Violences sexuelles. Agressions dans les stades ou les festivals: pourquoi cette impunité ?

Après le témoignage d'une supportrice habituée du Stade Rennais qui a fait part sur les réseaux sociaux d'une agression lors du match Rennes-Nantes dimanche dernier, une sociologue décrypte ce phénomène des violences sexuelles dans un contexte de fête et de foule, avec en toile de fond les mentalités d'une part, et le sentiment d'impunité.

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Dimanche dernier, une supportrice du Stade Rennais affirme sur les réseaux sociaux avoir été victime d'une agression sexuelle au Roazhon Park, lors du match Rennes-Nantes. Si elle n'a pas souhaité porter plainte, le Stade rennais " lui apporte un soutien total et s’est rapproché des autorités compétentes pour identifier l’agresseur présumé" indique un communiqué.

"Profiter d'un bras dessus bras dessous pour descendre sa main sur les seins d'une fille, je suis dégoûtée, c'est la première fois que je me sens si peu en sécurité en mordelles" a-t-elle indiqué sur X (ex-Twitter). "Mordelles" étant le nom de la tribune dans laquelle la jeune fille a ses habitudes. 

La jeune femme a raconté par écrit à nos confrères de "So foot" ce qu'elle a vécu en tribunes : "Le garçon derrière moi commence à être tactile avec moi. Il met sa main sur mon épaule, il était complètement bourré… Bon, je me sens mal à l’aise, mais je laisse passer. Après, le capo lance un bras dessus, bras dessous sur le «  Qui ne saute pas ». Mon copain est à ma gauche, le garçon à ma droite, et sa main descend de plus en plus vers mon sein", a-t-elle confié.

L'ami de la jeune femme a vite compris ce qui se passait, raconte ensuite Sahra Conte, et s'est interposé. Après avoir changé de place, la jeune fille raconte avoir suivi la fin de match en pleurs.

 

Le sexisme et l'homophobie font appel aux mêmes mécanismes, aux mêmes ressorts. C'est l'entre-soi masculin qui facilite le passage à l'acte

Stéphanie Le Gal-Gorin

sociologue


Le contexte de foule dans un stade "contribue largement au passage à l'acte", selon Stéphanie Le Gal-Gorin, sociologue en Bretagne. "Par exemple, le milieu du foot est un milieu où le seuil de tolérance à ce type de violence est particulièrement élevé. Le sexisme et l'homophobie font appel aux mêmes mécanismes, aux mêmes ressorts. Il y a une grande partie des spectateurs qui n'est même pas choquée. C'est l'entre-soi masculin qui facilite le passage à l'acte"

Fort heureusement, sur les réseaux sociaux, il y a de nombreux messages de soutien à la supportrice du Stade Rennais. Et puis, le club lui-même s'est exprimé en soutien à la supportrice. Mais la sociologue interroge : "C'est bien, mais après, que vont-ils mettre en place ?

Rapport alarmant sur l'état du sexisme en France 

En début d'année 2023, le Haut Conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes a publié les résultats d'un rapport sur l’état du sexisme en France. La sociologue s'alarme ouvertement : " Je peux vous dire que les résultats sont inquiétants, car ils montrent que le sexisme perdure et que ses manifestations les plus violentes s’aggravent".

Principal enseignement de ce rapport : en dépit d’une sensibilité toujours plus grande aux inégalités depuis Me Too, les clichés et les stéréotypes sexistes perdurent. L’opinion est paradoxale : elle reconnaît et déplore l’existence du sexisme, mais ne le rejette pas en pratique, majoritairement chez les hommes. La persistance du sexisme dit « ordinaire » est d’autant plus préoccupante qu’elle peut conduire aux manifestations les plus violentes.

Parmi les hommes de 25 à 34 ans, près d’un quart estime qu’il faut parfois être violent pour se faire respecter, et tous âges confondus, 40% trouvent normal que les femmes s’arrêtent de travailler pour s’occuper de leurs enfants. En ce qui concerne les femmes, 80% estiment être moins bien traitées que les hommes en raison de leur sexe et 37% disent avoir déjà subi des rapports sexuels non consentis.

Les festivals concernés également 

Et les stades de football ne sont pas les seuls concernés par ces violences sexuelles et sexistes. Les festivals également. Deux enquêtes ont d'ailleurs été ouvertes pour faire la lumière sur deux faits d'agressions sexuelles qui se seraient déroulées lors du festival Motocultor de Carhaix (Finistère), entre le 17 et le 20 août dernier. Un mois plus tôt, une enquête avait également été ouverte pour viol dans l'un des campings du festival des Vieilles Charrues, dans la nuit du 15 au 16 juillet 2023.

Des bénévoles du festival Bobital sensibilisés 

La clé du problème serait-elle dans la sensibilisation ?  Sans doute que oui. C'est un travail que mène déjà Stéphanie Le Gal-Gorin avec L'espace femmes de Dinan, au sein de l'association Steredenn : "Nous avons formé cette année une quinzaine de bénévoles du festival Bobital dans les Côtes-d'Armor à utiliser l'application Safer, un dispositif de lutte contre les violences sexuelles et sexistes en milieux festifs, qui accompagne les organisations dans la création de protocoles de sensibilisation et d'accompagnement des victimes. Cela permet concrètement de vite signaler des agissements problématiques, afin qu'ils ne soient plus banalisés ou minimisés. Parfois, on entend, oui, mais j'ai dit ou j'ai fait ça parce que j'avais bu. Je rappelle que l'alcool est une circonstance aggravante, pas atténuante". 

Poser un cadre est déjà une étape essentielle pour Stéphanie Le Gal-Gorin : "Récemment, je suis allée au festival Panoramas à Morlaix et il y avait bien des messages de prévention des violences sexuelles et sexistes d'affichés. On peut dire que ce n'est que symbolique, mais c'est déjà la base. Ensuite, il faut une vraie volonté des organisateurs et des moyens financiers. Encore, au-delà, la vraie question, c'est la sécurité des femmes dans l'espace public", conclut la sociologue. 

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