Rennes. Des manifestants disent non aux audiences en visioconférence au centre de rétention administrative

A Rennes, une centaine de personnes s'est rassemblée devant le centre de rétention administrative (CRA), contre l'utilisation de la visioconférence pour les audiences fixant la durée de rétention. Des bâtiments sont en construction, à proximité immédiate du CRA, pour les assurer à distance.

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Une centaine de manifestants protestait ce samedi après-midi contre la mise en place d’audiences en visioconférence au centre de rétention administrative (CRA) de Rennes. Des bâtiments sont en train d'être construits, non loin du CRA. A l'intérieur se dérouleront les audiences des personnes retenues, devant le juge des libertés et de la détention (JLD) qui examine la légitimité de la rétention et décide de sa prolongation éventuelle. Jusque-là, ces audiences sont assurées à la Cité judiciaire. Des associations dénoncent ce nouveau dispositif. 


Une parodie de justice

"La visioconférence est justifiée pour des raisons logistiques et sécuritaires", regrette Carole Boanne, présidente du MRAP 35. Elle ajoute "L'administration veut éviter les déplacements avec les escortes policières qui sont coûteuses, pour éviter les risques d'évasion. Pour nous, cette mesure diminue surtout les droits des personnes étrangères à avoir un procès équitable."

Le fait de délocaliser les audiences et de les faire en visioconférence soulève d'autres problèmes. Pour Nadia Pinson, intervenante bénévole de la Cimade (association de soutien politique aux migrants, aux réfugiés et aux déplacés, aux demandeurs d'asile et aux étrangers en situation irrégulière) : "On ne sait pas où seront l'avocat de la personne ou l'interprète. Cela pose un problème d'imaginer une personne ici tout seule avec la police ce qui implique aussi un problème de confidentialité des échanges." 

"L'autre souci c'est que la justice normalement est publique, c'est ce qui assure un regard citoyen. Pour l'instant, on n'a pas de visibilité sur qui pourra assister à ces audiences. Enfin la dernière question, c'est que l'enfermement pour les personnes est un vrai traumatisme. Cette audience avec le juge, c'est le seul moment où elles peuvent s'expliquer, essayer de comprendre, d'argumenter. Cet aspect humain, que va-t-il devenir quand il va passer par un écran ?"  


Jean-Louis, Camerounais aujourd'hui régularisé, est passé par le CRA en 2019.. Lui n'a pas vécu la visioconférence mais il ne peut que constater la perte du rapport humain. "On ne fait qu'augmenter la frontière avec les gens en France, on dématérialise la prise de rendez-vous, on ne voit plus personne au guichet. On ne peut plus rien expliquer. Nous les justiciables, on se sent stressés et abandonnés. Avec ces procédés, on éloigne le migrant du territoire même s'il y est toujours présent, il a déjà les deux pieds presque dans l'avion."

Carole Boanne dénonce une situation "inquiétante" vis-à-vis des personnes étrangères et de l'accès à leurs droits. "Depuis la création du CRA en 2007, cela devient un véritable bunker, une vraie prison... Là, ça devient une parodie de justice, avec un tribunal dans un vulgaire algeco, qui ne ressemble à rien."

La fin des travaux de ces salles d'audiences est prévue fin juin. 

 

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