C'est la première affaire Metoo dans le monde de la course au large. La Fédération française de voile a saisi la justice au sujet de Kevin Escoffier, l'un des héros du dernier Vendée Globe. Il est soupçonné d'une "agression sexuelle" sur une jeune membre de son équipe aux États-Unis.
"L'article 40 a bien été déclenché", a déclaré mardi la FFVoile. Kevin Escoffier avait annoncé le 3 juin quitter l'écurie PRB-Holcim après avoir évoqué "un incident présumé" avec un membre de son équipe, survenu à Newport en mai, lors d'une escale de la course The Ocean Race. Sollicités, ni le skipper, ni son avocate n'ont réagi dans l'immédiat.
Selon une source proche du dossier, "les faits seraient apparentés à une agression sexuelle". La fédération avait d'abord saisi la cellule violences sexuelles du ministère des Sports, chargée d'une enquête administrative, et a décidé vendredi d'effectuer un signalement auprès du procureur de la République de Paris en faisant jouer l'article 40 qui permet à une autorité de le faire lorsqu'elle a connaissance d'un délit ou d'un crime.
"J'ai passé un certain nombre de coups de téléphone qui m'ont amené à penser que ce qui a été présenté comme un incident présumé serait un comportement inapproprié qu'il aurait eu envers une femme lors d'une soirée" avait expliqué la semaine dernière le président de la FFVoile Jean-Luc Denéchau.
"Dérapages répétés"
A ce stade, aucune plainte n'a été déposée. "Nous n'avons pas de nouveaux éléments à apporter", a-t-on précisé du côté de la Fédération ce mardi. Une procédure disciplinaire a également été lancée en interne.
Sollicités par l'AFP mardi, Kevin Escoffier n'avait pas répondu. Dans son édition de mercredi, le Canard Enchaîné a rapporté le témoignage de plusieurs personnes décrivant des "dérapages répétés" du navigateur breton envers des femmes.
"Toutes nos conversations, même les plus banales, finissaient par dévier sur des propos et des provocations à caractère sexuel avec l'envoi de photos et de vidéos pornographiques", explique l'une d'elles à l'hebdomadaire, qualifiant ces envois non-sollicités de "répétitifs (et) malsains".
"Il me demandait si son sexe était beau, gros, à mon goût", a raconté une ancienne connaissance du skipper. Une navigatrice professionnelle a également raconté au Canard qu'Escoffier lui aurait touché la poitrine sans son consentement.
Un marin expérimenté
Des témoignages font également état d'un "comportement parfois déplacé" de la part du Breton. "On m'avait dit de ne pas rester toute seule avec lui à cause de son comportement parfois déplacé vis-à-vis des femmes", a expliqué une jeune actrice de la course au large.
Escoffier, 43 ans, a remporté The Ocean Race en 2017-18 et compte aussi à son palmarès la Transat Jacques-Vabre 2005, ainsi que le Trophée Jules-Verne en 2012, sur le Maxi Banque Populaire V de Loïck Peyron.
Avant de quitter l'écurie PRB-Holcim, il souhaitait se lancer à l'assaut du prochain Everest des Mers, le Vendée Globe 2024. Il avait été l'un des héros de la dernière édition. Naufragé dans la tempête au large du Cap de Bonne Espérance, il avait sauté dans son radeau de survie avant d'être secouru in extremis par son concurrent Jean Le Cam.
Dans une interview accordée à Ouest France et l'Equipe la semaine dernière, Escoffier affirmait "se tenir à la disposition des institutions sportives".
Sollicitée, PRB-Holcim, son ancienne équipe sur The Ocean Race, n'a pas souhaité réagir mardi. Après avoir été longtemps leader, l'équipe suisse pointe à la 2e place du classement général de la course autour du monde en équipage avec escales, avant le départ de la 7e et dernière étape jeudi, en direction de Gênes (Italie).
AFP