Réforme des retraites. Intervention musclée dans un Domino's Pizza à Rennes : les violences policières pointées du doigt

Brutalités lors d'un barrage filtrant, intervention musclée à l'intérieur d'un commerce, interpellations... À Rennes, les interventions policières font l'objet de multiples réactions après les mobilisations et manifestations de ces derniers jours.

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La vidéo circule sur les réseaux sociaux : on y voit un groupe de CRS s'engouffrer dans un commerce Domino's Pizza de la rue de Saint-Malo, à Rennes.
L'opération a lieu ce mardi 21 mars dans la soirée, après une après-midi de blocages et de manifestations spontanées. Confusion, cris, la vidéo relayée sur le compte Twitter d'AB7 Média, qui se présente comme  "un support de diffusion de l'information indépendant et engagé au plus près des luttes sociales", laisse penser que l'intervention est musclée.


Nous avons contacté les employés du magasin qui étaient de service au moment des faits. L'un d'entre eux explique qu'une petite vingtaine de manifestants étaient dans la rue.
Un groupe de policiers a commencé un contrôle des sacs à dos et des fouilles au corps, en plaquant les manifestants contre le mur près du magasin. 
" Soudain, un jeune home s'est engouffré dans la boutique. Je l'ai vu de dos" raconte l'employé. " Quatre CRS l'ont suivi pour le faire sortir manu militari. Il a reçu deux coups de matraque" poursuit-il, affirmant qu'il a reçu ensuite les premiers soins par les forces de l'ordre.

Quatre CRS l'ont suivi pour le faire sortir manu militari. Il a reçu deux coups de matraque. Je n'ai pas vu de trace de sang. Il a ensuite reçu les premiers soins par les forces de l'ordre dehors.

Un employé du Domino's Pizza

Les quatre salariés du magasin précisent avoir eu un peu peur.

Il a fallu attendre que la rue soit dégagée par les forces de l'ordre pour que les livreurs de l'enseigne puissent rejoindre la boutique et reprendre leur service. Il n'y a pas eu de dégradations dans les lieux. 
 

Brutalités et provocations

La scène est filmée depuis le balcon d'un immeuble qui fait face. La personne qui filme connaît les deux personnes que sont allées chercher les CRS à l'intérieur de la pizzeria. Leurs prénoms : Paulo et Vincent. C'est le premier qui s'est engouffré dans la boutique. Selon plusieurs témoins l'un d'eux avait de nombreux bleus au visage. Certains évoque un visage "défiguré". 

Ce même jour, la FSU 35 rapporte dans un communiqué une intervention policière sur un barrage sur un rond-point filtrant qu'organisait le syndicat. Sous la surveillance de deux camionnettes dépêchées sur place, il s'agissait de distribuer du jus d'orange aux automobilistes.

" Six ou 7 CRS casqués, visages couverts, sans matricules visibles et matraques dégainées, ont alors brutalisé, poussé sur le trottoir, et confisqué les jus de fruits aux manifestants" détaille le communiqué envoyé à la presse.

Le syndicat évoque des provocations verbales et physiques. Lorsqu'un des manifestants a tenté de reprendre un cageot de jus de pommes confisqué , "deux CRS se sont alors jetés sur lui en le frappant de leurs matraques : sur le dos, sur les bras, et sur sa main qui tenait le cageot".

"Les provocations pleuvent verbalement et physiquement en poussant par à-coups. Un des salariés a tenté de reprendre le cageot de jus de pommes confisqué. Deux CRS se sont alors jetés sur lui en le frappant de leurs matraques : sur le dos, sur les bras, et sur sa main qui tenait le cageot. Ses camarades l'ont extirpé tant bien que mal."

Fréderic Evrard, délégué Sud Éducation à l'Université de Rennes 2 était également sur place. "Un de mes collègues a été blessé à la main et aux jambes lors de l'intervention policière. On a été violemment chassé avant qu'on soit installé" explique-t-il

On a demandé leurs numéros de matricule aux policiers. Alors, ils nous ont demandé nos noms. Ils nous ont menacés, il y a eu une grosse intimidation et des violences pour nous faire partir.

Fréderic Evrard,

délégué Sud Education à l'Université de Rennes 2

Les manifestants s'étaient rassemblés pacifiquement, aucun ne s'est opposé aux forces de l'ordre, souligne-t-on. Une demande a été adressée à la Préfecture pour contenir les forces de l'ordre. " Les forces de l'ordre ne doivent-elles pas faire preuve de discernement et juger avec raison, si une situation est potentiellement dangereuse ou non ?" se demande le syndicat.

À LIRE : Qu'est-ce que la CRS 8, déployée à Rennes pour faire face aux casseurs ?

Climat délétère

Le même jour, devant la Cité Judiciaire de Rennes, un rassemblement à l'appel du collectif "Maison du Peuple" était organisé, alors que trois jeunes comparaissaient devant le tribunal pour violences et dégradations dans le centre-ville lors de la manifestation du jeudi 16 mars contre la réforme des retraites.

Parmi les soutiens, Jeanne Larue, vice-Présidente du département d'Ille-et-Vilaine en charge de l'éducation. Cette élue dénonce aussi un climat délétère.

J'ai peur de ce qui peut se passer vu la violence de la répression. Je n'ai pas envie de prendre un coup de matraque, de perdre un œil, ou de finir en détention provisoire, juste parce que j'étais dans un cortège.

Jeanne Larue

vice-Présidente du département d'Ille-et-Vilaine, en charge de l'éducation.

La pratique des relevés signalétiques mise en cause

Les interventions policières ont par ailleurs fait l'objet en début de semaine d'un communiqué de Catherine Glon, bâtonnière de Rennes.

En cause, la question des relevés signalétiques (photographies, empreintes digitales ou palmaires alimentant les fichiers de police).

Une pratique possible, mais qui sort du cadre légal, d’après la bâtonnière du barreau de Rennes qui a interpellé le procureur de la République, Philippe Astruc.

Avec Benoît Thibaut

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