C'est la pièce maîtresse du Trésor de la cathédrale Saint-Pierre de Rennes. Le retable flamand du XVI ième siècle va être restauré. La DRAC Bretagne a confié cette mission à un atelier de Vesoul. Dans le plus grand secret, le chef d'oeuvre a été démonté, puis expédié vers la Franche-Comté.
C'est à fin du mois de septembre que le retable a pris la direction de Vesoul. Pour le transport, certaines des parties fragilisées ont été refixées grâce à des sortes de pansements, certains éléments qui avaient été ajoutés ont été démontées et l'oeuvre a été emballée dans du papier bulle.
La restauration est financée par la DRAC (Direction Régionale des Affaires Culturelles) : 160.000€ pour redonner, autant que faire se peut, une nouvelle jeunesse à cette oeuvre remarquable, classée au titre des monuments historiques en 1901. Après sa restauration, il retrouvera sa place dans la cathédrale. Il sera alors dévoilé au public avec le reste du Trésor, des joyaux et vêtements liturgiques.
18 mois de restauration
Pendant 18 mois, 7 restaurateurs d'un atelier spécialisé dans la réfection des retables vont se pencher sur ce trésor flamand du 16e siècle. Il a parfois été plus ou moins relégué dans un coin de la cathédrale, où il s'est abîmé notamment avec l'humidité. Mais dans l'ensemble, les spécialistes le trouvent exceptionnel par la finesse de ses sculptures et la très bonne conservation de ses couleurs d'origine, actuellement cachées par une couche de verni et de crasse.La restauration va s'effectuer en plusieurs étapes. Pendant 1 mois, le retable va être enfermé dans une sorte de bulle hermétique et privée d'oxygène, à une température et une hydrométrie contrôlées pour asphyxier les insectes xylophages qui ont envahi la pièce en bois.
Puis, interviendra tout le travail sur la polychromie. Cela consiste d'abord par retirer le verni et la crasse afin de retrouver les couleurs d'origine et estomper les lacunes avec une peinture aquarelle. Il sera nécessaire de consolider les parties de bois affaiblies grâce à des gestes précis et très techniques.
Arrivera alors la phase de reconstitution du vrai puzzle, puisque ce retable a été maintes fois monté, démonté et remonté… pas toujours dans le bon ordre ! Certains reliefs ne se trouvent donc pas à leur bon emplacement. D'ailleurs, 8 éléments du chef d'oeuvre sont manquants aujourd'hui.
Un retable victime de deux vols
Le retable n'a pas quitté la cathédrale Saint-Pierre de Rennes depuis 1870, date de son arrivée. A l'époque, ce type de retable flamand était vendu partout en Europe. Les chefs d'œuvre voyageaient démontés, transportés par bateau ou sur des chars à bœufs!Ce retable flammand se compose de la prédèle (sous-bassement) et de trois caissons de chêne (1 caisson central et 2 caissons latéraux). Il a subi deux grands vols. Un en 1975, qui lui vaudra d'être placé alors derrière d'importantes vitrines au verre épais qui ne laissaient plus voir grand-chose du chef d'œuvre. Et un autre vol en 2007, où les trois reliefs de la prédèle (sous-bassement du retable) sont dérobés. Seul l'un d'eux sera retrouvé en Belgique, sur le marché des oeuvres d'art, prêt à être vendu pour la somme de 300.000€.
Très récemment, une sculpture de la Vierge, exposée au Musée des Beaux Arts de Rennes, a été identifiée comme appartenant au retable. Elle aussi sera restaurée et retrouvera sa place. Depuis 2 ans, le retable n'était plus exposé.
L'historique du retable anversois
Le retable Flamand est une oeuvre remarquable d'un atelier d'Anvers (Belgique) du début du XVI ième siécle. Il ornait vraisemblablement à l'origine le coeur de la chapelle de l'Hôpital Sainte-Anne. Celle-ci contemporaine de la chapelle Sainte-Yves (vers 1500) fut démolie au XIX ième siècle.Ce retable a connu bien des errances à partir de la Révolution. Il fut déposé successivement dans l'abbatiale Sainte-Madeleine, le Musée archéologique... Après avoir été mis en vente à Paris, il revint à Rennes dans la chapelle où il était avant d'être envoyé en restauration.
Le thème principal du retable, logique pour une chapelle d'hôpital, est celui de la mort et du couronnement de la Vierge. Quelques autres scènes, liées à la vie de la Vierge et à l'enfance de Jésus, sont plus où moins conservées. Il est divisé en trois parties perpendiculaires par des pinacles très élégants, et subdivisés horizontalement de manière à présenter deux compartiments dans les parties latérales et trois dans les colonnes centrales.
Dans la partie basse du centre, par où il faut commencer, est figuré le mariage de la Sainte Vierge. A gauche, l'adoration des Bergers. A droite, l'adoration des Mages. Dans l'étage supérieur, à gauche la circoncision, à droite la Présentation au temple, au centre, la mort de la Sainte Vierge, en supériorité, l'Assomption. Les personnages entrelacés au milieu des nervures flamboyantes, fouillées comme de la dentelle, sont les acteurs pleins de vie de ces scènes évangéliques. Les volets de ce retable qui devaient présenter d'intéressantes peintures n'existent plus.