Francis Joyon s'élancera de Saint-Malo, le 6 novembre 2022, pour sa huitième Route du Rhum. Vainqueur en 2018, le marin, âgé de 66 ans, repart sur le même trimaran Ultim construit il y a seize ans. "Mon bateau ne vole pas mais il est fiable et puissant" dit-il.
"Certaines questions ne trouvent leurs réponses qu'au large". Insatiable et philosophe, Francis Joyon sera, après son triomphe en 2018, de nouveau au départ de la Route du Rhum ce 6 novembre, avec l'espoir de l'emporter, malgré un bateau vieillissant.
"Le seul moyen d'avoir une chance de gagner, c'est de participer. Je n'en ai ni plus, ni moins, que la dernière fois" explique le navigateur de 66 ans, qui participera pour la huitième fois à la reine des transats.
Plusieurs records
"C'est un événement incontournable. Quand on sait toutes les belles histoires qui sont nées sur cette course, on se sent privilégié d'être sur la ligne de départ" raconte le marin début octobre, lors d'une navigation près de son port d'attache à La-Trinité-sur-Mer, dans le Morbihan.
Depuis 1990, Francis Joyon a participé à certaines de ces belles histoires. Mais il a dû attendre 2018 pour s'imposer, à 62 ans, après un duel d'anthologie avec François Gabart, fixant au passage le nouveau temps de référence de l'épreuve (7 jours, 14 heures, 21 min et 47 sec).
Pour gagner, "il faut une bonne météo, que le skipper n'ait pas de coup de mou et un bateau sûr" détaille ce compétiteur hors pair d'une voix douce, tranchant avec sa carrure imposante.
Francis Joyon naviguera sur un trimaran Ultim (32 mètres de long) construit il y a 16 ans, qui lui a permis de gagner le 'Rhum' mais aussi d'établir plusieurs records, dont celui du tour du monde en équipage en 2017 (40 jours et 23 heures).
Je suis curieux de voir si, au large et dans des conditions difficiles, mon bateau peut encore tirer son épingle du jeu
Francis JoyonSkipper Route du Rhum 2022
Sur la ligne de départ, il sera confronté à des skippers plus jeunes comme François Gabart (39 ans), Armel Le Cléac'h (45 ans) ou encore Charles Caudrelier (48 ans), barrant des Ultims de dernière génération, volant sur l'eau grâce à leurs foils et filant à vive allure.
De quoi l'inquiéter ? "J'ai eu la chance de naviguer sur le bateau de François Gabart fin septembre et il était absolument magique. Je suis curieux de voir si, au large et dans des conditions difficiles, mon bateau peut encore tirer son épingle du jeu" s'interroge le navigateur.
"Question de survie"
Son voilier ne peut pas voler, mais "il est fiable et puissant". Francis Joyon estime que ses six ans d'expérience à la barre du même trimaran peuvent faire la différence. "Il y a toujours à apprendre, mais là ça y est je crois que je l'ai bien en main" dit-il.
Pour le skipper, la Route du Rhum, "ce n'est pas de la performance pure, car on part à une période où il y a des dépressions dans l'Atlantique nord qu'il faut franchir. Dans ces moments-là, c'est davantage une question de survie" analyse-t-il.
Après seize ans sur l'eau, on peut dire que ce bateau a amorti son bilan carbone
Francis JoyonSkipper Route du Rhum 2022
Le marin sexagénaire n'a pas envie de rallier la nouvelle génération à bord des bateaux volants, pour des raisons écologiques notamment. "Je suis sensible à ce qu'il se passe sur la planète, confie-t-il. Après seize ans sur l'eau, on peut dire que ce bateau a amorti son bilan carbone. C'est une petite satisfaction qui permet d'être serein au départ et aussi pour la suite".
Voilà des années qu'il vogue sur toutes les mers de la planète, mais Francis Joyon n'est pas lassé du large. Cette 12e édition de la Route du Rhum ne sera a priori pas son dernier coup d'éclat. "On a un gros programme au printemps, mais je n'en dirai pas plus pour l'instant" sourit-il, facétieux