Selon l'Organisation mondiale de la santé, l'antibiorésistance est l'une des plus graves menaces pesant sur la santé mondiale. En 15 ans, la consommation d'antibiotiques a augmenté de 65%. Cette hausse favorise l'émergence de bactéries résistantes aux antibiotiques. La Bretagne n'est pas épargnée.

BHRe. Quatre lettres pour décrire l'une des hantises des services hospitaliers. BHRe pour Bactérie Hautement Résistante, "une bactérie de compétition, résistante à quasiment toutes les classes d'antibiotiques et qui met en péril le patient, qui en est porteur, comme le service tout en entier", explique le professeur Pierre Tattevin, chef du service des maladies infectieuses au CHU de Rennes. 

Mise en quarantaine


"Dans ces cas là, le malade est placé en quarantaine dans sa chambre. Tout le secteur est protégé. Les visites sont proscrites et le personnel soignant doit se soumettre à un protocole très strict avant d'entrer dans la chambre. C'est souvent mal vécu par le patient", relate encore Pierre Tattevin. Des cas aussi extrêmes, il n'y en a heureusement pas si souvent que cela, "mais dans les hôpitaux parisiens, c'est régulier". Or ces bactéries mutantes ne connaissent pas de frontière.

+ 65% depuis 2000


Entre 2000 et 2015, la consommation mondiale d’antibiotiques a augmenté de 65%, selon une étude publiée le 26 mars dans le journal de l’Académie des sciences américaine (PNAS). La France se situe, en 2015, au 4ème rang, selon le centre de ressource Med Qual. La consommation d’antibiotiques en France est de 30% supérieure à la moyenne européenne. Si la consommation avait commencé à diminuer au début des années 2000 (rappelez-vous de la campagne "les antibiotiques, c'est pas automatique!"), elle a progressé continuellement au cours de ces 3 dernières années. 

Bactéries mutantes


Une hausse jugée alarmante par les professionnels de santé. Car à force d'utiliser les antibiotiques de façon massive et répétée, les bactéries développent des stratégies de résistance à ceux-ci. Conséquence, certaines infections banales deviennent compliquées à soigner, nécessitent des traitements plus lourds, plus onéreux, des hospitalisations plus longues.
A Rennes, c'est le cas d'Hervé Clabon. Transplanté en février dernier d'un foie et d'un rein, il aurait du quitter l'hôpital depuis plusieurs semaines si une bactérie multirésistante ne s'en était pas mêlée. Après plusieurs jours de souffrance et d'inquiétude, il est désormais traité par antibiotiques sous perfusion 24h/24. "Un épisode qui me vaut au moins un mois d'hôpital de plus, loin de chez moi".

25 000 décès par an


Au sein de l’Union Européenne (UE), on estime qu’au moins 25 000 patients décèdent chaque année d’une infection due à l’une des cinq bactéries multi-résistantes (BMR) les plus fréquentes


L'antibiorésistance menace d'autres traitements et chirurgies



En perdant leur pouvoir, les antibiotiques mettent aussi en péril d'autres avancées médicales. "Sans changement de comportement, des citoyens et des médecins le risque est immense: sans antibiotiques efficaces, plus de transplantations d'organes, de greffes,de chimiothérapies anticancéreuses, de chirurgies prothétiques ou césariennes, et le retour de maladies ou complications jusque là contrôlées", alerte l'Union régionale des professionnels de santé médecins libéraux de Bretagne (URPS MLB).


Une utilisation plus juste des antibiotiques


Sur cette grande question de santé publique, l'URPS MLB a donc organisé d'octobre 2017 à février 2018 plusieurs réunions à l'adresse des professionnels de santé (médecins généralistes, biologistes et pharmaciens) afin de les sensibiliser à une plus juste utilisation des antibiotiques. Près d'une prescription d'antibiotiques sur deux serait en effet injustifiée.

- Hervé Clabon - Pr Pierre Tattevin, chef de service des maladies infectieuses - CHU de Rennes - Dr Samer Kayal, chef de service de bactériologie - CHU de Rennes - Dr Thierry Labarthe, médecin généraliste - URPS des Médecins libéraux de Bretagne ©H.Pédech, JM.Piron, T.Descamps

 

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