Le Salon international de l'élevage ouvre ce mardi avec son lot d'innovations et de techniques. Les organisateurs font un gros travail pour attirer exposants et visiteurs du monde entier. Mais les thèmes développés sont-ils en phase avec les attentes des éleveurs bretons ?
Le SPACE sera donc inauguré ce mardi au Parc des Expositions de Rennes, par Stéphane Travert, le ministre de l'agriculture.
Le succès de ce salon se renouvelle chaque année et les organisateurs expliquent que c'est d'abord un salon où fournisseurs et fabricants viennent présenter leurs innovations techniques. Mais c'est aussi un salon sur l'amélioration de la génétique animale avec le concours des races bovines et ovines.
Le bien-être animal et le bien-être de l'éleveur
Au SPACE, les éleveurs peuvent venir chercher des solutions pour améliorer leur productivité et mesurer si des investissements seront utiles ou nécessaires pour rester dans la course. Et pour les aider à découvrir les techniques, à comprendre les enjeux et décrypter les tendances ils peuvent assister à des conférences. Cette année les organisateurs affichent que les innovations portent sur l'amélioration des conditions de travail de l'éleveur et sur le bien-être animal. Les vecteurs de ces innovations viennent en particulier des avancées des technologies numériques et informatiques dans des applications et logiciels, et dans l'automatisation et la robotisation. Quelques représentant de syndicats d'agriculteurs ont accepté de donner leur avis sur ces thèmes.FDSEA
Pour Jean Monxifrot, président de la section laitière FDSEA 35, le bien-être animal est à l'évidence un thème qui fait écho dans l'opinion publique. Il souligne que les éleveurs n'ont aucun intérêt à maltraiter leurs cheptels et sont sensibles à toutes les améliorations.
Coté bien-être de l'éleveur il pense que le monde agricole est favorable à tout ce qui peut rendre le travail moins pénible. La robotisation de la traite des vaches par exemple peut à la fois être une avancée pour l'animal et pour les exploitants. Des éleveurs peuvent par exemple consacrer plus de temps-libre à la vie familiale.
Dans son cas personnel il a investi il y a trois ans dans une salle de traite rotative et constate que c'est déjà moins pénible et moins d'astreinte.
Mais pour le syndicaliste, "le bien-être de l'agriculteur passe avant tout par des prix rémunérateurs. On se moque de nous depuis trois ans, mais sans marges correctes il n'y a pas d'investissement possible, pas de renouvellement du matériel nécessaire à l'exploitation".
Jeunes Agriculteurs
Florian Salmon est le président des JA en Ille-et-Vilaine, l'antichambre de la FNSEA 35 soucieux du renouvellement des générations à travers l'installation de jeunes agriculteurs. "Améliorer les conditions de travail c'est donner plus d'attractivité aux métiers de l'agriculture et à l'installation des jeunes" et Florian Salmon d'ajouter : " Le bien-être animal est une attente sociétale qui se conjugue fort bien avec une amélioration des résultats techniques"
Sur sa présence au SPACE il explique que les JA ont un stand pour accueillir les jeunes agriculteurs et être à leur écoute et aussi pour discuter avec les hommes politiques de passage.
Il a un message pour Stéphane Travert : "Nous revendiquons que le ministre s'investisse plus du coté des agriculteurs et opte pour plus d'obligations pour les transformateurs. La charte pour des États Généraux de l'Alimentation est caduque... On attend que la loi évolue en faveur de garanties de prix pour les agriculteurs".
Coordination Rurale
Les élus sont tous occupés, et c'est Pierre Lemarié, un animateur de la CR 35 qui nous répond depuis le Parc-Expo de Rennes où il est en train d'installer le stand de son syndicat. Il commence par présenter le programme des conférences qu'ils vont animer.
Mardi : la situation des femmes agricultrices dont ils voudraient faire évoluer les droits. Pour cela ils ont fait venir des agricultrices de toute l'Europe. Ils se sont aussi assuré de la présence de députés bretons.
Mercredi : le lait et la question des coopératives. Les coopératives veulent produire toujours plus et gagner des parts de marché mais la représentativité des petits agriculteurs n'existe plus dans les coopératives et c'est la coop qui tient l'agriculteur. Le prix du lait est souvent mal redistribué aux éleveurs. Pourtant les coopératives ont les moyens de se racheter entre-elles.
Jeudi : 50 ans de combats syndicaux avec la sortie du livre de cinq agriculteurs morbihannais.
Et l'animateur de conclure : "Pour la CR 35, le Space ne représente pas forcément l'agriculture actuelle. Ce qui serait une vraie innovation, c'est que les éleveurs gagnent bien leur vie."
Confédération Paysanne
Eric Duverger est producteur de lait près de Montauban de Bretagne et militant de la Confédération Paysanne dont il est porte-parole en Ille-et-Vilaine.
D'entrée il décrit la situation : "Les fermes s'agrandissent mais les revenus stagnent malgré les avancées technologiques et les agriculteurs souffrent de burn-out et de mal être."
La Confédération Paysanne sera sur le SPACE elle aussi pour répondre aux interrogations. Elle anime un débat mardi après midi sur la modernité en élevage.
La modernité pour Eric Duverger "c'est d'être un paysan bien dans sa tête qui trouve un équilibre entre son travail et sa vie familiale".
n paysan respectueux de l'environnement également. Le syndicaliste constate que l'indice de fréquence des traitements est encore de 0,8 en Ille-et-Vilaine. (IFS de 0,8 soit 0,8 unité dose de traitements phytosanitaires par hectare). Lui élève ses bêtes essentiellement sur des herbages, son IFS est de 0,1. Il y a encore fort à faire.
Stéphane Travert très attendu sur la question des prix
Une chose est sûre, tous les syndicats attendent du ministre de l'agriculture Stéphane Travers une réponse plus convaincante sur la formation des prix que celle qu'il a fourni à Jérémy Decerle, président des JA en clôture de la fête agricole "Terres de Jim", à Fougères en Ille-et-Vilaine.
D'après l'AFP, Jérémy Decerle a expliqué au ministre de l'agriculture que les agriculteurs refusent de se voir imposer des indicateurs de coûts de leur production par l'agroalimentaire ou la distribution, qui se basent sur des prix des matières premières issus des marchés mondiaux, forcément plus bas que les leurs.
"Je n'ai pas fait Harvard, mais je crois qu'entre ce que nous demandons et l'économie administrée, il y a une sacrée marge" a dit M. Decerle, en soulignant l'unanimité sur ce sujet entre les syndicats agricoles. "La base de tout, c'est notre revenu, et ce qui se joue ces jours-ci m'inquiète vraiment" a-t-il ajouté.
Dans sa réponse, le ministre Stéphane Travert a bien souligné la mise en place d'un dispositif permettant que "l'observatoire de la formation des prix et des marges puisse venir aider à trouver ces indicateurs". Mais, "en cas de blocage", il s'en remet au "médiateur des relations commerciales agricoles", qui "pourra aider les interprofessions à définir les indicateurs et à se mettre d'accord", a-t-il dit lundi sur Franceinfo.
"Nous voulons trouver une solution qui fasse consensus, que les agriculteurs ne soient pas les laissés pour compte dans ces discussions et que le juste prix soit le prix qui sorte à la fin pour une garantie d'un meilleur revenu pour les agriculteurs" a dit le ministre.