Violences sexistes. Le témoignage de Maëva : "On vit la peur au ventre et c’est pas une vie"

En ce 19 novembre 2022, journée d’action contre les violences faites aux femmes, Maëva a accepté de nous livrer son histoire. Six années de violences physiques et psychologiques, de peur, de honte, de souffrances. Et puis l’espoir. Maëva a quitté son compagnon. Elle espère que son témoignage permettra à d’autres d'avoir le courage de partir.

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"J’avais 17 ans, commence Maëva, j’étais amoureuse. Au départ, il y a eu des mots qui blessent, puis des coups, d’abord dans les murs… et puis…" La jeune femme marque un temps de silence. "Il m’étranglait pour me faire taire",  poursuit-elle. La jeune femme a encaissé pendant six ans.

"Sur le coup, on ne réagit pas parce qu’on est sous le choc, on se demande si c’est vraiment réel. Et puis, on reste. Parce qu’on est amoureuse. Et parce qu’on a peur !"

"Prisonnière"

 "Quand on a pris un logement ensemble, il m’a éloignée de mes proches, je ne les voyais presque plus,  j’étais comme enfermée dans une bulle avec lui. Prisonnière."

Si je lui dis que je le quitte, il va me tuer ?

Maëva

Pendant des années, Maëva a subi. Des insultes, des menaces de mort. "Quand il me rabaissait parce  il n'aimait pas ce que j'avais cuisiné, on ne peut pas imaginer ce qui peut se passer pour quelque chose de plus grave. Si je lui dis que je le quitte, il va me tuer  ?"

Avec la peur pour compagne

 "On a peur tout le temps ", confie Maëva. "Chaque jour, on se lève et on ne sait pas ce qui va se passer. J’avais la boule au ventre en rentrant du travail, je faisais même des heures supplémentaires pour ne pas être à la maison. On vit la peur au ventre et c’est pas une vie. On encaisse au-delà de l’encaissable."

Lucide, Maëva déconstruit petit à petit les mécanismes qui ont fait son malheur pendant des années. "On sait qu’on pourrait partir, mais on a tellement peur qu’en fait, on ne peut pas. On a peur de rester mais encore plus peur de partir.

 

Isolement

Pendant des années, Maëva a tu ses souffrances. "Je ne voyais presque plus mes proches, parce que j’avais peur qu’ils devinent, peur aussi qu’il s’en prenne à eux. Et puis, j’avais honte".

"On a beau se dire qu’on a du caractère, on a honte. Quand il a avoué ce qu’il m’avait fait, j’ai lu dans les yeux de ma mère, de mon père et de mes sœurs ce que j’avais toujours redouté de voir. On sait que ça va leur faire du mal alors on encaisse."

Un nouveau départ

Un jour, où il a frappé un peu plus fort, Maëva s’est rebellée. "J’ai pensé, c’est lui ou moi, j’ai relevé la tête et je lui ai dit je n’aurai plus jamais peur de toi".

Et puis, cet été, il a commencé à faire n’importe quoi. Mais à ce moment-là, il y avait les enfants. "Ce qui sauve, c’est les enfants. Quand j’étais la seule à prendre des coups, je tenais, mais quand ils ont été là, j’ai cessé de serrer les dents. Je m’étais promis qu’ils ne seraient jamais témoins de ça. Mes enfants m’ont sauvée, peut-être que sans eux, je serais encore avec lui."

Quelques semaines avant leur séparation, il lui fonce dessus avec sa voiture. Pour ne pas prendre de risques, Maëva choisit alors de lui annoncer qu’elle le quitte dans un lieu public. "Je me suis dit que je serais plus en sécurité". 

Il faut que les choses bougent

Maëva a commencé à se reconstruire, loin de lui. "Moi je revis, c’est une renaissance", dit-elle.

Quand on est dedans, on se dit qu’on ne s’en sortira jamais, mais si on peut s’en sortir !"

Maëva

"Pendant des années, on s’oublie complètement. On oublie ses principes, ses valeurs, on oublie tout et on ne sait plus trop qui on est. Mais il faut que ça bouge pour les femmes. La justice ne prend pas assez les femmes au sérieux. J’ai plus d’amies victimes de violences que d’amies qui sont heureuses dans leurs couples. J’ai une amie qui a porté plainte, mais son compagnon n’a toujours pas été jugé."

"On peut s’aider entre femmes, termine-t-elle. J’espère que mon témoignage donnera le courage à d’autres de partir, de parler. Si ça sauve une femme, alors c'est gagné ! "

Depuis le début de l’année 2022, selon le collectif Nous Toutes, 120 femmes sont mortes sous les coups de leur conjoint. Entre 2017 et 2021, le nombre de viols ou tentatives de viols enregistrés par le ministère de l'Intérieur a doublé, passant de 16.900 à 34.300.

Le 3919, numéro de téléphone pour les victimes de violences est accessible 7 jours sur 7, 24h sur 24.  

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