Pour la première fois, ce 6 juillet, les habitants du quartier Maurepas de Rennes sont descendus dans la rue pour dire leur exaspération après les violences de ces dernières semaines. Le collectif Front de mères appelle à l’aide.
Le 11 juin, dans le quartier de Maurepas à Rennes, un homme est blessé à coups de couteau. Quelques heures plus tard, un immeuble est visé par des tirs. Le 13 juin, un jeune homme de 28 ans, est poignardé en pleine rue. Le 24 juin, deux hommes à scooter ont tiré sur deux personnes du quartier puis ont visé des policiers.
"Les gens en ont marre, ils sont fatigués, excédés, ils ont peur. Ils veulent des actions pas des mots", explique Lalla Bathily. Elle fait partie du collectif Front de mères à l’origine de la marche blanche.
Elle a vu un climat de peur s’installer dans le quartier. "Les mamans à la sortie de l’école, elles ne discutent plus devant la porte, elles rentrent vite."
Des mères qui vivent "la peur au ventre"
"Quand on est mère, on a peur pour les enfants. Quand ils sortent, on appréhende, on est sous tension. Les gamins, ils ne sont pas libres quand ils sont dehors. Certains font partie des bandes, d’autres pas du tout, mais ils peuvent quand même se retrouver mêlés à des faits malgré eux, tomber au milieu d’une bagarre ou se laisser entraîner, de gré ou de force, constate-t-elle. Avant, il y avait du trafic, maintenant c’est de la violence avec armes entre bandes rivales."
"Quand tu es mère d’un enfant de 15 ou de 17 ans, si tu lui as dit, tu rentres à telle heure et qu’il refuse, tu es désemparée, témoigne Klervi Donot, membre elle aussi de Front de mères. Tu ne peux pas aller le chercher dans la rue. Tu es en détresse parce que tu ne sais plus comment faire pour le récupérer, le sortir de la rue parce que tu redoutes le pire, une balle perdue ou un coup de poignard."
"Cette violence, ce n’est pas Maurepas, précise-t-elle. Il ne faut pas qu’une minorité fasse la loi. 15 personnes, ça n’est pas Maurepas. Nous sommes dans notre quartier, on a le droit de circuler, on veut être en paix et pouvoir sortir et vivre comme avant, sans se prendre une balle perdue."
Je refuse de m’empêcher de sortir de chez moi et de m’empêcher de vivre comme avant
Klervi Donot, Front de mères
Tout en préparant les banderoles et les pancartes pour la marche blanche, elle raconte, "on voit bien quand on passe, les enfants de CE2, et de CM, ils regardent les bandes avec des yeux admiratifs parce qu’ils ont de l’argent, des super chaussures, des nouveaux téléphones super high-tech. Et eux, avec leurs yeux d’enfants, ils ne voient pas les dangers, ni les risques d’aller en prison, c’est de la poudre aux yeux.'
Prévenir pour ne pas avoir à subir
Front de mères demande la mise en place d’actions de prévention dans le quartier. 'Il faut agir au niveau des écoles et au niveau des mamans de ces enfants qui sont encore en primaire pour qu’ils ne se fassent pas alpaguer pour faire le guet. Parce que ça commence comme ça. On en voit déjà, des petits qui ne sont pas encore en 6ème qui font le guet pour des plus grands. Si on pouvait éviter ça…' espère Klervi Donot.
Dans le quartier, il y a quelque temps, des jeunes empêchaient les autres d’aller à l’école. 'Comme eux, ils sont déscolarisés, ils ne veulent pas que d’autres aillent en cours. C’était des menaces, des intimidations, on veut que ça s’arrête', répète Lalla Bathily.
Ce 6 juillet, 150 personnes ont marché et chanté pour exiger le retour au calme à Maurepas. " On aimerait bien qu’il y ait autre chose que juste des policiers dans le quartier, indiquent les mères. Leur présence peut amener des tensions, il faut des policiers et un accompagnement social, que l’on nous donne des moyens d’agir, de faire quelque chose. Que les jeunes soient encadrés et qu’on puisse leur dire ne gâchez pas votre vie avec ça. "
Le collectif propose par exemple que des jeunes qui sont déjà passés par la case prison puissent venir témoigner de ce qui se passe vraiment et des risques pour leur faire comprendre que cela ne vaut pas le coup.
Les mères espèrent que le quartier va retrouver son calme, pour qu'elles, et leurs enfants, puissent recommencer à sortir et à vivre normalement.