensés par le centre hospitalier. Une enquête a été ouverte et confiée au commissariat de Lorient, pour administration de substance nuisible, ainsi que violences avec arme et préméditation. Les victimes n'ont fait part d'aucun trouble de santé, précise le procureur de la République de Lorient. Le festival Les Innocents rassemblaient entre 7 000 et 8 000 personnes samedi dernier.
Se faire dépister !
Fred Bladou, chargé de mission pour l'association Aides, qui lutte contre le VIH, considère qu'il y a une sorte d'"emballement" autour de ces cas mais rappelle qu'en cas d'injection "il faut aller tout de suite se faire dépister aux urgences hospitalières". Le président de la branche nuit du principal syndicat de l'hôtellerie restauration (Umih), Thierry Fontaine, dénonce un "jeu malsain et pervers" de mystérieux agresseurs qui créent une "psychose" chez les jeunes. Il craint un impact sur les établissements qui ont déjà souffert de la pandémie. Le phénomène n'est pas nouveau en Europe: au Royaume-Uni, une vague de témoignages d'étudiantes droguées à leur insu par des injections en boîtes avait déferlé cet automne.