Des infirmières, aides-soignantes et administratives de l'hôpital de Saint-Malo s'apprêtent à lancer une action contre leur employeur pour discrimination durant leur grossesse. Plus de 200 femmes ont vu leur avancement gelé dans cette période. L'une d'elles a obtenu réparation en mai dernier.
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Une infirmière du centre hospitalier de Saint-Malo a obtenu gain de cause devant le tribunal administratif, en ayant fait valoir une
discrimination d'avancement liée à ses congés maternité. Les chiffres sont éloquents : entre son salaire et celui de son mari, également infirmier en psychiatrie à l'hôpital de Saint-Malo, avec la même ancienneté, il existe une différence d'une centaine d'euros, apparemment liée à une différence de note administrative. En congé maternité en 2006 et 2008, l'infirmière comprend que dans ces périodes, sa note n'a pas été prise en compte, empêchant tout avancement salarial. Elle décide alors d'agir, par la discussion d'abord, puis par voie de justice.
L'hôpital condamné
En mai dernier,
l'hôpital est condamné à une amende, et à la régularisation de la situation de Myriam Herbel, qui obtient 1.800 euros en réparation de ses préjudices et 1.500 euros en remboursement de ses frais de justice.
"Le gel de la notation des agents non présents au moins six mois dans le service ainsi institué et pratiqué au sein du CH de Saint-Malo a notamment pour effet de traiter de manière défavorable les agents absents pour maternité", souligne le tribunal, ajoutant:
"Une telle mesure constitue une discrimination indirecte en raison de la grossesse ou de la maternité et, partant, du sexe." Le centre hospitalier n'a pas fait appel du jugement, mais tarde toujours à se conformer à la décision.
Le problème concernerait quelques 200 personnels féminins de l'hôpital de Saint-Malo, et dépasserait largement le cadre du secteur hospitalier.
Une action de groupe à suivre
Une victoire qui donne l'idée à
une quarantaine d'autres salariées de l'hôpital, de faire valoir leurs droits dans le cadre d'une action de groupe, car au coeur du litige il y a bien le gel, jusqu'en 2014, de l'avancement de certaines salariées du centre hospitalier durant leur grossesse. Le directeur de l'hôpital reconduisait alors automatiquement la note des personnes absentes pendant au moins six mois, malgré l'avis de leur supérieur hiérarchique qui avait proposé d'augmenter leur note.
200 cas de discrimination à l'hôpital malouin
Sur 1.300 congés maternité intervenus entre 1983 et 2017 à l'hôpital de Saint-Malo, 200 cas révéleraient une discrimination, selon lui. Ce gel de notation ayant été pratiqué dans d'autres hôpitaux français, la question peut d'ailleurs toucher "tous les personnels féminins non médicaux de la fonction publique hospitalière", a ajouté le syndicaliste.
La maternité n'empêche plus la progression, assure l'hôpital
Contactée par l'AFP, la direction du Centre Hospitalier de Saint-Malo assure que ces pratiques n'ont plus cours.
"Depuis 2014, nous avons revu notre système de notation pour que les périodes de congés maternités n'empêchent plus les progressions de la note chiffrée" des salariées concernées, a-t-elle indiqué.
"On n'a pas répondu à l'antériorité des situations. Cette décision (du tribunal) est un cas de jurisprudence qu'il faut examiner", notamment parce qu'il s'agissait d'une
"pratique qui était en cours dans de nombreux établissements", a-t-elle ajouté. Cette jurisprudence qui
"peut avoir un impact sur d'autres collectivités", souligne-t-on.
"On va interroger les services de l'État pour voir les possibilités d'opérer une rétroactivité", ajoute la direction qui assure rester
"en phase de négociation".
Le reportage à Saint-Malo (35) de Thierry Bréhier et Christophe Rousseau