Un recensement de nuit, à l’instant T, d’hommes et de femmes vivant dans la rue. Tel est le principe de la Nuit de la Solidarité. Une opération de recensement mise en place désormais dans plusieurs villes de France dont Rennes. Elle associe les centres communaux d’action sociale, les acteurs du monde associatif et des habitants bénévoles. Deuxième édition à Rennes ce mercredi 2 mars.
77 équipes composées pour l’occasion. Des groupes de 3 voire 4 personnes se constituent à l’heure du briefing pour aller vers ceux et celles qui vivent dans la rue. Plus de 280 volontaires. Des membres du CCAS ou d’associations de solidarité mais aussi des habitants bénévoles comme Michelle et Nadège qui sont affectées dans le quartier Ouest de Rennes.
Je pense que quand on a du temps, il faut le donner aux personnes qui en ont besoin.
Michelle,habitante bénévole
Nadège aussi a envie d’être "utile". "J’ai vu qu’il y avait la Nuit de la Solidarité. J’en avais déjà entendu parler mais je n’avais jamais participé et là du coup, cette année, je vais participer. "
Des bénévoles qui prennent d’abord connaissance du questionnaire à soumettre aux sans-abris. Il est anonyme et porte tout à la fois sur la tranche d’âge des personnes rencontrées, les lieux où elles passent la nuit….si elles sont en contact avec un travailleur social ou depuis combien de temps elles se trouvent sans solution de logement personnel.
Evaluer les besoins
Dans le centre-ville de Rennes, Danièle, professionnelle de l’action sociale, se met en route avec trois jeunes femmes, Lucile, Maëlys et Romane. Deux d’entre-elles ont l’expérience des maraudes avec une association. Mais cette fois, il s’agit bien d’une démarche de recensement pour évaluer les besoins des personnes rencontrées.
"La nuit, il reste beaucoup de gens dans la rue", explique Danièle Fourdan, directrice du CCAS…."D’abord parce que les dispositifs classiques gérés par l’Etat sont souvent saturés, que les dispositifs y compris volontaristes qui ont pu être mis en place à destination de certains publics comme les familles avec enfants sont également saturés. Qui plus est le besoin est grandissant avec aussi des personnes en situation de vulnérabilité de plus en plus importante et on a vu que la crise avait plutôt aggravé le sort des plus démunis. (…) "
Chemin faisant, l’équipe de Danièle entame la conversation avec Alex.
Un café pour se réchauffer et oui, cette quadragénaire accepte spontanément de répondre au questionnaire. Quasi six ans qu’elle n’a plus de toit fixe, situation devenue précaire depuis que son compagnon est décédé. Alors, elle explique dormir à "gauche à droite " mais ne souhaite pas aller dans les centres d’hébergement… "Il y a trop d’alcool " dit-elle. Et d’ajouter qu’elle attend des versements en retard de RSA et que oui, elle est en contact avec un travailleur social. Une femme évidemment désireuse d’avoir "une sécurité avec un toit".
Connaître pour améliorer les dispositifs d'accompagnement
La première édition de la Nuit de la Solidarité à Rennes, c'était en 2019.
La maire, Nathalie Appéré, explique que cette expérience a conduit à mettre en place des dispositifs concrets comme un guide à destination des personnes sans domicile fixe pour qu’elles repèrent mieux les services existants…où manger, être accueilli, prendre une douche.
L'élue met aussi en avant la mise en place d’un centre d’hébergement d’urgence supplémentaire directement assumé par la ville.
Cette Nuit de la Solidarité précise-t-elle, "C’est à la fois recenser, mieux comprendre, mieux connaître pour essayer d’améliorer les dispositifs d’accompagnement (…)".
Une Nuit de la Solidarité qui n'avait pu être organisée ces deux dernières années pour cause de crise sanitaire.
Une opération pensée pour associer les habitants, sensibiliser le plus grand nombre aux situations d'exclusions.
A l'issue de cette soirée, Romane, 24 ans, estime avoir participé à une démarche importante, pertinente.
"Même dans la vie associative, de manière générale c'est vrai que d'être là pour les personnes qui en ont besoin, etc..., c'est ... finalement, là çà ne m'a pris qu'une soirée, quelques heures. C'est je pense à la portée de beaucoup de personnes donc si on pouvait tous le faire, je pense que çà pourrait changer beaucoup de choses."
En 2019, 168 personnes se déclarant en situation "de rue" avaient été rencontrées par les bénévoles de la Nuit de la Solidarité.